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Côte d'Ivoire : face aux violences, l'ONU réaffirme qu'elle restera impartiale

Côte d'Ivoire : face aux violences, l'ONU réaffirme qu'elle restera impartiale

Des réfugiés ivoiriens dans le nord du Libéria attendent de recevoir des rations alimentaires.
Trois mois après le début de la crise postélectorale en Côte d'Ivoire, le Représentant spécial de l'ONU dans ce pays, Y J Choi, a rappelé vendredi que les Casques bleus resteraient impartiaux et que la volonté démocratique du peuple prévaudrait.

« La crise postélectorale, qui a éclaté depuis l'élection présidentielle du 28 novembre 2010, ne montre pas de signe d'apaisement. Ce sont les ténèbres d'avant l'aube. Je n'ai jamais douté que la volonté du peuple prévaudrait à la fin et la fin arrivera plus tôt qu'on ne le prévoit. Pourtant pour le moment, les souffrances du peuple ivoirien continuent avec l'accroissement du nombre de victimes alors qu'une vision claire, en termes d'évolution de la situation, fait défaut », a dit Y J Choi, lors d'une conférence de presse à Abidjan.

« Dire la vérité et agir avec impartialité, voilà le credo de l'ONUCI qui demeure un défi de taille pour les protagonistes ivoiriens », a-t-il ajouté.

Selon le Haut commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR), 370.000 personnes ont fui Abidjan et l'ouest de la Côte d'Ivoire, et 76.956 réfugiés ont été enregistrés à ce jour au Libéria. Au total, le total 500.000 personnes sont déracinées. Le Haut commissariat des Nations Unies aux droits de l'homme (HCDH) a fait état jeudi d'au moins 392 personnes tuées dans le pays depuis la mi-décembre, dont au moins 27 ces derniers jours.

« L'ONUCI est devenue la seule mission de maintien de la paix qui continue de travailler malgré la demande de son départ par l'autorité militaire de facto du pays hôte », a souligné Y J Choi. Il a également annoncé que la capacité militaire de l'ONUCI sera renforcée de 2.000 casques bleus supplémentaires et de 3 hélicoptères armés.

« Sur ce point, je voudrais souligner que la Force (onusienne) sera utilisée comme une force de paix et de protection selon le principe de la neutralité et de l'impartialité », a insisté le Représentant spécial.

Il a condamné l'attaque la semaine dernière à Abobo par les forces spéciales du camp Gbagbo contre des femmes qui manifestaient de manière pacifique. « Je tiens à assurer que la mort de sept femmes innocentes ne saurait rester impunie », a-t-il prévenu en ajoutant que « le moment du jugement approche à grands pas » et que « l'ONUCI est en train de documenter les preuves des violations ».

De son côté, le Conseil de sécurité a salué vendredi la décision du Conseil de la paix et de la sécurité de l’Union africaine adoptée lors d’une réunion au niveau des chefs d’Etat et de gouvernement le 10 mars à Addis Abeba. Cette décision réaffirme les précédentes décisions de l’Union africaine sur la Côte d’Ivoire depuis le second tour de l’élection présidentielle le 28 novembre 2010, reconnaissant l’élection d’Alassane Ouattara comme Président de la Côte d’Ivoire.

Dans une déclaration à la presse lue par la Présidence du Conseil de sécurité, occupée en mars par la Chine, les membres du Conseil de sécurité de l’ONU prennent note « de la décision du Conseil de la paix et de la sécurité de nommer un Haut représentant pour la mise en œuvre d’une solution politique globale. »

Les membres du Conseil saluent également les efforts du panel de haut niveau et réitère leur soutien à l’Union africaine et la Communauté économique des Etats d’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) dans leur détermination à résoudre la crise en Côte d’Ivoire.

Ils appellent « toutes les parties à respecter immédiatement la décision du Conseil de la paix et de la sécurité de l’Union africaine » adoptée le 10 mars et réaffirment qu’ils sont « prêts à prendre imposer des mesures, y compris des sanctions ciblées, contre toutes les parties qui font obstacle aux tentatives d’une résolution rapide et pacifique de la crise, qui entravent le travail de l’ONUCI et d’autres acteurs internationaux en Côte d’Ivoire et commettent de sérieuses violations des droits de l’homme et du droit humanitaire. »

De son côté, le HCR a exprimé vendredi son inquiétude grandissante concernant la réponse « très limitée » à la crise en Côte d'Ivoire. « Alors que l'attention internationale se concentre depuis les dernières semaines sur les événements en Afrique du Nord, la tragédie actuelle en Afrique de l'Ouest passe largement inaperçue », a dit une porte-parole du HCR, Melissa Fleming.

« Actuellement nous observons une nouvelle dégradation de la sécurité à Abidjan. Après les affrontements qui se sont déroulés dans le quartier d'Abobo le 8 mars et dans le quartier de Cocody le 7 mars, nous avons été informés de 30 blessés et de trois morts. Il est dangereux de se déplacer dans la ville du fait des barrages routiers tenus par des hommes armés, ce qui affecte la population toute entière », a-t-elle expliqué.

Selon l'agence onusienne, la violence s'étend à l'ouest du pays et dans les régions du centre et du sud-est du pays.

« Les personnes forcées à fuir témoignent de tentatives pour les stopper dans leur déplacement et d'abus physiques. Des cas de viols ont également été signalés », a affirmé la porte-parole du HCR.

Le 14 janvier dernier, le HCR a lancé un appel de fonds d'un montant de 46 millions de dollars, principalement pour prendre en charge les réfugiés au Libéria voisin. A ce jour, l'agence a reçu cinq millions de dollars et des promesses de contributions s'élevant à 13 millions de dollars. Le HCR prépare un nouvel appel de fonds plus élevé d'ici la semaine prochaine.

Le Programme alimentaire mondial (PAM) a pour sa part annoncé vendredi son intention de renforcer ses opérations pour assister les déplacés et les réfugiés qui fuient les violences.

« Le nombre de réfugiés et de déplacés internes a atteint des proportions alarmantes et les violences incessantes contre les civils vont probablement empirer en Côte d'Ivoire », a estimé le Directeur régional du PAM pour l'Afrique de l'Ouest, Thomas Yanga.

« Nous nous efforçons de nourrir ceux qui ont faim, les personnes déplacées et les réfugiés, mais nos déplacements à l'intérieur de la Côte d'Ivoire sont entravés par l'insécurité et la violence. Par ailleurs, nous nous inquiétons de la charge que les réfugiés placent sur les communautés locales au Libéria », a-t-il ajouté.

En Côte d'Ivoire, le PAM planifie de distribuer une aide alimentaire pour 125.000 personnes sur une période de six mois. Le PAM prévoit d'assister 186.000 personnes au Libéria, en acheminant 25.000 tonnes de nourriture.

« Cette opération représente un grand défi dans une région reculée et difficilement accessible. Déplacer de la nourriture est également un défi et la saison de pluies qui débute en avril ne fait qu'aggraver les choses. Nous devons agir maintenant », a conclu Thomas Yanga.

Lors d'une conférence de presse à Genève, en Suisse, une porte-parole du Fonds des Nations Unies pour l'enfance (UNICEF), Marixie Mercado, a indiqué que les écoles primaires étaient fermées dans 10 des 27 districts que compte le pays. « Environ 800.000 enfants sont en train de perdre une année de scolarité », a-t-elle déploré.