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Au Conseil de sécurité, les leaders du Kosovo appelés à s'attaquer aux causes des récentes violences ethniques

Au Conseil de sécurité, les leaders du Kosovo appelés à s'attaquer aux causes des récentes violences ethniques

Intervention de Jean-Marie Guéhenno au Conseil
Moins d'un mois après les journées de violence qu'a connues le Kosovo, un haut responsable de l'ONU a affirmé aujourd'hui devant le Conseil de sécurité qu'il s'agissait d'attaques concertées lancées par des « extrémistes kosovars albanais » et a affirmé qu'il allait de la responsabilité des leaders kosovars de s'attaquer aux causes profondes de cette violence à motivation ethnique.

Les résultats de la violence qui, pendant deux jours, a submergé la province, parlent d'eux-mêmes, a indiqué aujourd'hui le Secrétaire général adjoint aux opérations de maintien de la paix, Jean-Marie Guéhenno, lors de son exposé au Conseil de sécurité.

Dix-neuf personnes tuées, 950 blessées, 65 policiers internationaux, 58 membres de la police du Kosovo, 61 éléments de la KFOR, la Force internationale pour le Kosovo également blessés, 730 maisons appartenant pour la plupart aux minorités du Kosovo, brûlées ou endommagées, plus de 150 véhicules dont une centaine de véhicules de la Mission d'administration intérimaire des Nations Unies au Kosovo (MINUK) détruits ou sérieusement endommagés… a énuméré le responsable de l'ONU.

« Les attaques menées par des extrémistes kosovars albanais contre les communautés kosovares serbes, rom et askali étaient organisées, de large envergure et ciblées », a indiqué M. Guéhenno. Elles se sont produites dans les grandes villes comme dans des petits villages et en particulier ceux qui avaient fait l'objet de programmes de retours comme c'était le cas à Vucitrn dans la région méridionale de Mitrovica, entièrement brûlé alors qu'un processus de retours y avait été officiellement lancé. Les 300 individus revenus en deux ans sont désormais des personnes déplacées.

M. Guéhenno a souligné la réponse au début ambivalente des dirigeants du Kosovo. A l'exception notable du Premier Ministre Rexhepi « qui doit être personnellement salué pour ses prises de position publiques, ses actions et ses appels à cesser la violence », le Gouvernement du Kosovo a commencé par publier une déclaration se focalisant sur la noyade de trois enfants kosovars albanais, la présentant comme provoquée par les Serbes ce qui n'a jamais été établi et ne l'est toujours pas, a indiqué le Secrétaire général adjoint.

« Ce n'est qu'après la forte réaction et la pression de la communauté internationale que les Institutions provisoires d'administration autonome en sont venues à réaliser que cette tentative de justification de la violence était inacceptable », a-t-il ajouté.

M. Guéhenno a mis en avant le rôle constructif joué par Belgrade qui s'est efforcé de canaliser la violence, de prévenir toute réaction extrémiste et s'est engagé à reconstruire les mosquées brûlées.

Il a aussi décrit les efforts déployés par Harri Holkeri, le Représentant spécial du Secrétaire général pour le Kosovo, à la fois sur le front politique et opérationnel, indiquant notamment que les enquêtes lancées par la MINUK avaient conduit à l'arrestation de 183 personnes, que 42 affaires étaient instruites par des procureurs internationaux et 90 par le système judiciaire local.

« Il est clair que, étant donné l'échelle des violences, des capacités d'enquête supplémentaires seront nécessaires », a-t-il ajouté, demandant aux Etats membres contactés de faire droit à la demande de la MINUK de 100 policiers supplémentaires.

Mais pour M. Guéhenno, le véritable enjeu désormais réside dans l'analyse par les dirigeants et la population du Kosovo des causes profondes de cette violence à motivation ethnique et de prendre les mesures nécessaires pour les corriger. « Les leaders du Kosovo ont une responsabilité à cet égard et seront jugés sur leur façon de l'exercer », a déclaré le chef des opérations de maintien de la paix de l'ONU.

« Le message qu'on leur demande d'adresser aux représentants du Kosovo et à sa population est simple et clair : il n'existe pas d'avenir paisible et prospère pour le Kosovo sans respect de la diversité de sa population. La violence ne sera pas récompensée », a-t-il affirmé.