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Chine : le Conseil des droits de l’homme de l’ONU rejette la demande d'un débat sur la situation au Xinjiang

La salle du Conseil des droits de l'homme des Nations Unies (photo d'archives).
Photo ONU/Jean-Marc Ferré
La salle du Conseil des droits de l'homme des Nations Unies (photo d'archives).

Chine : le Conseil des droits de l’homme de l’ONU rejette la demande d'un débat sur la situation au Xinjiang

Droits de l'homme

Le Conseil des droits de l’homme des Nations Unies a rejeté, jeudi, une motion présentée par les pays occidentaux visant à organiser un débat sur les violations présumées des droits de l’homme dans la région chinoise du Xinjiang, après qu’un rapport du Haut-Commissariat de l’ONU aux droits de l’homme a conclu à la possibilité de crimes contre l’humanité.

Le Conseil des droits de l’homme a choisi jeudi de ne pas organiser un débat sur la situation des droits de l’homme dans la région autonome ouïghoure du Xinjiang (Chine), en février ou mars prochain, qui aurait constitué une première contre une grande puissance. Une dizaine de pays, dont les États-Unis et le Royaume-Uni, la France, le Canada, l’Australie et plusieurs pays européens avaient demandé au Conseil d’organiser un débat sur la région ouïghoure, dans le nord-ouest de la Chine.

Mais le projet de décision a été rejeté lors d’un vote, avec 19 voix contre, 17 pour et 11 abstentions.

Outre la Chine, les autres pays ayant voté contre sont : la Bolivie, le Cameroun, la Côte d’Ivoire, Cuba, l’Erythrée, le Gabon, l’Indonésie, le Kazakhstan, la Mauritanie, le Népal, la Namibie, le Pakistan, le Qatar, le Sénégal, le Soudan, les Emirats arabes unis, l’Ouzbékistan et le Venezuela. De leur côté, des pays comme l’Ukraine, l’Inde et le Brésil se sont abstenus.

Deuxième résolution rejetée par le Conseil

C’est la deuxième fois en 16 ans d’histoire du Conseil qu’une motion est rejetée. L’autre rejet remonte au 7 octobre 2021 quand l’organe onusien basé à Genève avait rejeté une résolution visant à renouveler le mandat du Groupe d’éminents experts sur le Yémen par un vote par appel nominal.

Cette réunion sur les violations des droits humains dans la province chinoise devait constituer un suivi du rapport du Haut-Commissariat aux droits de l’homme. Celui-ci avait dénoncé de possibles crimes contre l’humanité contre les Ouïghours et d’autres minorités musulmanes dans ce pays d’Asie.

La résolution rejetée entendait prendre note « note avec intérêt de l’évaluation par le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme des préoccupations relatives aux droits de l’homme dans la région autonome ouïghoure du Xinjiang (Chine), publiée le 31 août 2022 ». Le texte aurait ainsi « décider de tenir un débat sur la situation des droits de l’homme dans la région autonome ouïghoure du Xinjiang à sa cinquante-deuxième session, au titre du point 2 de l’ordre du jour ».

L'ancienne Haute-Commissaire aux droits de l'homme Michelle Bachelet lors de sa visite en Chine, à Ürümqi, dans la région autonome ouïgoure du Xinjiang, en mai 2022.
OHCHR
L'ancienne Haute-Commissaire aux droits de l'homme Michelle Bachelet lors de sa visite en Chine, à Ürümqi, dans la région autonome ouïgoure du Xinjiang, en mai 2022.

Un rapport de l’ONU sur le Xinjiang évoque des crimes contre l’humanité

Le Haut-Commissariat de l’ONU aux droits de l’homme (HCDH) a publié mercredi 31 août un rapport sur la région du Xinjiang, dans le nord-ouest de la Chine. Il évoquait de possibles « crimes contre l’humanité ». Il a fait état de « preuves crédibles » de tortures et de violences sexuelles sur la minorité ouïghoure et appelle à une action internationale.

« L’ampleur de la détention arbitraire et discriminatoire de membres des Ouïghours et d’autres groupes à prédominance musulmane [...] peut constituer des crimes internationaux, en particulier des crimes contre l’humanité », indique le rapport d’un peu moins de cinquante pages dans ses conclusions.

Dans ce document, l’ONU a appelé la communauté internationale à agir d’urgence face aux accusations contre Beijing. « Les allégations faisant état de pratiques récurrentes de la torture ou des mauvais traitements, notamment de traitements médicaux forcés et de mauvaises conditions de détention, sont crédibles, tout comme le sont les allégations individuelles de violences sexuelles et fondées sur le genre », a écrit le HCDH dans le rapport.

Beijing a continué de rejeter les accusations du rapport sur le Xinjiang

Dans ces conditions, des pays occidentaux comme la France estime qu’il est donc « non seulement légitime, mais aussi nécessaire, au vu du mandat donné par la résolution 62-151 de l’Assemblée générale de l’ONU que ce Conseil examine ces violations ». « Il s’agit seulement d’organiser un débat en mars prochain », a déclaré Jérôme Bonnafont, Ambassadeur, Représentant permanent de la France auprès de l’Office des Nations Unies à Genève.

Pour Paris, un tel débat aurait eu pour objet de discuter, de débattre, d’échanger sur « un sujet qui frappe l’opinion publique et sur lequel de nombreuses organisations de la société civile nous alertent depuis des années ». « Il importe d’apporter des réponses aux préoccupations légitimes qu’elles expriment », a insisté l’Ambassadeur français.

Mais ces dernières semaines, Beijing a continué de rejeter ces accusations. La Chine a insisté sur le fait qu’elle gère des centres de formation professionnelle dans la région pour lutter contre l’extrémisme.

L’Ambassadeur de Chine avait prévenu peu avant le vote que la motion créerait un « raccourci dangereux » pour l’examen des dossiers des autres pays en matière de droits de l’homme. « Aujourd’hui, la Chine est visée. Demain, tout autre pays en développement sera visé », a conclu l’Ambassadeur Chen Xu.