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Un travailleur médical enregistre les patients dans un village du Yémen.

Les outils pour protéger les civils dans les conflits existent, mais pas la volonté de les appliquer (ONU)

OCHA/Giles Clarke
Un travailleur médical enregistre les patients dans un village du Yémen.

Les outils pour protéger les civils dans les conflits existent, mais pas la volonté de les appliquer (ONU)

Paix et sécurité

Le cadre juridique international et les outils sont tous là pour protéger les civils pris dans un conflit et il est désormais temps pour les gouvernements et les groupes armés de les appliquer, a déclaré mardi le chef de l'humanitaire de l'ONU au Conseil de sécurité.

Le Coordinateur des secours d'urgence, Mark Lowcock, a informé les ambassadeurs des recommandations du Secrétaire général visant à mettre davantage de civils à l'abri du danger, notant que malgré l'appel du chef de l'ONU à un cessez-le-feu mondial pendant la pandémie de Covid-19, les combats meurtriers se sont poursuivis et ont empiré dans certaines régions.

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L'année dernière, les conflits ont contribué à l'augmentation du nombre de personnes déplacées de force.

Le nombre de personnes en mesure de rentrer chez elles a diminué, tandis que l'insécurité, les sanctions, les mesures antiterroristes et les formalités administratives ont entravé les opérations humanitaires.

La pandémie a aussi rendu les choses plus difficiles, avec la suspension des vols, la fermeture des frontières, les mesures de quarantaine et les fermetures. 

M. Lowcock a mis en évidence cinq domaines clés dans lesquels des améliorations sont les plus nécessaires.

Conflits et faim

L'interaction entre les conflits et la faim a vu la menace de famine réapparaître dans le nord-est du Nigéria, dans certaines parties du Sahel, au Soudan du Sud et au Yémen, « créant une augmentation d'une année sur l'autre de 77 millions de personnes confrontées à des niveaux de crise ou pire d'insécurité alimentaire aiguë en raison d'un conflit », a déclaré M. Lowcock.

Au Nigéria, 110 agriculteurs sont morts dans une seule attaque contre une exploitation rizicole. En Éthiopie, des récoltes ont été détruites et pillées, tandis que les secours ont été bloqués suite à la crise politique dans la région du Tigré.

Il a appelé à une « action plus efficace » de la part des gouvernements pour résoudre le problème dans son ensemble, notant que les conflits perturbent les systèmes et les marchés alimentaires, tandis que la nourriture est détruite et que les prix augmentent - un cercle vicieux de la faim.

Guerre urbaine

Ensuite, Mark Lowcock a noté que 90% des personnes tuées par des armes explosives vivent dans des villes, contre seulement 20% lorsqu'elles sont déployées à la campagne.

« Ces armes infligent également un tribut dévastateur aux infrastructures civiles essentielles », a déclaré le chef de l'humanitaire. « Les parties combattantes doivent modifier leur choix d'armes et de tactiques », a-t-il ajouté.

Il a également souligné l'impact des conflits sur l'environnement, citant les frappes aériennes en Iraq qui ont détruit des champs par des feux de forêt, menaçant la biodiversité et les espèces menacées. Les déversements de pétrole en Syrie ont pollué l'eau de fermes, mettant en danger la santé et l'hygiène.

« L'origine de nombreux conflits se trouve en partie dans les questions environnementales, en particulier celles liées à l'eau », a-t-il déclaré, prédisant de nombreuses autres conséquences de ce phénomène dans les années à venir.

Le personnel médical, cible des tirs 

« Lorsque les soins médicaux s'arrêtent, des vies sont perdues », a déclaré M. Lowcock, évaluant sans détour l'impact des attaques contre le personnel et les installations de soins de santé.

Ces attaques dans 22 pays touchés par des conflits ont tué 182 travailleurs de la santé l'année dernière, et rien qu'au Myanmar, à la suite du coup d'État militaire, 109 incidents de violence contre le personnel de santé ont été documentés sur une période de deux mois, « accélérant l'effondrement du système de santé publique au moment où de nombreuses personnes en ont le plus besoin », a-t-il déclaré.

« Les conséquences sur les soins de santé sont catastrophiques, privant des millions de personnes de soins vitaux et réduisant gravement le traitement de maladies comme le choléra, la rougeole et la Covid », a-t-il ajouté.

Certains États ont pris des mesures concrètes pour protéger le personnel médical, notamment en veillant à ce que les règles d'engagement militaire respectent le droit humanitaire international.

Changer les comportements

M. Lowcock a également déclaré qu'au cours de ces dernières années il avait constaté une « détérioration significative » du respect du droit humanitaire de la part des belligérants.

« Il est possible de faire des progrès », a-t-il dit, appelant les États à améliorer la formation, à moderniser les politiques pour éviter les dommages causés aux civils, à adopter un meilleur suivi des victimes, à enquêter sur les incidents et à demander des comptes aux personnes coupables de violations.

Il a ajouté que le respect par les groupes armés non étatiques du droit international pourrait également s'améliorer, « bien qu'il soit important de reconnaître les défis très réels dans ce domaine, notamment en ce qui concerne les groupes qui réfutent le droit humanitaire international et le rôle des agences humanitaires, dans le cadre de leurs idéologies tordues ».

« Nous avons tous - les États membres et les agences humanitaires en particulier - besoin d'une approche plus efficace pour s'attaquer à ce problème », a-t-il fait valoir signalant que de nombreux efforts actuels sont « contre-productifs et exacerbent les dommages causés aux civils ».

L'obligation de rendre des comptes est cruciale, a-t-il conclu, déclarant au Conseil que « si les crimes de guerre restent impunis, les choses vont empirer ». « La reddition des comptes pour les violations doit être systématique et universelle », a dit M. Lowcock. « Ce qui n'est pas puni, est encouragé ».