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Crise de la dette : menace du défaut de paiement pour certains pays en développement, prévient la CNUCED

Les familles sri-lankaises en milieu rural sont particulièrement vulnérables à la pire crise que connaît le pays depuis son indépendance en 1948.
© WFP/Josh Estey
Les familles sri-lankaises en milieu rural sont particulièrement vulnérables à la pire crise que connaît le pays depuis son indépendance en 1948.

Crise de la dette : menace du défaut de paiement pour certains pays en développement, prévient la CNUCED

Développement économique

Alors que la crise du coût de la vie menace la planète, des pays à faible revenu vont éprouver de plus en plus de difficultés à assurer le service de leurs dettes, a alerté lundi la cheffe d’une agence de l’ONU.

Malgré les mesures d’allègement de grande ampleur entraînées par la crise de la Covid-19, de nombreux pays en développement courent un risque élevé de surendettement, voire sont déjà surendettés.

« La question aujourd’hui n’est pas de savoir si suffisamment de pays cesseront de payer leurs créanciers à court terme, la question aujourd’hui est que presque tous les pays en développement ont été laissés face à un compromis impossible dans un contexte marqué par une pandémie, une instabilité géopolitique et une détresse climatique », a déclaré Rebeca Grynspan, Secrétaire générale de la CNUCED à l’ouverture d’une conférence sur la dette.

Les niveaux de la dette publique en hausse dans plus de 100 pays

Cette treizième Conférence de gestion de la dette de la Conférence des Nations Unies pour le commerce et le développement (CNUCED) se tient à un « moment crucial » pour le monde et surtout pour les pays en développement. La rencontre de Genève a lieu dans un contexte de « crises en cascade, d’inégalités en cascade et d’instabilité chronique ».

« La pandémie de Covid, le changement climatique et la crise du coût de la vie augmentent tous la pauvreté et la faim à une vitesse alarmante », a ajouté Mme Grynspan, relevant que c’est la géopolitique, et non l’économie, qui est désormais aux commandes de la mondialisation.

Selon la CNUCED, les niveaux de dette publique, en pourcentage du PIB ont augmenté dans plus de 100 pays en développement entre 2019 et 2020. Si l’on exclut la Chine, cette augmentation équivaut à près de 2.000 milliards de dollars.

« Ce sont des ressources qui devront être remboursées par les gouvernements des pays en développement à leurs créanciers dans les années à venir en raison de deux chocs systémiques, car nous parlons entre 2019, 2021 », a affirmé la cheffe de la Cnuced.

Les conséquences de la forte appréciation du dollar

Etant donné que cette situation ne se limite pas à un seul pays, des « chocs systémiques ont touché de nombreux pays en même temps, car il y a eu des chocs mondiaux ». Dans ces conditions, les exigences du service de la dette, l’augmentation du fardeau de la dette combinée à la hausse des coûts d’emprunt exercent une pression énorme sur les budgets publics dans le monde entier.

Or cette situation est d’autant plus inquiétante que cette menace d’une crise d’endettement intervient dans un contexte d’un dollar américain toujours plus fort. Selon le Fonds monétaire international (FMI), 70% de l’ensemble des dettes des pays émergents et 85% de celles des pays à faible revenu sont en devises étrangères.

Au moins 88 pays ont déjà connu cette une dépréciation par rapport au dollar américain à la fin du mois de novembre. Dans 31 de ces pays, la dépréciation a été supérieure à 10%.

« Dans la plupart des pays d’Afrique, une telle dépréciation augmente les besoins en matière de service de la dette de l’équivalent des dépenses de santé publique sur le continent, de l’équivalent des dépenses de santé publique sur le continent », a-t-elle fait valoir

Au moins 310 milliards de dollars pour le service de leur dette publique des pays du Sud

Selon la CNUCED, les pays en développement devraient avoir besoin de 310 milliards de dollars pour assurer le service de leur dette publique extérieure en 2022, soit l’équivalent de 9,2% de l’encours de la dette publique extérieure à la fin de 2020. Les pays qui semblent vulnérables à un arrêt brutal en raison de la combinaison d’importantes pressions de refinancement et d’un ratio service de la dette/exportations élevé sont le Pakistan, la Mongolie, le Sri Lanka, l’Égypte et l’Angola. Trois d’entre eux, le Pakistan, l’Égypte et l’Angola, ont déjà des programmes à long terme du FMI en place.

Plus largement, les pays en développement, à l’exception de la Chine, ont un stock de dette publique de 11.500 milliards de dollars à la fin de 2021. Les pays qui sont actuellement classés par le FMI comme ayant une dette insoutenable ou en difficulté représentent environ 13% de ce montant.

Toutefois, ce surendettement est largement « contenu » dans plusieurs pays très vulnérables, dont la part de la dette dans le total est relativement faible jusqu’à présent. « La plupart de ces pays sont des pays à faible revenu, bien que nous sachions que des pays à revenu intermédiaire souffrent également de surendettement », a précisé Mme Grynspan.

Dans tous les cas, la cheffe de la CNUCED estime que cette « crise systémique de la dette » est devenue « insoutenable » parce qu’elle est devenue trop onéreuse et a compromis le développement durable de la planète.