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Ethiopie : Michelle Bachelet s’inquiète du renforcement militaire autour de Mekele, la capitale du Tigré

Des réfugié éthiopiens fuyant les violences dans la région du Tigré.
© UNHCR/Hazim Elhag
Des réfugié éthiopiens fuyant les violences dans la région du Tigré.

Ethiopie : Michelle Bachelet s’inquiète du renforcement militaire autour de Mekele, la capitale du Tigré

Droits de l'homme

La perspective d’un assaut militaire contre Mekele, la capitale de la province éthiopienne du Tigré qui compte 500.000 habitants, inquiète la communauté internationale et le Haut-Commissariat de l’ONU aux droits de l’homme.

« La menace d’hostilités majeures à Mekele met sérieusement en danger la vie des civils », a averti mardi dans un communiqué la Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme, Michelle Bachelet. La cheffe des droits de l’homme de l’ONU s’est inquiétée des informations faisant état « d’une forte accumulation de chars et d’artillerie autour de Mekele », après l’ultimatum de 72 heures lancé par le gouvernement éthiopien. 

Mme Bachelet a donc exhorté toutes les parties au conflit du Tigré à donner « des ordres clairs et sans ambiguïté à leurs forces » afin d’épargner les civils, conformément au droit international.

Concernant la lutte pour le contrôle de Mekele, « la rhétorique très agressive des deux côtés est dangereusement provocatrice et risque de mettre en grave danger des civils déjà vulnérables et effrayés », a-t-elle déclaré.

Dans une déclaration lue lors d’un point de presse à Genève par sa porte-parole Ravina Shamdasani, la Haut-Commissaire estime qu’une telle rhétorique suggère « de possibles violations du droit international » pendant la conduite des hostilités. Il s’agit notamment « des principes cardinaux de distinction, de proportionnalité et de précaution dans la conduite des hostilités qui visent à assurer la protection de la population civile ».

Eviter d’utiliser les civils comme des boucliers humains

« Nous avons vu un colonel éthiopien dire qu’il n’y aura pas de pitié. De l’autre côté, les dirigeants du Front de libération du peuple du Tigré (FLPT) ont déclaré qu’ils étaient prêts à mourir. C’est le genre de rhétorique qui est extrêmement préoccupant et peut conduire à de graves violations du droit humanitaire international », a alerté Mme Shamdasani.

En réponse aux allégations selon lesquelles le FLPT se stationne parmi les civils, Mme Bachelet a déclaré qu’en vertu du droit international, les parties à un conflit doivent prendre toutes les précautions possibles pour protéger la population civile sous leur contrôle. Il s’agit de les épargner « des effets des attaques, notamment en évitant, dans la mesure du possible, de placer des objectifs militaires dans des zones densément peuplées. En gros, s’assurer aussi que les différentes parties n’utilisent pas les civils comme des boucliers humains ».

Toutefois, si les forces du TPLF devaient se positionner parmi les civils, cela ne donnerait pas aux forces éthiopiennes « une carte blanche » pour répondre par l’utilisation de l’artillerie dans les zones densément peuplées, a mis en garde Mme Bachelet. Une façon de rappeler que « l’obligation de respecter le droit international n’est pas conditionnée par le comportement de l’autre partie ».

Des rapports suggèrent « des arrestations, détentions arbitraires et assassinats »

Plus largement, les belligérants sont tenus de respecter le droit international humanitaire et ne pas oublier que « la protection des civils est primordiale ». 

En particulier, Mme Bachelet a rappelé qu’il est interdit de traiter comme un objectif militaire des cibles situées dans une zone densément peuplée. Aux différentes parties, il leur est rappelé de ne pas viser des établissements publics tels que hôpitaux, les écoles et les quartiers résidentiels.

Par ailleurs, Mme Bachelet s’est alarmée du « black-out continu des communications dans cette région éthiopienne », la province du Tigré étant quasiment coupé du monde depuis le début du conflit. Une telle situation rend « très difficile la communication entre les civils et les membres de leur famille, ainsi que la surveillance par les Nations Unies de la situation des droits de l’homme et de la situation humanitaire ».

Or sur le terrain, des informations continuent à faire état « d’arrestations et de détentions arbitraires, et d’assassinats, ainsi que de discrimination et de stigmatisation ethniques des Tigrés.

« J’implore toutes les parties de répondre positivement aux tentatives de dialogue, et de garantir un accès sans entrave à l’aide humanitaire pour ceux qui en ont si désespérément besoin, ainsi que la protection et la sécurité des travailleurs humanitaires », a conclu la Haut-Commissaire Bachelet.

Le conflit dans la province éthiopienne du Tigré a déjà poussé plus de 40.000 Ethiopiens à se réfugier au Soudan voisin et provoqué d’importants déplacements internes à la région.