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La pandémie de Covid-19 affecte de manière disproportionnée les personnes victimes de discrimination raciale

Des manifestants rassemblés à Union Square à New York pour demander justice et pour protester contre le racisme aux États-Unis après la mort de George Floyd alors qu'il était aux mains de la police (archive)
ONU Info/Antonio Lafuente
Des manifestants rassemblés à Union Square à New York pour demander justice et pour protester contre le racisme aux États-Unis après la mort de George Floyd alors qu'il était aux mains de la police (archive)

La pandémie de Covid-19 affecte de manière disproportionnée les personnes victimes de discrimination raciale

Droits de l'homme

Alors que la Conférence de Durban sur le racisme fêtera son 20e anniversaire l’an prochain, la Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme, Michelle Bachelet, a dénoncé le fait que la pandémie de Covid-19 affecte particulièrement les personnes victimes de discrimination raciale.

« Les personnes qui se trouvaient déjà dans des situations vulnérables et défavorisées, dont les voix ont été réduites au silence et dont les intérêts sont rarement servis, sont les plus touchées par la Covid-19, du fait de ses impacts sanitaires ou socio-économiques », a déclaré Mme Bachelet dans un discours à l’ouverture, lundi à Genève, de la 18e session du Groupe intergouvernemental de travail sur la mise en oeuvre de la Déclaration et du Programme d’action de Durban.

« Parmi elles figurent les peuples autochtones, les personnes d’ascendance africaine et les personnes appartenant à des minorités nationales ou ethniques, religieuses et linguistiques, dont les droits ont été bafoués par la discrimination raciale systémique et l’héritage du racisme. Les groupes confrontés à la discrimination raciale sont souvent plus susceptibles de travailler dans le secteur informel, beaucoup vivent dans la pauvreté et risquent de perdre leur emploi sans aucune protection sociale », a-t-elle ajouté.

Une conférence historique

La Conférence de Durban contre le racisme, la discrimination raciale, la xénophobie et l'intolérance, s’est tenue en septembre 2001 à Durban, en Afrique du Sud. 

Selon Mme Bachelet, cette conférence a représenté un moment historique : « C’est là que les gouvernements ont reconnu que le racisme existe dans tous les pays et déclaré que la lutte contre ce dernier devrait être une priorité pour toutes les nations ».

« Pour la première fois, une conférence des Nations Unies a examiné les racines historiques profondes du racisme contemporain, a reconnu que l'esclavage et la traite des esclaves sont - et auraient toujours dû être - des crimes contre l'humanité, et a analysé l'héritage de certains des chapitres les plus effroyables de notre histoire humaine », a-t-elle dit. 

« La Conférence a reconnu que les Africains et les personnes d’ascendance africaine sont victimes de racisme et de discrimination raciale. Elle a reconnu que cela vaut également pour les Asiatiques et les personnes d'ascendance asiatique, les peuples autochtones, les métis, les migrants, les personnes déplacées, les victimes de la traite des êtres humains, les personnes appartenant à des minorités nationales ou ethniques, religieuses et linguistiques, y compris les Roms, les Tsiganes, les Sintis et les Travellers notamment », a ajouté la Haut-Commissaire.

Depuis le début de la pandémie de Covid-19, plus de 1,6 milliard d'enfants ont été touchés par la fermeture d'écoles, et les personnes confrontées à la discrimination raciale sont le plus souvent celles qui ont le moins de bonnes conditions pour étudier chez elles, moins de compétences numériques et un accès limité ou inexistant à l’Internet. Certaines risquent même de ne jamais retourner à l'école.

La pandémie a également révélé la vulnérabilité supplémentaire des migrants, des réfugiés, des demandeurs d'asile et des apatrides. En l’absence de protection de l’État et en raison de graves restrictions de leurs droits, nombre d’entre eux font désormais l’objet de harcèlement, d’arrestations arbitraires et d’expulsions massives.

« Nous avons constaté une augmentation des attitudes discriminatoires et xénophobes affectant les Asiatiques et les personnes d’ascendance asiatique, qui conduisent souvent à la violence. Même avant la pandémie, nous assistions à une augmentation mondiale des stéréotypes négatifs contre certains groupes », a dit Mme Bachelet.

« Les migrants et autres groupes confrontés à la discrimination raciale sont souvent les boucs émissaires lorsqu'il y a des problèmes, notamment en ce qui concerne les pénuries de logements et d'emplois », a-t-elle ajouté.

Impact disproportionné sur les femmes

Selon la cheffe des droits de l’homme des Nations Unies, la pandémie a également aggravé la situation de vulnérabilité des communautés autochtones, souvent situées dans des régions reculées et ayant un accès limité aux soins de santé et à l’assistance médicale.

Et cette crise a un impact disproportionné sur les femmes, en particulier sur les femmes confrontées à des formes croisées de discrimination en raison du sexe, de la race et de l'appartenance ethnique. Elles sont soumises à une charge excessive de travail non rémunéré, à une pauvreté accrue, à l'insécurité de l'emploi et à un accès limité aux services publics.

Les femmes sont également en première ligne de la réponse à la crise sanitaire et sont plus exposées aux infections.

Mme Bachelet a noté que malgré des preuves accablantes, il y a un manque de données sur la façon dont la pandémie de Covid-19 affecte les victimes de discrimination raciale.

Les données sur les taux d'infection ne sont ni disponibles ni enregistrées dans de nombreux pays. « Cela signifie que les disparités et les violations des droits humains auxquelles les victimes sont confrontées sont souvent sous-estimées - voire niées », a-t-elle dénoncé.