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'Panama papers' : un expert de l'ONU appelle à mettre fin au secret bancaire

L'expert indépendant des Nations Unies sur la dette extérieure et les droits de l'homme, Juan Pablo Bohoslavsky. Photo ONU/Jean-Marc Ferré
L'expert indépendant des Nations Unies sur la dette extérieure et les droits de l'homme, Juan Pablo Bohoslavsky. Photo ONU/Jean-Marc Ferré

'Panama papers' : un expert de l'ONU appelle à mettre fin au secret bancaire

Alors que les révélations de l'affaire dite des 'Panama papers' continuent de faire les gros titre de la presse internationale, l'Expert indépendant des Nations Unies chargé d'examiner les effets de la dette extérieure, Juan Pablo Bohoslavsky, a appelé vendredi la communauté internationale à mettre fin d'urgence au secret bancaire.

« L'évasion fiscale et les flux financiers illicites compromettent la justice et privent les gouvernements des ressources nécessaires à la réalisation des droits économiques, sociaux et culturels des populations », a averti l'expert dans un communiqué de presse.

Selon la presse, plus d'une centaine de rédactions de quotidiens d'information dans 76 pays ont récemment eu accès à des données inédites dévoilant l'ampleur de la création de sociétés offshore dans les paradis fiscaux entre 1977 et 2015. Les données proviennent d'une fuite d'informations issues des archives du cabinet d'avocats panaméen Mossack Fonseca, l'un des plus grands spécialistes mondiaux de la domiciliation de sociétés offshore.

Ces 'Panama papers' ont révélé qu'outre des milliers d'anonymes, des chefs d'Etat, des entreprises, des milliardaires, des grands noms du sport, des célébrités ou des personnalités sous le coup de sanctions internationales ont eu systématiquement recours à des montages offshore pour dissimuler leurs actifs dans plus de 21 juridictions offshore.

« Les clients [de Mossack Fonseca] ont beau avoir eu différents motifs pour déposer leurs actifs dans plus de 210.000 sociétés écrans secrètes, l'évasion fiscale et la dissimulation de corruption et de fonds d'origine criminelle semblent être une raison importante », a indiqué M. Bohoslavsky, auteur d'une étude récente sur les flux financiers illicites, qu'il a présentée au Conseil des droits de l'homme de l'ONU.

L'expert a noté que les sociétés écran ont également été utilisées par le passé par des groupes et des individus tentant de contourner des sanctions, des trafiquants de drogues et d'armes, des groupes terroristes, ainsi que des dictateurs responsables de graves violations des droits de l'homme.

« L'évasion fiscale détruit la confiance dans les institutions publiques et l'état de droit, et limite les capacités budgétaires à investir dans les soins de santé publique, l'éducation, la sécurité sociale et d'autres biens et services publics », a déploré M. Bohoslavsky.

Les 'Panama papers' démontre également que de nombreuses banques et intermédiaires financiers n'ont pas procédé aux vérifications nécessaires concernant leurs clients, a ajouté l'expert indépendant.

« Certains d'entre eux risquent même d'avoir aidé et encouragé les fraudes fiscales, la corruption et d'autres activités criminelles », a-t-il souligné, précisant que, selon les 'Panama papers', plus de 14.000 banques, cabinets d'avocats ou autres intermédiaires ont mis en place des sociétés, fondations et trusts pour leurs clients.

Réduire sensiblement d'ici 2030 les flux financiers illicites est l'une des cibles du Programme de développement durable adopté par les Etats membres en septembre dernier, a rappelé M. Bohoslavsky.

« Les États doivent maintenant prendre des mesures pour honorer ces engagements », a déclaré l'expert, leur demandant notamment de mettre un terme au secret bancaire, pierre angulaire des flux financiers illicites pour laquelle il n'existe, selon lui, « aucune justification valable ».

D'après les estimations du groupe de réflexion Global Financial Integrity, basé à Washington, les flux financiers illicites liés à l'évasion fiscale, la criminalité, la corruption et d'autres activités illicites, en provenance des pays en développement et des économies émergentes, s'élevaient à 1,1 milliard de dollars en 2013. Le groupe de réflexion estime que ces flux ont augmenté en moyenne de 6,5% par an au cours de la dernière décennie.