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Éthiopie : l’OMS déplore l’impact du « blocus de facto » de l’aide humanitaire au Tigré

Le spécialiste de la nutrition et l'équipe d'intervention d'urgence de l'UNICEF procèdent à un dépistage de la malnutrition à Adikeh, à Wajirat, dans le sud du Tigré, en Éthiopie.
UNICEF/Christine Nesbitt
Le spécialiste de la nutrition et l'équipe d'intervention d'urgence de l'UNICEF procèdent à un dépistage de la malnutrition à Adikeh, à Wajirat, dans le sud du Tigré, en Éthiopie.

Éthiopie : l’OMS déplore l’impact du « blocus de facto » de l’aide humanitaire au Tigré

Santé

La région éthiopienne du Tigré, en proie aux combats depuis onze mois, est confrontée à « un blocus de facto de l’aide humanitaire », qui empêche d’acheminer l’aide aux personnes qui en ont désespérément besoin, a averti mercredi l’Organisation mondiale de la santé (OMS).

Depuis la fin du mois de juin, certains accès au Tigré passent par la une route traversant la région voisine d’Afar, où les mouvements sont fortement limités par les postes de contrôle et d’autres obstacles.

Le conflit a dévasté le système de santé du Tigré et aucun approvisionnement en médicaments n’a été autorisé dans la région depuis juillet - Dr Tedros, Directeur général de l’OMS

« Le conflit a dévasté le système de santé du Tigré et aucun approvisionnement en médicaments n’a été autorisé dans la région depuis juillet », a déclaré le Dr Tedros Adhanom Ghebreyesus, Directeur général de l’OMS, lors d’une conférence de presse virtuelle consacrée au coronavirus depuis Genève.

Il s’est inquiété de l’escalade de la crise dans le nord de l’Éthiopie. « En tant qu’Éthiopien du Tigré, cette crise me touche personnellement », a-t-il dit, précisant qu’il s’exprimait en tant que Directeur général de l’OMS.

Selon l’Agence sanitaire mondiale de l’ONU, le Tigré, dont la population est estimée à 6 millions d’habitants, est soumis à un « blocus de facto depuis près d’un an ». Seule une fraction des établissements sanitaires de la région reste opérationnelle en raison du manque de carburant et de fournitures.

Un enfant attend un dépistage nutrionnel à Wajirat, au sud du Tigré, en Éthiopie.
Photo : UNICEF/Christine Nesbitt
Un enfant attend un dépistage nutrionnel à Wajirat, au sud du Tigré, en Éthiopie.

Près de 200.000 enfants n’ont pas reçu les vaccins indispensables

Dans ces conditions, les personnes souffrant de maladies chroniques « meurent par manque de nourriture et de médicaments ». L’aide humanitaire est loin d’atteindre les niveaux nécessaires. Les services de base restent coupés, notamment l’électricité, les services bancaires et les télécommunications. L’extension du conflit à Amhara et Afar accroît encore les besoins et complique les efforts de réponse.

Face à un tel blocus, près de 200.000 enfants n’ont pas reçu les vaccins indispensables. « Lorsque les gens n’ont pas assez de nourriture, ils sont plus sensibles aux maladies mortelles, ainsi qu’à la menace de famine, et c’est ce que nous constatons actuellement dans le Tigré », a alerté le Dr Tedros.

Le nord de l’Éthiopie est le théâtre de violents combats depuis presque un an, lorsque le Premier ministre Abiy Ahmed a envoyé en novembre dernier l’armée au Tigré pour destituer les autorités régionales dissidentes, issues du Front de libération du peuple du Tigré (TPLF). Cette intervention répondait selon lui à des attaques contre des camps militaires fédéraux orchestrées par le TPLF.

De la nourriture est déchargée d'un camion sur un site de distribution du PAM à Zelazle, dans le nord du Tigré.
Photo : PAM/Claire Nevill
De la nourriture est déchargée d'un camion sur un site de distribution du PAM à Zelazle, dans le nord du Tigré.

L’OMS veut un accès sans entrave car la vie de millions de personnes est en jeu

Après 11 mois de conflit, la crise humanitaire dans le nord de l’Éthiopie s’aggrave de jour en jour. Selon l’OMS, jusqu’à 7 millions de personnes ont un besoin urgent de nourriture et d’autres aides dans les régions de Tigré, Amhara et Afar.

Au Tigré seulement, plus de 90 % de la population a besoin d’une aide alimentaire et, selon les dernières analyses des Nations Unies, 400.000 personnes vivent dans des conditions proches de la famine. « Les pénuries de carburant, la panne de communication persistante et d’autres difficultés rendent difficile l’évaluation de l’ampleur exacte des besoins », a ajouté le Dr Tedros.

Ce n’est pas étonnant dans ces conditions de « constater des taux de malnutrition aiguë, à des niveaux comparables à ceux que nous avons vus au début de la famine de 2011 en Somalie ».

Face à une telle urgence sanitaire et humanitaire, l’OMS entend continuer à faire tout ce qui est en son pouvoir pour apporter un soutien essentiel à la survie de toutes les personnes touchées par cette crise.

« L’OMS et ses partenaires demandent un accès sans entrave aux régions touchées », a plaidé le Dr Tedros, relevant que « la vie de millions de personnes est en jeu ».