L'actualité mondiale Un regard humain

Le Procureur de la CPI accuse le président du Soudan de génocide

Le Procureur de la CPI accuse le président du Soudan de génocide

Le procureur de la Cour pénale internationale (CPI), Luis Moreno-Ocampo.
Le Procureur de la Cour pénale internationale (CPI), Luis Moreno-Ocampo, a présenté lundi des éléments de preuve qui démontrent que le président du Soudan, Omar Hassan Ahmad Al-Bachir, a commis des crimes de génocide, des crimes contre l'humanité et des crimes de guerre au Darfour.

Le Procureur de la Cour pénale internationale (CPI), Luis Moreno-Ocampo, a présenté lundi des éléments de preuve qui démontrent que le président du Soudan, Omar Hassan Ahmad Al-Bachir, a commis des crimes de génocide, des crimes contre l'humanité et des crimes de guerre au Darfour.

« Trois ans après que le Conseil de sécurité lui a demandé de mener une enquête au Darfour et en s'appuyant sur les éléments de preuve recueillis, le Procureur a conclu qu'il y a des motifs raisonnables de croire qu'Omar Hassan Ahmad Al-Bachir doit répondre pénalement de 10 chefs d'accusation pour génocide, crime contre l'humanité et crime de guerre », a indiqué la CPI dans un communiqué.

Selon le Procureur, le président soudanais a échafaudé et exécuté un plan visant à détruire une grande partie des groupes Four, Masalit et Zaghawa en raison de leur appartenance ethnique. Les membres de ces trois groupes, qui ont, de tous temps, exercé une influence au Darfour, remettaient en cause la mise à l'écart de cette province et sont entrés en rébellion. M. Al-Bachir n'est pas parvenu à vaincre les mouvements armés, de sorte qu'il s'en est pris à la population.

Pendant cinq années, les forces armées et les milices/Janjaouid aux ordres du président soudanais ont attaqué et détruit les villages. Leurs éléments poursuivaient les survivants dans le désert. Quand ils arrivaient dans les camps pour personnes déplacées, ces derniers étaient soumis intentionnellement à des conditions d'existence qui devaient entraîner leur destruction. Pendant cinq années, des millions de civils ont été déracinés des terres que leur peuple occupait depuis des siècles. « Dans les camps, les forces de M. Al-Bachir tuent les hommes et violent les femmes. Il veut mettre un point final à l'histoire des peuples Four, Masalit et Zaghawa » a déclaré le Procureur. « Je n'ai pas le luxe de pouvoir me voiler la face. J'ai des preuves. »

Selon M. Moreno-Ocampo, l'intention du président soudanais de commettre un génocide est apparue de façon manifeste au travers des attaques bien coordonnées menées contre les 2.450.000 civils qui avaient trouvé refuge dans les camps. « M. Al-Bachir s'est arrangé pour que les survivants soient en proie à la misère, à l'insécurité et au harcèlement. Il n'avait pas besoin de cartouches. Il s'est servi d'autres armes : le viol, la faim et la peur. Tout aussi efficace, mais silencieux », a ajouté le Procureur.

Il ressort aujourd'hui des éléments de preuve que M. Al-Bachir, plutôt que de venir en aide à la population du Darfour, a mobilisé l'ensemble de l'appareil d'État, y compris les forces armées, les services de renseignement, la diplomatie, les services publics d'information et le pouvoir judiciaire, afin de soumettre intentionnellement les 2.450.000 personnes vivant dans des camps pour personnes déplacées – pour la plupart membres des groupes ciblés – à des conditions d'existence qui ne pouvaient qu'entraîner leur destruction physique.

La Chambre préliminaire I de la CPI va désormais examiner les éléments de preuve. Si les juges estiment qu'il y a des motifs raisonnables de croire que la personne citée a commis les crimes qui lui sont reprochés, ils décideront du meilleur moyen de garantir sa comparution devant la Cour. L'Accusation a demandé la délivrance d'un mandat d'arrêt.

Khartoum a immédiatement rejeté ces accusations et a menacé d'une « réaction » si l'affaire est portée devant les Nations Unies.

De son côté, le Secrétaire général de l'ONU, Ban Ki-moon, a rappelé lundi que la CPI était une institution indépendante et que les Nations Unies devaient respecter l'indépendance du processus judiciaire.