L'actualité mondiale Un regard humain

Le Conseil de sécurité inaugure une «ère de mise en œuvre» dans la protection des enfants dans les conflits armés

Le Conseil de sécurité inaugure une «ère de mise en œuvre» dans la protection des enfants dans les conflits armés

Enfants soldats en Ouganda
Lors d'un vote salué comme « historique » par Olara Otunnu, le responsable de l'ONU pour les enfants et les conflits armés, le Conseil de sécurité a aujourd'hui adopté une résolution qui met en place un système de suivi des crimes visant les enfants dans les conflits armés, et prévoit des mesures contre leur auteurs, notamment des sanctions.

« Nous sommes enfin entrés dans une ère de mise en œuvre », a déclaré Olara Otunnu, Représentant spécial des Nations Unies pour les enfants et les conflits armés, lors d'une conférence de presse qui s'est tenue à l'issue du vote, au Siège de l'ONU, à New York, marquant un moment « attendu depuis plusieurs années ».

image• Retransmission de la conference de presse[49mins]

Pour la première fois, le Conseil de sécurité a adopté un mécanisme d'ensemble qui permettra de signaler les graves violations commises tant par les gouvernements que par les groupes armés qui tuent ou mutilent des enfants, qui les recrutent ou les exploitent, qui attaquent des écoles ou des hôpitaux, commettent des actes de violence sexuelle, des rapts ou enfin qui privent les enfants de l'accès humanitaire (Voir, sur la résolution, le communiqué de presse de l'ONU).

Selon un communiqué de l'ONU, près de 2 millions d'enfants ont été tués et 6 millions handicapés ou blessés lors de conflits armés ces dix dernières années, tandis que 250.000 d'entre eux continuent d'être exploités à l'heure actuelle.

Les rapports signalant ces crimes iront au Conseil de sécurité, qui continuera pour sa part à nommer et à identifier clairement les parties qui continuent leurs violations, mais aussi à l'Assemblée générale, à la Commission des droits de l'homme, à la Cour pénale internationale et aux gouvernements et organisations régionales, a précisé le Représentant spécial (voir, pour une liste des groupes armés cités dans le rapport du Secrétaire général, notre dépêche du 9 février 2005).

Le dernier rapport du Secrétaire général au Conseil de sécurité cite ainsi 54 parties, dans le cadre de 11 situations de conflit, a indiqué Olara Otunnu (voir, pour une présentation du rapport, notre dépêche du 23 février 2005 et du 16 février 2005).

« Avec l'adoption de cette résolution, un mécanisme de surveillance et de suivi sera effectivement mis en place au niveau de chaque pays concerné. Et au-delà des couloirs de l'ONU, il faudra lancer une campagne de sensibilisation dans le public pour renverser cette terrible tendance à l'exploitation des enfants », a-t-il ajouté.

Enfin, le Conseil de sécurité ordonne aux parties qui figurent dejà sur la liste de mettre en place des mesures pour mettre fin aux violations signalées. Des équipes de l'ONU sont déjà désignées pour entamer un dialogue avec ces groupes et mettre en place un plan assorti d'un calendrier.

Les parties qui ne répondraient pas pourraient être soumises à des mesures ciblées, telles qu'interdiction de voyager, embargos sur les armes et mesures financières.

Le Conseil exprime en outre sa détermination à suivre ces situations en créant son propre groupe de travail sur la question.

« C'est une évolution très importante, et la première du genre à l'ONU », a déclaré Olara Otunnu, pour qui « il n'est pas suffisant de condamner, il faut aussi mettre en place des mesures pour faire appliquer ces condamnations ».

Interrogé sur les incitations à coopérer qui pourront peser sur les auteurs des crimes visés, qui sont principalement des acteurs non-étatiques, Olara Otunnu a estimé que chaque jour davantage, ces groupes étaient des acteurs politiques, qui bénéficiaient de réseaux très sophistiqués d'influence de par le monde, par lesquels il obtenaient un appui, un financement et des armes.

« Cela nous donne un levier pour agir à leur encontre », « notamment par l'intermédiaire du pillage des ressources naturelles, qui ne sont pas écoulées dans le pays mais à l'extérieur ». « Il n'est donc pas possible pour eux d'agir sans appui extérieur ».

Au-delà, la pression politique permet de faire changer les choses, a-t-il indiqué, citant l'exemple des Tigres tamouls qui ont contacté l'ONU, indiquant leur préoccupation et leur désir d'entamer un dialogue après avoir été cités dans la liste établie par l'ONU.

Le Représentant spécial a toutefois reconnu qu'un groupe tel que l'Armée de la résistance du Seigneur (LRA), qui sévit dans le Nord de l'Ouganda, était difficilement sensible aux mesures prévues dans la résolution, parce qu'ils sont quasiment autonomes. « Mais c'est une exception », a-t-il ajouté.

- Page du site de l'ONU consacrée aux enfants et aux conflits armés