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Europe : l’ONU fustige les violences et les refoulements illégaux de réfugiés

Des enfants réfugiés à Idomeni, en Grèce, en mars 2016. Photo UNICEF/Tomislav Georgiev
Des enfants réfugiés à Idomeni, en Grèce, en mars 2016. Photo UNICEF/Tomislav Georgiev

Europe : l’ONU fustige les violences et les refoulements illégaux de réfugiés

Migrants et réfugiés

L’ONU s’est préoccupée, lundi 21 février, de la « normalisation de pratiques déplorables » dont des refoulements de réfugiés aux frontières européennes, dénonçant une hausse des violences et violations des droits humains qui ont parfois entraîné des morts.

« Ce qui se produit aux frontières de l’Europe est inacceptable légalement et moralement et doit cesser », a écrit dans un communiqué, le Haut-Commissaire de l’ONU pour les réfugiés, Filippo Grandi, craignant « que ces pratiques déplorables ne se normalisent et ne deviennent la règle ». Pour l’ONU de telles pratiques, renforcent « le discours néfaste et inutile de la forteresse Europe ».

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Or « la réalité est que la majorité des réfugiés dans le monde sont accueillis par des pays en développement disposant de beaucoup moins de ressources, souvent limitrophes de pays d’origine en crise », a dit M. Grandi, fustigeant « un nombre croissant d’incidents de violence et d’abus à l’encontre des réfugiés et des migrants à diverses frontières européennes, dont plusieurs ont entraîné des pertes de vie tragiques ».

La Grèce pointée du doigt pour des refoulements de réfugiés

Selon l’agence onusienne, la violence, les mauvais traitements et les refoulements continuent d’être régulièrement signalés à de multiples points d’entrée aux frontières terrestres et maritimes de l’Union européenne (UE). Des incidents qui se poursuivent malgré les appels répétés des agences des Nations Unies dont le HCR, des organisations intergouvernementales et des ONG pour mettre fin à ces pratiques.

A ce sujet, le HCR s’est alarmé des « rapports récurrents et cohérents » provenant des frontières terrestres et maritimes de la Grèce avec la Turquie. L’agence onusienne y a enregistré près de 540 incidents de refoulement opérés par la Grèce depuis le début de 2020. Des incidents similaires inquiétants sont également signalés en Europe centrale et du Sud-Est aux frontières avec les États membres de l’UE.

Bien que de nombreux abus ne soient pas signalés, le HCR a interrogé des milliers de personnes qui ont été refoulés dans différents points frontaliers européens. Elles ont fait état « d’un schéma inquiétant de menaces, d’intimidation, de violence et d’humiliation ».

« En mer, des personnes disent avoir été laissées à la dérive dans des radeaux de sauvetage ou parfois même forcées à entrer directement dans l’eau, ce qui témoigne d’un manque cruel de considération pour la vie humaine », a détaillé M. Grandi.

Des femmes et des enfants migrants dans un centre de réception à Moria, sur l'île de Lesbos, en Grèce.
Photo UNICEF/Pavlos Avagianos
Des femmes et des enfants migrants dans un centre de réception à Moria, sur l'île de Lesbos, en Grèce.

A quelques exceptions près, les États européens n’ont pas enquêté

Au moins trois personnes seraient mortes dans de tels incidents depuis septembre 2021 en mer Égée, dont une en janvier. Des pratiques tout aussi horribles sont fréquemment signalées aux frontières terrestres, avec des témoignages concordants de personnes déshabillées et brutalement repoussées dans des conditions climatiques difficiles, ajoute le HCR.

Face à de tels abus, l’agence onusienne demande à l’Europe « de mettre en place des mécanismes de contrôle nationaux véritablement indépendants afin de garantir le signalement des incidents et la réalisation d’enquêtes indépendantes ».

En attendant, à quelques exceptions près, les États européens n’ont pas enquêté sur ces rapports, malgré des preuves croissantes et crédibles. Au lieu de cela, des murs et des clôtures sont érigés à diverses frontières.

Outre le refus d’entrée aux frontières, le HCR indique avoir également reçu des informations selon lesquelles certains réfugiés auraient même été renvoyés dans leur pays d’origine, malgré les risques qu’ils y encouraient. Ce qui pourrait être en « contradiction avec le principe juridique international de non-refoulement », regrette l’agence onusienne, relevant que « les personnes fuyant la guerre et les persécutions ont peu d’options ».

Le soutien financier ne peut remplacer les obligations des États sur la protection des réfugiés

Pourtant, il est peu probable que les murs et les clôtures aient un effet dissuasif significatif. Ils ne feront qu’accroître les souffrances des personnes ayant besoin d’une protection internationale, en particulier les femmes et les enfants, et les inciteront à envisager d’autres itinéraires, souvent plus dangereux, ce qui entraînera probablement d’autres décès.

Une façon pour le HCR de souligner qu’il est possible de « gérer les frontières et de répondre aux préoccupations en matière de sécurité, tout en mettant en œuvre des politiques équitables, humaines et efficaces à l’égard des demandeurs d’asile », notamment le respect de leur droit à la vie et le droit d’asile. D’autant que la façon dont l’Europe choisit de protéger les demandeurs d’asile et les réfugiés est importante et fait jurisprudence non seulement dans la région mais aussi dans le monde entier.

« Les pays européens apportent depuis longtemps des contributions importantes qui aident à protéger les réfugiés et à soutenir les pays d’accueil », a conclu M. Grandi, relevant que « le soutien financier et le renforcement des capacités à l’étranger ne peuvent remplacer les responsabilités et les obligations des États en matière d’accueil et de protection des réfugiés sur leur propre territoire ».