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Yémen : l’ONU en quête de 4,3 milliards de dollars pour aider plus de 17 millions de personnes

Des fillettes dans un camp de déplacés à Marib, au Yémen.
© WFP/Annabel Symington
Des fillettes dans un camp de déplacés à Marib, au Yémen.

Yémen : l’ONU en quête de 4,3 milliards de dollars pour aider plus de 17 millions de personnes

Aide humanitaire

Alors que les besoins humanitaires s’accroissent et que la guerre en Ukraine fait flamber les cours des denrées alimentaires dont celui du blé, les Nations Unies ont exhorté la communauté internationale à ne pas oublier le sort de millions d’affamés au Yémen et appelé les donateurs à débloquer « près de 4,3 milliards de dollars » pour venir en aide à plus de 17 millions de personnes dans ce pays.

L’appel de l’ONU est d’autant plus urgent que les fonds dont disposent les organisations humanitaires sont en train de se tarir.

Cette « crise de financement » met des millions de personnes au Yémen en danger, a déclaré mercredi le Secrétaire général de l'ONU, António Guterres, à l’ouverture d’une conférence virtuelle de bailleurs de fonds.

Pour aggraver les choses, le manque de financement a contraint l'ONU et ses partenaires à « réduire ou fermer » environ les deux tiers des programmes vitaux, a déclaré M. Guterres.

Et pourtant, de nouvelles évaluations montrent une faim catastrophique et des besoins croissants.

« Près des trois quarts de la population dépendront de l’aide humanitaire en 2022. Et c’est ce chiffre et de telles proportions qui nous font dire souvent que la situation humanitaire du Yémen est parmi les pires au monde », a déclaré lors d’une conférence de presse à Genève, le Secrétaire général adjoint de l’ONU pour les affaires humanitaires, Martin Griffiths.

Après plus de sept ans de guerre, plus de 23 millions de personnes au Yémen sont confrontées à la faim, aux maladies ou à d’autres dangers mettant leurs vies en péril, soit une augmentation de 13% par rapport à 2021, rappellent les Nations unies. Les services de base et l’économie du pays s’effondrent.

Plus de 7 millions de personnes menacées par la famine

Selon l’ONU, quelque 161.000 personnes seront bientôt confrontées à une « insécurité alimentaire catastrophique ». Il s’agit donc d’un « signe avant-coureur de ce qui pourrait arriver à 7,1 millions de personnes qui ne se trouvent qu’à une marche de ce stade ultime d’une crise humanitaire ».

Si la guerre civile au Yémen continue d’être le principal moteur de la faim, la crise risque de s’aggraver en raison du conflit en Ukraine. D’autant que l’incertitude liée au conflit ukrainien a déjà porté les marchés mondiaux des céréales au plus haut.

Selon Martin Griffiths, 90% de la nourriture du Yémen est importée, un tiers de ses importations de blé provient de Russie et d’Ukraine. « Les prix des denrées alimentaires ont déjà grimpé en flèche et nous nous attendons à des restrictions en termes d’approvisionnement », a-t-il dit. Et ce alors même que les prix des denrées alimentaires ont déjà presque doublé au Yémen l’an dernier.

Dans ces conditions, « mettre fin à la guerre en Ukraine maintenant est de la plus haute importance », a insisté M. Griffiths, car si elle se prolonge, elle a des « répercussions » sur la nouvelle récolte, la nouvelle saison de plantation.

Des rations alimentaires réduites de moitié pour 8 millions de personnes

Dans ce contexte, assurer l’acheminement des importations commerciales est aussi un défi supplémentaire pour les agences humanitaires.

« Nous devons permettre à ces navires d’entrer et de sortir de ces ports, en tenant compte de l’embargo sur les armes, mais sans les arrêter lorsqu’ils transportent de la nourriture, du carburant ou d’autres produits nécessaires au bien-être de la population », a fait valoir le chef de  l’humanitaire de l’ONU.

Sur le terrain, les agences sont obligées de réduire ou d’arrêter la distribution d’aide alimentaire, ainsi que la mise à disposition des services de santé et d’autres aides vitales. Au début de cette année, 8 millions de personnes ont vu leurs rations alimentaires réduites de moitié, et d’autres réductions sont en cours.

Des coupes qui sont liées aux « pénuries de financement alarmantes et sans précédent » qui ont contraint les deux tiers des principaux programmes de l’ONU à réduire ou à fermer ces derniers mois par manque d’argent. Près de 4,3 milliards de dollars sont donc nécessaires en 2022 pour atteindre 17,2 millions de personnes et inverser cette spirale préoccupante.

« Nous n’avons jamais envisagé par le passé de priver de nourriture des millions de personnes affamées, ni de supprimer des services vitaux pour les nourrissons ou les femmes enceintes. Je crains que si le déficit de financement n’est pas comblé, ce sera tout simplement une condamnation à mort pour les gens », a insisté M. Griffiths.

L’occasion pour la communauté internationale de montrer qu’elle n’abandonne pas le Yémen

« Nous devons veiller à ce que nos contributions parviennent le plus rapidement possible à ceux qui en ont besoin », a fait observer pour sa part, Ignazio Cassis, Président de la Suisse.

En 2021, les donateurs ont généreusement fourni 2,35 milliards de dollars, ce qui a permis de maintenir le Yémen à flot et les gens en vie.

En moyenne, 11,6 millions de personnes ont reçu une aide vitale chaque mois. Cela comprend 15 millions de consultations médicales, le traitement de la malnutrition aiguë pour 2 millions de nourrissons et de femmes allaitantes, ou une aide alimentaire pour près de 11 millions de personnes en moyenne chaque mois.

Pour l’ONU, la conférence de bailleurs de fonds est « l’occasion pour la communauté internationale de montrer qu’elle n’abandonne pas le Yémen, même après toutes ces années et avec l’émergence de nouvelles crises ». « Et c’est un message très important », a conclu le Secrétaire général adjoint de l’ONU pour les affaires humanitaires.

A la fin de la conférence, il a annoncé que 36 donateurs ont promis près de 1,3 milliard de dollars pour la réponse humanitaire au Yémen. « Nous vous remercions pour votre générosité et votre soutien continu à des millions de personnes dans le besoin », a-t-il dit.