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La situation à Alep et dans d'autres zones de Syrie est « grotesque », affirme le chef des droits de l'homme de l'ONU

Un garçon devant les ruines d'un bâtiment à Alep, en Syrie. Photo OCHA/Gemma Connell
Un garçon devant les ruines d'un bâtiment à Alep, en Syrie. Photo OCHA/Gemma Connell

La situation à Alep et dans d'autres zones de Syrie est « grotesque », affirme le chef des droits de l'homme de l'ONU

Le Haut-Commissaire aux droits de l'homme, Zeid Ra'ad Al Hussein, a déclaré être « extrêmement alarmé » par la détérioration rapide de la situation des droits de l'homme à l'intérieur et aux alentours de la ville d'Alep et dans d'autres parties de la Syrie, où, a-t-il dit, « des violations et des abus choquants sont commis chaque jour ».

Le Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l'homme, Zeid Ra'ad Al Hussein, a déclaré jeudi être « extrêmement alarmé » par la détérioration rapide de la situation des droits de l'homme à l'intérieur et aux alentours de la ville d'Alep et dans d'autres parties de la Syrie, où, a-t-il dit, « des violations et des abus choquants sont commis chaque jour ».

« Je condamne catégoriquement ces actes horribles », a-t-il déclaré. « Les parties belligérantes en Syrie s'enfoncent chaque jour un peu plus dans les abysses, sans se soucier le moins du monde de la mort et de la destruction qu'elles sèment dans le pays. Les femmes, les enfants, les personnes âgées, les blessés, les malades, les personnes handicapées sont utilisés comme monnaie d'échange et chair à canon, jour après jour, semaine après semaine, mois après mois. Cette situation est grotesque. »

« Depuis le lancement, la semaine passée, de l'offensive des forces gouvernementales dans le gouvernorat d'Alep, qui aurait été accompagnée de nombreuses frappes aériennes par des avions russes et syriens, plus de 51.000 civils ont été déplacés et 300.000 autres risquent de se retrouver en état de siège », a déclaré M. Zeid. Le Haut-Commissaire a ajouté que des dizaines de civils auraient été tués depuis le 1er février. « Nous avons aussi reçu de nombreux rapports faisant état de destructions d'infrastructures civiles, y compris celle de trois cliniques et de deux boulangeries depuis le début de cette dernière vague d'hostilités », a-t-il dit.

Le Haut-Commissaire a souligné que des centaines de milliers de civils dans d'autres parties de la Syrie étaient aussi confrontés à des conditions humanitaires très difficiles, en particulier ceux qui vivent dans une situation de siège imposée soit par les forces gouvernementales et les groupes armés qui leur sont affiliés, soit par des groupes armés d'opposition, dont l'Etat islamique d'Iraq et du Levant (EIIL), aussi appelé Daech.

« A Moaddamiyat al-Sham, Madaya, Deir ez-Zour, Fuah et Kafreya, les gens sont plongés dans une situation absolument désespérée, avec de nombreux morts, y compris de jeunes enfants, causées par une malnutrition sévère et un manque d'accès aux soins médicaux », a-t-il dit.

A Moaddamiyat al-Sham, ville située à quelques kilomètres de Damas, depuis que les forces gouvernementales ont imposé un siège complet en décembre, quelque 35.000 civils endurent d'intenses bombardements et attaques aériennes ainsi qu'une dégradation dramatique de leurs conditions de vie, le prix des denrées alimentaires ayant beaucoup augmenté et le lait de substitution pour enfant n'étant plus disponible. Bien que de la nourriture ait été livrée à la partie orientale pro-gouvernementale de la ville, au moins six civils, dont cinq enfants, sont morts directement de malnutrition en janvier, et plus de 25 enfants de moins de deux ans souffriraient de malnutrition et de problèmes de santé.

A Madaya, au moins 26 personnes sont mortes de malnutrition depuis le début de l'année, en dépit de l'arrivée d'un important convoi humanitaire les 11 et 14 janvier. Au moins 300 personnes, dont des femmes et des enfants, ont besoin d'être évacuées immédiatement.

Environ 200.000 personnes vivant dans une situation de siège imposée par l'EIIL à Deir ez-Zour sont confrontées à de graves pénuries d'eau et à une absence totale d'électricité. Des rapports indiquent que plusieurs personnes accusées d'avoir introduit de la nourriture en contrebande dans la ville ont été exécutées par des combattants de l'EIIL.

En dépit de l'acheminement d'aide humanitaire dans les villages de Fuah et Kafreya les 11 et 14 janvier, la situation reste difficile, quelque 20.000 civils vivant toujours dans un état de siège imposé par les groupes d'opposition armés Ahrar al-Sham et Front al-Nusra, qui ont menacé de massacrer les villageois en représailles pour les actions menées par le gouvernement dans les territoires sous leur contrôle.

« Le fait d'affamer délibérément des civils comme méthode de guerre constitue une violation manifeste du droit international humanitaire », a déclaré Zeid Ra'ad Al Hussein. « La prise pour cible de civils, dont des milliers d'enfants, est abominable et pourrait constituer des crimes de guerre et des crimes contre l'humanité. Les personnes responsables de tels actes, y compris celles ayant responsabilité de commandement, doivent être traduites en justice », a-t-il ajouté.

« Je rappelle à toutes les parties leurs obligations, au regard du droit international en matière de droits de l'homme et du droit international humanitaire, de protéger les civils en tout temps et de permettre un accès complet à l'aide humanitaire, de recueillir et soigner les malades et les blessés, et de ne pas se livrer à des actes qui pourraient priver les civils de leur droit à la nourriture et à la santé », a dit le Haut-Commissaire.

M. Zeid a aussi souligné que toutes les parties au conflit ont l'obligation, en vertu du droit international humanitaire, de ne pas mettre en péril la population civile en se réfugiant en son sein ou dans des structures protégées, dont les écoles et les hôpitaux.

« Les négociations de paix à Genève doivent reprendre le plus tôt possible », a-t-il indiqué. « Il est inadmissible que les différentes parties ne parviennent même pas à s'asseoir autour d'une table alors que, du fait de leurs actes, plus de 250.000 personnes sont mortes et que le reste de la population endure de telles souffrances. Un règlement pacifique et durable de cette horrible guerre doit être construit sur une solide base de droits de l'homme. »

Par ailleurs, 160 agences humanitaires ont appelé jeudi à un cessez-le-feu immédiat en Syrie et à l'octroi d'un accès ininterrompu et sans entrave aux personnes les plus affectées par le conflit pour leur porter secours.

Parmi ces agences, figurent le Programme alimentaire mondial de l'ONU (PAM), le Haut-Commissariat de l'ONU pour les réfugiés (HCR), le Fonds des Nations Unies pour l'enfance (UNICEF), Save the Children, le Conseil norvégien pour les réfugiés, Care, Caritas, le Secours islamique, World Vision et de nombreuses ONG du monde entier.