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Pétrole contre nourriture : un des responsables sanctionnés réintégré avec blâme écrit

Pétrole contre nourriture : un des responsables sanctionnés réintégré avec blâme écrit

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Joseph Stephanides, un des deux responsables du programme pétrole contre nourriture renvoyés pour faute grave au vu des conclusions du rapport Volcker, a été réintégré par le Secrétaire général, qui a imposé un blâme écrit, malgré les recommandations des instances internes de l'ONU qui proposaient sa réintégration pure et simple.

« La sanction qui a été imposée à M. Stephanides a été réexaminée à la lumière de l'ensemble des circonstances de cette affaire et du principe de proportionnalité. À la suite de ce réexamen, il a été décidé d'annuler la décision de congédier sommairement M. Stephanides, et de lui verser son salaire et ses émoluments depuis la date de son renvoi sommaire jusqu'à celle de sa retraite », indique le Secrétaire général dans un message transmis hier par son porte-parole.

Cette réintégration, « au vu des circonstances », s'accompagne d' « un blâme écrit à M. Stephanides conformément à la disposition 110.3(a)(i) du Règlement du personnel », affirme le message, qui précise que la « lettre envoyée aujourd'hui à M. Stephanides servira de blâme écrit ».

Joseph Stephanides, ancien directeur adjoint de la Division des affaires du Conseil de sécurité, avait été informé mardi 31 mai qu'il était mis fin à son contrat pour faute grave, conformément aux règles du personnel de l'Organisation (voir notre dépêche du 1er juin 2005).

Cette décision avait été prise sur la base des conclusions de la Commission d'enquête indépendante (CEI), dirigée par l'ancien chef de la Réserve fédérale américaine, Paul Volcker, mise en place par le Secrétaire général pour enquêter sur le Programme pétrole contre nourriture, qui avait estimé dans son rapport remis en février que le Comité directeur de l'ONU « avait compromis et contrecarré la concurrence dans le processus d'appel d'offres en écartant le moins offrant », avec « la participation active » de M. Stephanides.

Selon le rapport de la CEI, Joseph Stephanides aurait violé les règles des marchés publics afin de permettre à la société « Lloyd's Register Inspection, Ltd », de bénéficier d'un contrat de plusieurs millions de dollars dans le cadre du programme « pétrole contre nourriture », estimant que les règles n'avaient pas été respectées en la prévenant des prix offerts par les autres sociétés afin qu'elle révise ses prix à la baisse.

M. Stephanides avait reconnu que les règles n'avaient pas été techniquement respectées, mais avait allégué avoir agi non pas par profit personnel mais afin d'assurer à l'Organisation le prix le plus bas possible.

Après la publication de ce rapport, ce dernier avait été suspendu immédiatement et un processus administratif avait été enclenché pour lui permettre de répondre aux accusations.

Dans son message transmis hier, le Secrétaire général explique que sa décision s'écarte des recommandations du Comité paritaire de discipline de l'ONU, chargé d'examiner le dossier de M. Stephanides.

« Alors que le Comité paritaire de discipline s'est indûment concentré sur le fait de savoir si oui ou non les prix des offres étaient restés confidentiels après le lancement des appels d'offre du 30 juillet 1996, les accusations concernant M. Stephanides ne se limitaient pas à cette question », relève le Secrétaire général dans sa lettre.

« M. Stephanides a enfreint les règles d'achat qui l'obligeaient à agir avec une 'impartialité absolue' à l'égard de l'ensemble des soumissionnaires et à ne pas divulguer à l'extérieur des Nations Unies toute information concernant l'acceptation ou au rejet probables d'une offre d'achat (Règles d'achat 9.0002 et 9.0016) », insiste Kofi Annan.

« Il a enfreint ces règles en contactant la Mission permanente du Royaume-Uni, en l'informant que l'offre d'un concurrent allait être acceptée et en indiquant à la Mission de combien l'offre de Lloyds' devait être réduite », poursuit-il.

« Dans son rapport final, la Commission d'enquête indépendante avait également confirmé ses conclusions initiales à l'égard des actes de M. Stephanides. Le fait que les appels d'offres étaient lancées le 30 juillet 1996 n'enlève rien au fait qu'il a fait preuve de 'partialité' envers Lloyds et a divulgué des informations sur 'l'acceptation ou le rejet probables d'une offre d'achat' ».

« Par conséquent, les actes de M. Stephanides ont enfreint les règles d'achat et le Secrétaire général ne partage pas l'avis du Comité paritaire de discipline selon lequel la décision de sanctionner la conduite de M. Stephanides comportait de sérieux vices de fond et de forme », conclut Kofi Annan.