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Ukraine, Myanmar, Xinjiang, climat… l’essentiel de la conférence de presse de fin de mandat de Mme Bachelet

La Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l'homme, Michelle Bachelet.
Photo ONU/Antoine Tardy
La Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l'homme, Michelle Bachelet.

Ukraine, Myanmar, Xinjiang, climat… l’essentiel de la conférence de presse de fin de mandat de Mme Bachelet

Droits de l'homme

La Cheffe des droits de l’homme des Nations Unies, Michelle Bachelet, a appelé, jeudi, le Président russe Vladimir Poutine à mettre fin aux attaques armées contre l’Ukraine et a indiqué que la centrale nucléaire de Zaporijjia devait être démilitarisée.

« Je demande au Président russe de mettre fin à l’attaque armée contre l’Ukraine », a déclaré Mme Bachelet lors d’une conférence de presse à Genève à l’occasion de la fin de son mandat de Haut-Commissaire de l’ONU aux droits de l’homme.

« Six mois après, les combats se poursuivent, avec des risques presque impensables pour les civils et l’environnement, les hostilités étant menées à proximité de la centrale nucléaire de Zaporijjia », a-t-elle ajouté, soulignant que la « centrale de Zaporijjia doit être immédiatement démilitarisée ».

Pour l’ancienne Présidente chilienne, les deux parties doivent respecter, à tout moment et en toutes circonstances, le droit international des droits humains et le droit international humanitaire. « La communauté internationale doit insister sur l’obligation de rendre des comptes », a insisté Mme Bachelet relevant que « certaines des nombreuses violations graves documentées peuvent s’apparenter à des crimes de guerre ».

Répression contre les manifestants et attaques contre les civils au Myanmar

Par ailleurs, les services de la Haute-Commissaire Michelle Bachelet continuent également à « documenter quotidiennement » des violations flagrantes des droits de l’homme et des violations graves du droit international humanitaire au Myanmar. Il s’agit notamment de « la répression contre les manifestants et les attaques contre les civils qui peuvent s’apparenter à des crimes contre l’humanité et des crimes de guerre ».

Alors que cela fait cinq ans aujourd’hui le début de l’exode de 700.000 réfugiés rohingyas au Bangladesh, la Cheffe des droits de l’homme fait état d’une « catastrophe des droits de l’homme au Myanmar ». Celle-ci continue de s’aggraver, avec une armée (la Tatmadaw) maintenant des opérations militaires dans les régions de Kayah et Kayin, dans le sud-est, dans l’État Chin, dans le nord-ouest, et dans les régions de Sagaing et Magway, dans le cœur des Bamar.

« L’utilisation de la puissance aérienne et de l’artillerie contre les villages et les zones résidentielles s’est intensifiée », a dénoncé Mme Bachelet. Selon l’ONU, les récents pics de violence dans l’État de Rakhine semblent également indiquer que la dernière région relativement stable du pays pourrait ne pas éviter une résurgence du conflit armé.

Les communautés rohingyas ont souvent été prises en étau entre les combattants de la Tatmadaw et de l’armée d’Arakan ou ont été directement visées par des opérations. Plus de 14 millions d’entre eux ont besoin d’aide humanitaire.

Mme Bachelet espère publier le rapport sur le Xinjiang avant la fin de son mandat

S’agissant de la situation des droits de l’homme en Chine, la Haute-Commissaire Bachelet a déclaré jeudi qu’elle avait toujours pour objectif de publier un rapport très attendu sur le Xinjiang, avant la fin de son mandat de quatre ans, le 31 août. « Nous faisons tout notre possible », a-t-elle ajouté lors d’un point de presse à Genève, en réponse à une question d’un journaliste sur le calendrier de publication de l’enquête.

« Nous avons reçu des indications substantielles » du gouvernement chinois en réponse au projet de rapport, a-t-elle fait remarquer. Le document doit être adapté mais il soulignera les violations des droits humains au Xinjiang, selon Mme Bachelet.

Elle a indiqué que son bureau avait reçu « un nombre énorme » de lettres, depuis un an déjà, demandant la publication du rapport sur le Xinjiang. Au cours des derniers mois, elle a reçu une lettre d’une quarantaine de pays, dont la Chine, « demandant la non-publication » du rapport. « Nous sommes toujours sous pression ... de toutes parts », a insisté Mme Bachelet.

Des « crises prolongées, souvent oubliées » au Yémen, en Syrie, au Sahel et en Haïti

Plus globalement, la Cheffe des droits de l’homme de l’ONU a demandé à la communauté internationale de ne pas oublier certaines « crises prolongées, souvent oubliées ». Il s’agit notamment de la situation au Yémen, en Syrie, au Sahel et en Haïti.

« Gouverner est difficile - je le sais car j’ai été deux fois Présidente de mon pays, le Chili », a-t-elle dit, ajoutant qu’il y a « toujours de nombreuses demandes pressantes et des problèmes à résoudre ».

« Mais gouverner, c’est établir des priorités - et les droits de l’homme doivent toujours être une priorité », a souligné Mme Bachelet, relevant que dans de nombreuses situations, il y a un manque de volonté politique pour prendre les mesures nécessaires afin de s’attaquer de front à une situation. Or selon elle, la volonté politique est essentielle - et quand il y a une volonté, il y a un moyen.

L’urgence du combat climatique

Mais au soir du bilan, Mme Bachelet accorde un satisfecit au soutien qu’elle a apporté au combat pour la préservation du climat. D’autant que les événements climatiques extrêmes de ces derniers mois ont une fois de plus mis en évidence, avec force, le besoin existentiel d’une action urgente pour protéger notre planète pour les générations actuelles et futures.

« Répondre à ce besoin est le plus grand défi de notre époque en matière de droits de l’homme. Dans ces conditions, « tous les États ont l’obligation d’y travailler ensemble, et de joindre le geste à la parole, pour mettre pleinement en œuvre le droit à un environnement sain ».

Pour l’ONU, la réponse à la triple crise planétaire de la pollution, du changement climatique et de la perte de biodiversité doit être centrée sur les droits de l’homme. Il s’agit notamment de s’attaquer « à l’impact disproportionné des atteintes à l’environnement surtout pour les plus défavorisés ».

Polarisation au sein des États et le multilatéralisme sous pression

Plus globalement, le monde a fondamentalement changé au cours de son mandat de quatre ans. Outre les effets toujours croissants du changement climatique et de l’impact de la pandémie de Covid-19, la planète fait face aux chocs de la crise alimentaire, énergétique et financière résultant de la guerre contre l’Ukraine.

Or selon Mme Bachelet, cette incertitude intervient alors que la polarisation au sein des États et entre eux a atteint « des niveaux extraordinaires, mettant le multilatéralisme sous pression ». C’est dans ce contexte que d’importants mouvements de protestation ont eu lieu dans toutes les régions du monde pour demander la fin du racisme structurel, le respect des droits économiques et sociaux, et contre la corruption, les déficits de gouvernance et les abus de pouvoir.

Dans de nombreux cas, ces manifestations ont été souvent accompagnées « de violences, de menaces et d’attaques contre les manifestants et les défenseurs des droits de l’homme, et parfois contre des journalistes ».