L'actualité mondiale Un regard humain
Des frappes aériennes sur la ville de Rafah, dans le sud de la bande de Gaza, ont causé d'importants dégâts.

Les Gazaouis luttent pour leur survie, le nord de l’enclave bouclé

© UNICEF/Eyad El Baba
Des frappes aériennes sur la ville de Rafah, dans le sud de la bande de Gaza, ont causé d'importants dégâts.

Les Gazaouis luttent pour leur survie, le nord de l’enclave bouclé

Paix et sécurité

Des centaines de milliers de Palestiniens restés dans le nord de Gaza continuent d'endurer des difficultés sans précédent après avoir été coupés du reste du territoire par les opérations militaires israéliennes, tandis qu'un convoi médical envoyé par l'ONU et ses partenaires a été la cible de tirs dans la ville de Gaza, ont déclaré mercredi des responsables humanitaires de l'organisation.

Ces événements interviennent alors que les Ministres des affaires étrangères du G7 se sont joints mercredi aux appels internationaux à des pauses humanitaires dans les combats afin de protéger les civils, d'aider à acheminer de l'aide et de soutenir la libération des plus de 240 otages retenus captifs à Gaza par le Hamas depuis le 7 octobre.

Aucune boulangerie ne fonctionne dans le nord de l'enclave palestinienne en raison d'un manque de carburant, d'eau et de farine, et aucune nourriture ou bouteille d'eau n'y a été distribuée depuis une semaine, selon le Bureau de coordination des affaires humanitaires de l'ONU, l'OCHA

En raison du manque de fournitures médicales, les hôpitaux du nord pratiquent désormais des opérations chirurgicales sans anesthésie, a déclaré l’Organisation mondiale de la santé (OMS). L'OCHA a aussi rapporté qu'un convoi de cinq camions de l'OMS et de l'agence des Nations Unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche Orient (UNRWA), escorté par deux véhicules du Comité international de la Croix-Rouge (CICR), a essuyé des tirs alors qu'il se rendait mardi pour livrer des fournitures médicales vitales aux hôpitaux Shifa et Al Quds de la ville de Gaza. Deux camions ont été endommagés et un chauffeur a été blessé, mais le convoi a finalement atteint l'hôpital Shifa et a effectué sa livraison, a indiqué l'OCHA. 

Une famille voyage du nord au sud de Gaza au début du conflit.
© UNICEF
Une famille voyage du nord au sud de Gaza au début du conflit.

Le nord de Gaza sous ordre d'évacuation

Pendant ce temps, les bombardements israéliens se sont poursuivis dans toute la bande de Gaza, tandis que les groupes armés palestiniens continuaient de lancer des projectiles en direction d'Israël. Les troupes israéliennes seraient à l'intérieur de la ville de Gaza à la poursuite des militants du Hamas responsables des attaques meurtrières du 7 octobre dans le sud d'Israël.

L'OCHA a déclaré que l'armée israélienne avait réitéré ses ordres d'évacuation aux habitants du nord et mardi, pour le quatrième jour consécutif, avait ouvert un « couloir » le long d'une artère principale, donnant aux résidents une fenêtre de quatre heures pour se déplacer vers le sud. 

Les observateurs de l'ONU estiment que jusqu'à 15.000 personnes pourraient avoir emprunté cette route. Le Bureau de la coordination des affaires humanitaires a souligné que « la plupart, y compris des enfants, des personnes âgées et des personnes handicapées, sont arrivés à pied avec un minimum d'effets personnels ». 

Tweet URL

Mardi, l'armée israélienne a également renouvelé ses ordres d'évacuation de l'hôpital Rantisi dans la ville de Gaza, le seul établissement pédiatrique du nord de Gaza, « affirmant que des groupes armés utilisaient ses locaux et ses environs », a indiqué l'OCHA. 

Selon les autorités sanitaires de Gaza, une telle évacuation mettrait en danger la vie de dizaines d'enfants qui sont sous assistance respiratoire, sous dialyse rénale, ou sous respirateur.

Mise en garde d'un expert sur la destruction de logements

Jusqu'à un tiers de tous les bâtiments dans le nord de Gaza auraient été détruits ou endommagés, et un expert indépendant des droits de l'homme nommé par le Conseil des droits de l’homme a averti mercredi que les bombardements systématiques ou généralisés de logements, de biens civils et d'infrastructures sont strictement interdits par le droit international humanitaire, le droit pénal et le droit des droits de l'homme.

Balakrishnan Rajagopal, le Rapporteur spécial des Nations unies sur le droit à un logement convenable, a déclaré que mener les hostilités « en sachant qu'elles détruiront et endommageront systématiquement les habitations et les infrastructures civiles, rendant une ville entière – comme la ville de Gaza – inhabitable pour les civils est un crime de guerre ».

Dans le sud de Gaza, il reste difficile de trouver de la nourriture et de l'eau, a indiqué le Bureau de la coordination des affaires humanitaires. Onze boulangeries ont été touchées et détruites depuis le 7 octobre et « la seule usine en activité à Gaza » est à l'arrêt en raison d'un manque d'électricité et de carburant. 

L'OCHA a déclaré que le pain est fourni aux boulangeries « par intermittence » et que les gens font la queue pendant de longues heures devant les boulangeries en activité, alors qu’ils risquent d'être touchés par des frappes aériennes.

L'eau en provenance d'Égypte sous forme de bouteilles et de jerricans « ne répond qu'à 4% des besoins en eau des habitants par jour », a averti l'OCHA. 

L'aide est « une goutte d'eau dans l'océan »

Mardi, 81 camions transportant de la nourriture, des médicaments, des fournitures médicales, des bouteilles d'eau et des produits d'hygiène sont entrés dans la bande de Gaza en provenance d'Égypte par le point de passage de Rafah. Au total, 650 camions d'aide sont entrés dans la bande de Gaza depuis la reprise des livraisons le 21 octobre. 

Le Bureau de la coordination des affaires humanitaires a rappelé qu'avant le début des hostilités, une moyenne de 500 camions entraient à Gaza chaque jour ouvrable. L'OMS a qualifié la quantité d'aide qu'elle a pu fournir jusqu'à présent de « goutte d'eau dans l'océan » par rapport aux besoins immenses.

L'ONU a appelé à plusieurs reprises à un meilleur accès de l'aide humanitaire à l'enclave. Jeudi, le chef des secours de l'ONU, Martin Griffiths, représentera le Secrétaire général António Guterres lors d'une conférence internationale sur l'aide humanitaire aux civils de Gaza organisée par le Président français Emmanuel Macron à Paris.

Le chef des droits de l'homme de l'ONU, Volker Türk, s'adresse aux médias au point de passage de Rafah vers Gaza.
© OHCHR
Le chef des droits de l'homme de l'ONU, Volker Türk, s'adresse aux médias au point de passage de Rafah vers Gaza.

Le chef des droits de l'homme de l'ONU à Rafah

Pour sa part, le Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l'homme, Volker Türk, s'est rendu mercredi au poste-frontière de Rafah, du côté égyptien, où il a réitéré son appel à un cessez-le-feu humanitaire entre Israël et le Hamas. 

Il a qualifié le poste-frontière de « porte d'un véritable cauchemar », alors que les habitants de Gaza « étouffent, sous les bombardements persistants, pleurent leurs familles, et luttent pour l’eau, la nourriture, l’électricité et le carburant ».

Le chef des droits de l’homme, qui est le dernier haut responsable de l’ONU à se rendre dans la région, a également rencontré des victimes du conflit à l'hôpital El Arish, installé à l'aéroport du Nord Sinaï, en Egypte

M. Türk a déclaré que les atrocités perpétrées par les groupes armés palestiniens et la détention continue d'otages étaient odieuses et constituaient des crimes de guerre.

« La punition collective infligée par Israël aux civils palestiniens est également un crime de guerre, tout comme l'évacuation forcée illégale de civils », a-t-il ajouté.

M. Türk a lancé un appel urgent aux parties pour qu'elles acceptent un cessez-le-feu dès maintenant afin que trois « impératifs cruciaux en matière de droits de l'homme » puissent être satisfaits. Il a appelé à des livraisons d’aide suffisantes à Gaza, à la libération de tous les otages et à permettre « à l’espace politique de mettre enfin en œuvre une fin durable à l’occupation, basée sur les droits des Palestiniens et des Israéliens à l’autodétermination ».