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Kosovo : encore un long chemin avant la normalisation, selon Kofi Annan

Kosovo : encore un long chemin avant la normalisation, selon Kofi Annan

carte du Kosovo
A côté du bilan humain, 19 morts et un peu moins de 1 000 blessés, de l'évaluation des dommages matériels, logements et des lieux de cultes détruits ou endommagés en grand nombre, les conséquences du débordement de violence au Kosovo touchent tous les secteurs et ont déjà entraîné la révision du plan d'application des « Normes pour le Kosovo », indique le dernier rapport du Secrétaire général.

Première conséquence, le plan de mise en œuvre des « Normes pour le Kosovo » - la série de critères que la province doit satisfaire avant que ne s'engagent les négociations sur son statut - a été révisé « pour tenir compte de ces incidents et de leurs répercussions. » Y ont été notamment intégrées six mesures prioritaires à prendre rapidement par les Institutions provisoires d'administration autonome pour favoriser les retours des minorités.

« La violence a eu une incidence extrêmement défavorable sur la libre circulation des membres des communautés minoritaires du Kosovo, en particulier les Serbes du Kosovo », est-il par ailleurs souligné dans le rapport. « Une majorité d'entre eux refuse de s'en remettre aux patrouilles effectuées par le Service de police du Kosovo et un grand nombre refuse désormais de voyager sans une escorte de la KFOR (la Force internationale du Kosovo). »

Il est également indiqué que le Commissaire temporaire chargé des médias enquête sur le rôle joué qu'ils ont joué durant les événements et s'efforce de déterminer si les organes locaux de radiodiffusion ont violé le Code de conduite de la profession en émettant des programmes qui prônent le crime ou les activités criminelles, constituent une incitation à la haine ou font courir des risques imminents et graves à certaines personnes.

Une étude préliminaire fait état de reportages provocateurs et tendancieux, notamment pendant les deux premiers jours de violence. Les médias électroniques ont servi à véhiculer des récits journalistiques inexacts, provocateurs, partiaux et à sensation, est-il noté, en particulier lors des premiers articles consacrés à la noyade des garçons albanais du Kosovo.

« Les quotidiens alignés sur les partis politiques du Kosovo ont, comme à l'accoutumée, utilisé les nouvelles d'actualité pour répandre des idées antiserbes. La presse écrite indépendante du Kosovo a rendu compte des événements de manière plus responsable », mentionne également le rapport.

De nombreux supports de médias électroniques appartenant à des Serbes du Kosovo ont interrompu leurs programmes habituels, en partie parce qu'ils avaient peur de faire l'objet d'actes de violence, et ont rediffusé des programmes de nouvelles, souvent inexacts et provocateurs, provenant d'organes d'information de Belgrade.

Tant les médias des Albanais du Kosovo que ceux des Serbes du Kosovo ont largement exprimé les vues de leur propre communauté, et il n'y a pratiquement eu aucune coopération entre les journalistes travaillant pour les médias locaux de part et d'autre du fossé ethnique, est-il indiqué.

« Dans l'ensemble, la réaction de la société civile a été irresponsable, ethniquement tendancieuse et incohérente sur le plan interne », poursuit le document. « En général, la société civile albanaise du Kosovo n'a pas adopté une position indépendante et responsable devant la vague de violence ethnique. Sur le plan local, quasiment aucune des ONG albanaises du Kosovo n'a pris de mesures concrètes et rapides afin de prévenir la violence. »

Le rapport signale également que les effets des événements de mars, en affaiblissent l'intérêt et la confiance des investisseurs, ont nui à l'économie et qu'il faudra redoubler d'efforts pour améliorer l'image projetée par le Kosovo.

« Si l'on ajoute à cela le taux élevé de chômage alors que le taux de croissance devrait se maintenir à 4 % environ pour 2004, les perspectives économiques à court et à moyen terme demeurent très préoccupantes », note-t-il.

« Extrêmement préoccupante » également la situation en matière de sécurité, même si elle s'améliore régulièrement depuis la mi-mars, est-il également indiqué.

« Les événements ont montré que la détermination de la communauté internationale à assurer le progrès du Kosovo sur la voie de la coexistence et de la réconciliation entre les communautés ne suffit pas en elle-même », fait observer le Secrétaire général dans ses conclusions. Il estime qu'au-delà des mesures immédiates et des mesures correctives, un effort collectif pour éliminer les causes de la violence sera nécessaire.

« Des mesures concrètes ont été prises et des déclarations constructives ont été faites pendant et immédiatement après la flambée de violence, et je remercie les dirigeants de Pristina et de Belgrade d'avoir agi de la sorte », note-t-il à ce propos.

« La violence ne sera pas récompensée, affirme Kofi Annan qui « appelle les dirigeants politiques du Kosovo à prendre des mesures efficaces pour veiller à ce que les responsables soient traduits en justice et à ce que les fonctionnaires et les hommes politiques qui ont agi de façon irresponsable pendant la crise soient sanctionnés. »

Selon le Secrétaire général, « la flambée de violence a montré clairement que le Kosovo avait encore un long chemin à parcourir avant de satisfaire aux normes recommandées par le Conseil de sécurité le 12 décembre 2003. »

Exhortant « toutes les communautés à s'associer aux efforts menés en ce sens », il estime qu'il faudra adapter encore le plan de mise en œuvre et « en réévaluer les priorités en insistant davantage sur la sécurité et les questions relatives à l'état de droit, aux droits et à la protection des minorités, aux retours, au transfert de compétences du niveau central vers les organes locaux et au développement économique. »