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Pays les moins avancés : la CNUCED plaide pour l’essor d’entreprises dynamiques afin d'éliminer la pauvreté

La production et la vente de fours réduisant la quantité de charbon nécessaire pour cuisiner un repas aident à protéger les forêts des mangroves dans les zones côtières de la République démocratique du Congo.
Photo PNUD/Clotilde Goeman
La production et la vente de fours réduisant la quantité de charbon nécessaire pour cuisiner un repas aident à protéger les forêts des mangroves dans les zones côtières de la République démocratique du Congo.

Pays les moins avancés : la CNUCED plaide pour l’essor d’entreprises dynamiques afin d'éliminer la pauvreté

Développement durable (ODD)

Le rapport 2018 de la CNUCED sur « l’entreprenariat au service de la transformation structurelle » recommande aux pays les moins avancés (PMA) d’adopter des politiques pouvant les aider à créer des emplois et à transformer leur économie.

Le document publié aujourd’hui examine les conditions nécessaires à la création et au développement des entreprises à fort impact dans les PMA, groupe de 47 pays qui comprend la plupart des pays d’Afrique subsaharienne, certains pays asiatiques et plusieurs États insulaires.

Selon la Conférence des Nations Unies pour le commerce et le développement (CNUCED), plusieurs caractéristiques structurelles de l’économie des PMA tendent à y affaiblir l’entreprenariat et la croissance des entreprises.

L’agence onusienne pointe ainsi du doigt le manque de moyens de financement, d’infrastructures et d’institutions, la pauvreté, les obstacles à l’avancement des femmes, le coût élevé de l’immatriculation des sociétés et la présence de risques politiques, économiques et environnementaux élevés.

La CNUCED décèle aussi plusieurs autres obstacles à la création et à la croissance des entreprises. Parmi ces défis,  figure le problème de l’énergie. En effet, dans les PMA, 3 entreprises sur 4 subissent des coupures d’électricité, ce qui occasionne des coûts supplémentaires, en particulier pour les microentreprises et les petites entreprises.

Autre source de préoccupation, l’accès au net.  En 2017, 17,5 % de la population des PMA utilisaient Internet, contre 41,3 % dans les autres pays en développement et 81 % dans les pays développés.

L’entreprenariat pour tirer un meilleur parti du Programme de développement durable à l’horizon 2030

En ce qui concerne la facilité de faire des affaires, 32 des 47 PMA se situent dans le quartile inférieur, ce qui indique un environnement peu favorable aux entreprises. La CNUCED rappelle aussi que 32 PMA ont des lois qui interdisent aux femmes d’exercer certaines professions, au risque de limiter les résultats des entreprises gérées par des femmes.

« Selon le rapport, l’État a un rôle plus actif à jouer dans l’émergence d’entreprises locales dynamiques et porteuses de transformation », a indiqué le Secrétaire général de la CNUCED. M. Mukhisa Kituyi insiste sur les recommandations du rapport, qui incite « les décideurs à accorder une plus grande importance aux avantages de l’entreprenariat, offre une aide précieuse aux pays les moins avancés dans l’action menée pour tirer le meilleur parti de l’application du Programme de développement durable à l’horizon 2030 ».

D’autant que la plupart des sociétés de ces pays sont des microentreprises ou de petites entreprises, et 58 % des entreprises formelles ont 20 employés ou moins. En effet, dans les PMA, nombreux sont ceux qui n’ont d’autre choix que de mener des activités entrepreneuriales de petite échelle et à faible valeur. Il s’agit avant tout de travail indépendant (qui représente 70 % de l’emploi total), de microentreprises et petites entreprises informelles dont les perspectives de survie et de croissance et la propension à innover sont faibles. Les petites entreprises représentent 58 % de l’ensemble des entreprises de ces pays.

Inciter les décideurs à accorder une plus grande importance aux avantages de l’entreprenariat - Mukhisa Kituyi, Secrétaire général de la CNUCED

Par ailleurs, le rapport révèle que la grande majorité des entrepreneurs agissent ainsi par nécessité. Dans les PMA, les jeunes entrepreneurs sont en moyenne 1,7 fois plus nombreux à se dire entrepreneurs par choix plutôt que par nécessité, alors qu’ils sont 2,8 fois plus nombreux dans les autres pays en développement.

S’agissant du paysage entrepreneurial, le document montre qu’il y a près de 270 millions de travailleurs indépendants dans les PMA en 2017. Le travail indépendant, qui est généralement considéré comme une forme d’entreprenariat, représente 70 % de l’emploi total dans les PMA, contre 50 % dans les autres pays en développement.

Mais selon la CNUCED, l’économie souterraine (c’est-à-dire les activités économiques dissimulées aux autorités pour des raisons monétaires, réglementaires ou institutionnelles) représente en moyenne 35 % du PIB dans les PMA.

Depuis 1971, Botswana, Cap-Vert, Maldives, Samoa et Guinée équatoriale cinq pays ont été reclassés

Dans ces conditions, l’Agence onusienne appelle les pays à dépasser l’approche consistant à créer un environnement propice aux affaires, à remédier aux défaillances des marchés et à soutenir les petites entreprises.

« Pour favoriser le développement des entreprises qui comptent dans la perspective d’une transformation économique en profondeur, il faut changer de cap », fait remarquer le CNUCED.

« Il ne faut pas négliger le rôle complémentaire essentiel que jouent les grandes entreprises, aux côtés des petites et moyennes entreprises, de manière à élaborer des stratégies propres à promouvoir un entreprenariat à fort impact », a fait observer M. Kituyi.

Car au moins 20 des 47 PMA disposent de politiques industrielles nationales qui articulent, à des degrés divers, entreprenariat et transformation structurelle, mais les pays accordent bien moins d’attention aux déterminants de l’entreprenariat. Pour la CNUCED, il faut prêter une plus grande attention au développement des chaînes d’approvisionnement nationales, sachant que la création de liens entre les PMA et les chaînes de valeur mondiales n’a guère suffi à stimuler le développement des entreprises locales.

A noter que les 47 pays les moins avancés (PMA) comptent plus d’un milliard d’habitants (soit 13 % de la population mondiale), mais ils représentent seulement 1,3 % du produit intérieur brut (PIB) mondial et 1,1 % du commerce mondial. Ces pays peuvent bénéficier d’un traitement préférentiel dans le cadre des accords relatifs au commerce mondial et aux changements climatiques, en raison des désavantages persistants qui en font les pays les plus pauvres du monde.

La liste des PMA est revue tous les trois ans par le Comité des politiques de développement, un groupe d’experts indépendant qui fait rapport au Conseil économique et social de l’ONU. La situation générale de la question du reclassement à l’issue de l’examen de mars 2018 a abouti à cinq cas de reclassement : Angola, Bhoutan, Îles Salomon, Sao Tomé et-Principe et Vanuatu ; la date du reclassement est connue pour deux pays : Vanuatu (décembre 2020) et Angola (février 2021).  Depuis la création de la catégorie des PMA par l’ONU en 1971, cinq pays ont été reclassés. Il s’agit du Botswana en 1994, du Cap-Vert en 2007, des Maldives en 2011, de Samoa en 2014 et de la Guinée équatoriale en juin 2017.