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Libye : la cheffe des droits de l'homme préoccupée par le sort des civils pris au piège 

Immeuble détruit en Libye.
Crédit photo : OCHA/Giles Clarke
Immeuble détruit en Libye.

Libye : la cheffe des droits de l'homme préoccupée par le sort des civils pris au piège 

Droits de l'homme

La Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l'homme, Michelle Bachelet, s'est dite préoccupée mardi par le fait que des milliers de civils restent bloqués dans les zones touchées par le conflit à Tripoli. Elle a jugé urgent de créer des couloirs humanitaires sûrs pour permettre aux civils pris au piège de quitter la capitale libyenne et s'est jointe aux appels à un cessez-le-feu immédiat et à la reprise des pourparlers.

« L'escalade des attaques dans les zones résidentielles, y compris l'utilisation d'artillerie, de roquettes et de frappes aériennes, est profondément préoccupante. Des milliers d'enfants, de femmes et d'hommes sont en danger », a déclaré la cheffe du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme (HCDH).

« Je rappelle à toutes les parties au conflit que l'emploi d'armes explosives ayant des effets indiscriminés, dans des zones densément peuplées, constitue une violation du droit international humanitaire et des droits de l'homme », a ajouté Michelle Bachelet.

Selon, le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR), les affrontements entre les forces de Khalifa Haftar et celles du Gouvernement d'union nationale, observés au sud Tripoli, ont provoqué le déplacement de 42.000 personnes. Le HCR fait état de 278 personnes mortes et de 1.332 blessées dans les combats depuis le début des hostilités, le 4 avril.

« Les bombardements aveugles et les tirs nourris sont la cause de destructions et de déplacements. Et le nombre de personnes touchées augmente », a déclaré lors d’un point de presse ce mardi à Genève, Charlie Yaxley, porte-parole du HCR.

Les agences onusiennes estiment que des milliers de personnes sont piégées dans la banlieue sud de Tripoli, y compris Aziziya, Swani et Ain Zara. L'augmentation des raids aériens et des bombardements massifs dans les quartiers résidentiels pourrait faire d'autres victimes civiles, détruire l'infrastructure civile et poursuivre les déplacements, a averti Michelle Bachelet, appelant toutes les parties à respecter pleinement le droit international humanitaire et des droits de l'homme.

Des milliers d'enfants, de femmes et d'hommes sont en danger – Michelle Bachelet, Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme

La Haut-Commissaire aux droits de l’homme s'est également déclarée gravement préoccupée par la sécurité d'environ 3.350 migrants et réfugiés, toujours détenus dans des centres de détention près des zones de conflit. Au moins 12 migrants ont été blessés par des combattants le 23 avril près de Qasr ben Gasheer, avant d'être transférés dans un autre centre de détention. On signale de graves pénuries de nourriture et d'eau, ainsi que l'abandon temporaire de certains gardes.

Les migrants se voient refuser l'accès aux abris pour les personnes déplacées et seraient contraints de travailler pour les milices qui contrôlent leurs centres de détention.

« Les migrants doivent être libérés d'urgence des centres de détention et avoir accès à la même protection humanitaire que tous les civils, y compris l'accès à des abris collectifs ou à d'autres lieux sûrs », a dit Mme Bachelet.

La Haut-Commissaire a souligné que la Libye n'était pas un port de retour sûr. Elle a appelé l'Union européenne et ses États membres à mettre en œuvre rapidement et collectivement une réponse cohérente, fondée sur les droits de l'homme, aux migrations maritimes en provenance de Libye.

Ancienne salle des Présidents du parlement à Tripoli, en Libye.
Photo OCHA/Giles Clarke
Ancienne salle des Présidents du parlement à Tripoli, en Libye.

Aide humanitaire accrue

Malgré l’instabilité qui persiste à Tripoli et ses environs, le HCR a fourni cette semaine des médicaments et des équipements médicaux au ministère libyen de la Santé.

« Outre les efforts déployés pour tenter de protéger les réfugiés et les migrants en Libye dans les circonstances difficiles actuelles, le HCR a apporté une aide vitale pour venir en aide aux civils libyens dans les zones les plus touchées », a indiqué M. Yaxley.

Trois ambulances entièrement équipées ont été fournies à l’hôpital central de Tripoli, à l’hôpital Al Hadaba Alkhadra et au Centre national de cardiologie de Tajoura, qui continuent de fournir des soins médicaux dans des conditions extrêmement difficiles.

Le HCR, avec son partenaire Libaid et d'autres organisations locales, a également fourni des couvertures, des matelas, des lampes solaires, des ustensiles de cuisine, des seaux et d'autres articles de première nécessité à quelque 6.200 personnes déplacées et réfugiées dans des abris collectifs et des zones urbaines à Tripoli, Azzawya, Sabratha, Garabulli et Misrata.

Mais pour mieux venir en aide aux plus vulnérables, le HCR plaide pour un accès humanitaire durable et sans entrave à toutes les zones touchées et invite les belligérants à « accepter une trêve humanitaire temporaire permettant la mise en place de services d'urgence et le transfert volontaire et en toute sécurité de civils hors des zones touchées par le conflit ».

Des milliers de réfugiés et de migrants sont encore détenus dans des centres de détention où ils vivaient déjà dans des conditions effroyables avant le regain de tensions. Plus de 3.300 personnes sont particulièrement menacées dans les centres de détention proches d’affrontements imminents ou en cours.

Tant que les gens auront besoin de soins médicaux, l'OMS sera là -  Dr Hussein Hassan, chef de l'équipe des urgences sanitaires de l'OMS  en Libye

De son côté, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) déploie des médecins spécialistes dans les hôpitaux pour les aider à faire face à l'augmentation du nombre de victimes. L'OMS coordonne également la distribution de fournitures médicales et fournit d'autres formes d'appui aux centres de santé de Tripoli qui desservent des milliers de personnes déplacées par les bombardements et les affrontements.

« Les hôpitaux sont submergés de blessés nécessitant une intervention chirurgicale », a déclaré le Dr Hussein Hassan, chef de l'équipe des urgences sanitaires de l'OMS en Libye. « Les équipes médicales d'urgence de l'OMS les aident à sauver des vies ».

Au cours des trois premières semaines de déploiement, les équipes médicales ont effectué 144 interventions chirurgicales majeures et 104 interventions mineures. L'OMS soutient également les hôpitaux de campagne et les services ambulanciers de campagne en leur fournissant des fournitures médicales, notamment des trousses d'urgence pour les soins de traumatologie.

Alors que le conflit de Tripoli devient une crise prolongée, l'OMS en Libye activera également son système de surveillance des maladies et d'intervention rapide pour prévenir l'apparition de maladies infectieuses.

« Nous ne savons pas combien de temps cela va durer », dit le Dr Hassan. « Mais tant que les gens auront besoin de soins médicaux, l'OMS sera là. »