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Des anciens de la Radio de l’ONU partagent leurs réflexions sur le passé, le présent et l'avenir de la radio

Un jeune journaliste de Tombouctou présente le journal du soir sur la radio Jamana à Koulikoro, au Mali.
© UNICEF/Seyba Keïta
Un jeune journaliste de Tombouctou présente le journal du soir sur la radio Jamana à Koulikoro, au Mali.

Des anciens de la Radio de l’ONU partagent leurs réflexions sur le passé, le présent et l'avenir de la radio

Culture et éducation

La Journée mondiale de la radio, qui a été célébrée dimanche, s’est concentrée cette année sur le thème de « la radio et la confiance », à un moment où les informations fausses et trompeuses se répandent et déforment des faits vitaux en matière de santé publique et attisent le discours de haine.

Pour marquer l'occasion, ONU Info a interviewé deux anciens collègues qui ont récemment pris leur retraite. Elena Vapnitchnaia était cheffe de notre unité de langue russe, et Jérôme Longué, l'ancien chef de notre unité de langue française. Tous deux ont servi pendant de nombreuses années à la Radio de l'ONU et ensuite à ONU Info.

En cette Journée mondiale de la radio, nous leur avons demandé de partager quelques souvenirs pertinents de leur travail à la radio et leurs points de vue sur les perspectives et le pouvoir de la radio en général, pour aider à contrer la pandémie de désinformation, à l'ère de l’Internet.

Depuis la première émission officielle de la Radio des Nations Unies le 13 février 1946, des programmes ont été diffusés dans les cinq langues officielles initiales de l'Organisation : anglais, français, chinois, russe et espagnol - suivis plus tard par l'arabe.

En 1950, la Radio des Nations Unies diffusait en 33 langues et en 1980, les missions de maintien de la paix des Nations Unies ont commencé à lancer leurs propres stations de radio.

Nos réseaux linguistiques ont proposé un programme quotidien de 15 minutes d'actualités, d'interviews et de reportages, des différentes équipes travaillant au siège de l'ONU à New York.

Michael Redgrave, acteur britannique dans les studios de la Radio de l'ONU, à New York (octobre 1956).
Photo ONU/Albert Fox
Michael Redgrave, acteur britannique dans les studios de la Radio de l'ONU, à New York (octobre 1956).

Changements spectaculaires

Les deux premières décennies de ce siècle ont vu des changements spectaculaires dans le travail de la Radio de l’ONU : les bobines et les cassettes ont cédé la place aux médias numériques, et la diffusion audio a été enrichie et améliorée par des fonctionnalités multimédias, liant texte, audio, photo, vidéo et d'autres graphiques basés sur le Web grâce à l'explosion des médias sociaux.

Les services de la Radio de l'ONU ont été transformés en organes d'information multidimensionnels qui gèrent leurs propres sites Web.

Aujourd'hui, ils créent du contenu numérique et racontent des histoires multimédias et diffusent ces produits, émissions - et de plus en plus de podcasts - via de multiples plateformes, y compris les médias sociaux, non seulement dans les six langues officielles de l'ONU, mais aussi en portugais, en kiswahili et en hindi.

Les services linguistiques de la Radio des Nations Unies ont toujours travaillé côte à côte, dans une salle de rédaction, au sein du bâtiment du Secrétariat des Nations Unies à New York. « Dans le bureau, nos voisins d'un côté étaient des journalistes du service russe, de l'autre nous avions nos collègues portugais. On les entendait toujours travailler, et au fil du temps on apprenait quelques mots dans ces langues : par exemple, « Dobroe utro » (« Bonjour ! » en russe) ou « Obrigado » (« Merci ! » en portugais), se souvient Jérôme Longué.

Le commentateur de la Radio de l'ONU, Georges Day (à gauche), Eleanor Roosevelt, Présidente de la Commission de l'ONU sur les droits de l'homme, et le professeur René Cassin lors d'un discussion radiophonique.
Photo : ONU
Le commentateur de la Radio de l'ONU, Georges Day (à gauche), Eleanor Roosevelt, Présidente de la Commission de l'ONU sur les droits de l'homme, et le professeur René Cassin lors d'un discussion radiophonique.

Multiculturalisme et cosmopolitisme

Elena et Jérôme pensent qu'un tel multiculturalisme et un tel cosmopolitisme sont utiles lorsque vous êtes dans le secteur de l'information.

« Des professionnels ayant une vaste expérience du journalisme, une vision large, ouverte sur le monde et toujours prêts à s'entraider et à partager les informations nécessaires, ont toujours travaillé à la Radio de l’ONU. Je suis heureuse d'avoir pu travailler dans une telle équipe », souligne Elena Vapnitchnaia. « Par exemple, avec une femme du Kirghizistan qui est venue à une conférence à l'occasion de la Journée mondiale de la Trisomie 21. Elle était militante et mère d'un enfant atteint de ce syndrome, et elle avait également adopté une fille atteinte du même syndrome ».

La Radio des Nations Unies et d'autres producteurs d'informations ont également souvent accompagné le Secrétaire général lors de voyages officiels et ont été témoins d'événements mondiaux majeurs.

« Nous avons participé à des réunions avec le colonel Kadhafi, avec les Présidents du Tchad et du Soudan, au processus de réinsertion des enfants soldats en Sierra Leone, et avons également couvert la signature d’accords de paix, comme celui entre l'Ethiopie et l'Erythrée », se souvient Jérôme Longué.
Et, bien sûr, chaque année, l'ouverture de la nouvelle session de l'Assemblée générale amène à New York les chefs d'État et de gouvernement des pays membres de l'ONU.

Pour le personnel d'ONU Info, la semaine de haut niveau du débat général offre une riche moisson de contenus d'actualité et des interviews difficiles à obtenir en temps normal.

Un média qui reste populaire

Jérôme Longué, d'ONU Info, avec Anne-Cécile Robert (gauche) lors de la présentation d'un livre sur l'ONU.
Photo : ONU/Evan Schneider
Jérôme Longué, d'ONU Info, avec Anne-Cécile Robert (gauche) lors de la présentation d'un livre sur l'ONU.

De nombreux experts, s'inspirant du vieux hit des années 1980, "La vidéo a tué la star de la radio", ont faussement prédit la fin de la radio. Cela s'est avéré faux car des millions de personnes dans le monde continuent de dépendre fortement et principalement de la radio comme principale source d'information et d'éducation - que ce soit via des stations de radio, des plateformes Internet ou des podcasts sur leur smartphone.

La radio s'est transformée en son avatar numérique, et elle a non seulement conservé des auditeurs fidèles, mais a également attiré un public plus nouveau et plus jeune. « L'idée que la radio va bientôt mourir a longtemps été évoquée - depuis le moment où la télévision est apparue, mais je pense que la radio n'a pas l'intention de mourir », dit Jérôme Longué.

« De plus, la radio reste le moyen de communication le plus populaire. Il est disponible lorsque les autres moyens de communication ne fonctionnent pas. Un exemple frappant de cela est le tremblement de terre en Haïti en 2010 », ajoute-t-il.

Lors du tremblement de terre de 2015 au Népal, BBC Radio et d'autres stations traditionnelles fonctionnaient bien, jouant un rôle essentiel pour les communautés éloignées coupées de la capitale, bien avant que d'autres types de médias puissent être accessibles.

Il ajoute en outre que la radio est le meilleur moyen de faire entendre la voix des minorités et des communautés, car elle ne nécessite pas d’investissement dans un équipement coûteux ni la création d'un flux multimédia distinct en ligne.

Objectivité, neutralité, impartialité, exactitude et fiabilité

Elena Vapnitchnaia, d'ONU Info, avec Matthew Nimetz, Envoyé personnel du Secrétaire général pour les pourparlers entre la Grèce et l'ancienne République yougoslave de Macédoine, lors d'un entretien.
ONU Info - Capture d'écran
Elena Vapnitchnaia, d'ONU Info, avec Matthew Nimetz, Envoyé personnel du Secrétaire général pour les pourparlers entre la Grèce et l'ancienne République yougoslave de Macédoine, lors d'un entretien.

Elena pense que la radio, contrairement à la télévision ou à d'autres médias, crée un lien plus intime entre l'auditeur et les voix qui sortent à la radio. « Contrairement à la télévision, on n'écoute normalement pas la radio et les podcasts avec toute la famille ou en compagnie d'amis. La radio est généralement allumée dans une voiture, ou pendant une promenade, ou lors d'exercices ». C'est peut-être pourquoi la radio continue d'être si influente, crédible, durable et toujours accessible.

L'importance de la radio en tant que source d'information fiable a beaucoup augmenté ces dernières années, avec l'ère des informations fausses et trompeuses qui se propagent rapidement, à la fois sur les réseaux sociaux et via d'autres médias.

« Nous devons tous lutter contre ce fléau. Et, bien sûr, grâce aux interviews audio et aux retransmissions en direct, la radio, en tant que canal de communication, apporte des informations plus fiables et indiscutables », estime Jérôme Longué.

Elena ajoute qu’ONU Info suit des normes journalistiques très strictes : objectivité, neutralité, impartialité, exactitude et fiabilité.

Ces principes, ainsi que la position de neutralité et d'équité de l'ONU, ainsi que l'égalité, ont joué un rôle important dans la couverture des événements récents, en particulier depuis le début de la pandémie, lorsque des informations fausses et non vérifiées ont inondé les réseaux sociaux et d'autres plateformes d'information.

« Pendant la pandémie de Covid-19, nous avons fait beaucoup de nos productions sur la base des recommandations de l'OMS : ce n'étaient pas seulement des chiffres et des statistiques, mais aussi, par exemple, des recommandations pour les parents qui étaient confinés avec leurs enfants sur la façon de rester en forme pendant la quarantaine ; ainsi que la diffusion d'informations sur les premiers vaccins - en particulier des informations rassurantes sur la manière dont ils étaient développés et testés de manière approfondie », dit-elle.

« Nous espérons vraiment que ces publications et productions aident à lutter contre la désinformation et sont utiles à nos auditeurs », déclare l'ancienne cheffe du service d'information russe. « Alors, continuez à écouter les productions et émissions audio d'ONU Info, via les ondes, les plateformes en ligne et les podcasts ! »