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Covid-19 : bloqués au Yémen, des dizaines de milliers de migrants craignent pour leur vie (OIM)

Des réfugiés somaliens se reposent sur une plage au Yémen après avoir franchi le golfe d'Aden (archive)
UNHCR/R. Nuri
Des réfugiés somaliens se reposent sur une plage au Yémen après avoir franchi le golfe d'Aden (archive)

Covid-19 : bloqués au Yémen, des dizaines de milliers de migrants craignent pour leur vie (OIM)

Migrants et réfugiés

Les restrictions liées à la pandémie de Covid-19, ont non seulement réduit de 90 % le nombre d’arrivées de migrants au Yémen au cours des derniers mois, mais des dizaines de milliers de migrants sont également bloqués dans ce pays, a alerté mardi l’Organisation internationale pour les migrations (OIM).

« Les restrictions liées à la pandémie du nouveau coronavirus ont laissé des dizaines de milliers d’Éthiopiens bloqués dans ce pays », a déclaré Paul Dillon, porte-parole de l’OIM, lors d’un point de presse virtuel depuis Genève. Selon l’agence onusienne, ces migrants sont soumis à « une relocalisation forcée, à une détention arbitraire et à des abus, et exposés à la propagation du coronavirus avec un accès limité aux services de soins ».

En raison de l’épidémie et du conflit en cours, les transports à travers le pays ont été bloqués. Et au moins 14.500 migrants ont été « transférés de force » entre les gouvernorats, laissés à leur sort dans les gouvernorats d’Aden (4.000 migrants), de Marib (2.500), de Lahj (1.000) et de Saada (7.000). « Ce chiffre est une estimation de base et le chiffre réel est probablement beaucoup plus élevé », a précisé M. Dillon.

Selon l’OIM, ces tendances ne font que confirmer que le Yémen est « un pays extrêmement dangereux pour les migrants » depuis près de six ans. La pandémie de Covid-19 n’a fait qu’« aggraver cette situation ». « Les migrants sont considérés comme des boucs émissaires en tant que porteurs du virus et, par conséquent, souffrent d’exclusion et de violence », a fait remarquer le porte-parole de l’agence onusienne.

Outre les renvois forcés, les craintes suscitées par la Covid-19 ont conduit les migrants au Yémen à subir un harcèlement verbal et physique, à être davantage détenus et à subir des restrictions de mouvement. Face à la propagation du coronavirus, certains migrants ont été même victimes de quarantaine forcée, de refus d’accès aux services de santé et de restrictions de mouvement.

Le Yémen recense 1.469 cas confirmés de Covid-19 dont 418 décès

Le 11 mai dernier, l’OIM et l’Organisation mondiale de la santé (OMS) avaient déjà affiché leurs préoccupations concernant la stigmatisation des migrants au Yémen durant cette épidémie du nouveau coronavirus. Elles redoutaient que les migrants et réfugiés soient souvent les boucs émissaires, accusés de mettre en danger les populations autochtones.

Le Yémen recense 1.469 cas confirmés de Covid-19 dont 418 décès, selon un bilan établi par l’OMS. « Mais l’OIM et la communauté humanitaire au sens large au Yémen travaillent en partant du principe que le virus est répandu et les rapports de maladies et de décès dans les communautés locales confirment cette crainte », relève toutefois M. Dillon.

A noter qu’en 2019, plus de 138.000 migrants - une moyenne de 11.500 par mois - sont arrivés au Yémen en provenance de la Corne de l’Afrique, selon la Matrice de suivi des déplacements de l’OIM, avec pour destination l’Arabie saoudite pour y trouver du travail. Si en mai 2019, 18.904 personnes ont effectué la traversée, cette année, seules 1.725 arrivées ont été enregistrées par l’OIM.

La plupart d’entre eux dorment en plein air ou dans des bâtiments abandonnés peu sûrs, « ce qui les expose davantage au risque d’exposition à la Covid-19 ». Ils ont peu accès aux services de base comme la nourriture, l’eau potable ou les soins de santé, une situation inquiétante, compte tenu de l’omniprésence du virus au Yémen.

L’année dernière, l’OIM est venu en aide à près de 60.000 migrants au Yémen, notamment en matière d’hébergement, de soins de santé, d’aide au retour volontaire et de soutien psychosocial. Mais ces activités sont remises en cause par le manque de fonds de l’agence onusienne. L’appel de 155 millions de dollars lancé cette année pour venir en aide à plus de 5 millions de personnes d’ici la fin de l’année n’est financé qu’à moitié.