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Une mission élargie de l'Union africaine au Darfour suggérée au Conseil de sécurité

Une mission élargie de l'Union africaine au Darfour suggérée au Conseil de sécurité

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Si le Gouvernement du Darfour ne parvient pas seul à protéger ses populations, il faut qu'il demande de l'aide, a indiqué aujourd'hui devant le Conseil de sécurité, le Représentant spécial de l'ONU pour le Soudan qui a souligné que l'élargissement du mandat de la mission de l'Union africaine, suggéré dans le rapport du Secrétaire général sur la question, pouvait constituer la meilleure façon d'apporter cette aide.

Sans éluder les sérieux problèmes que connaissait toujours le Darfour, le Représentant spécial du Secrétaire général de l'ONU pour le Soudan, Jan Pronk a présenté au Conseil de sécurité un bilan de la situation qui soulignait les progrès réalisés au regard des requêtes formulées dans la résolution 1556 du Conseil de sécurité.

Au nombre des avancées effectuées par le Gouvernement du Soudan pour se mettre en conformité avec la résolution, le Représentant spécial a notamment cité l'amélioration de la sécurité dans certains secteurs spécifiques où se trouvent de fortes concentrations de personnes déplacées. « La sécurité dans ces secteurs s'est améliorée par rapport à il y a de cela un ou deux mois et est meilleure qu'en dehors de ces zones », a-t-il déclaré, ajoutant peu après qu'il allait sans dire que cette sécurité « devait être encore radicalement améliorée et, à terme, étendue à l'ensemble du Darfour. »

Il a indiqué que les opérations militaires avaient totalement cessé dans ces secteurs, y compris les offensives contre les groupes rebelles, que le Gouvernement du Soudan avait fait preuve de retenue et s'était abstenu d'exercer des représailles et qu'il avait procédé au redéploiement de ses forces armées de telle sorte qu'elles ne soient pas en contact avec les civils et les personnes déplacées.

Jan Pronk s'est à cet égard référé aux informations fournies par la Commission du cessez-le-feu de l'Union africaine indiquant qu'elle n'avait aucune preuve qu'une seule attaque aérienne ait été menée par les forces gouvernementales depuis la signature du Communiqué conjoint ONU/Soudan du 3 juillet.

Au nombre des actions positives, le Représentant spécial a également porté le fait que toutes les restrictions à l'accès humanitaire ont été levées, qu'une partie significative des Forces populaires de défense a été désarmée, que le Gouvernement a souscrit à une politique de retour volontaire des personnes déplacées et s'est départi de son droit souverain de décider si tel ou tel retour était volontaire et opportun en le confiant à une autorité internationale [l'Organisation internationale pour les migrations].

Enfin, a souligné Jan Pronk, le Gouvernement a accepté la mise en place d'un mécanisme de contrôle international sur la situation en matière de droits de l'homme et la création de mécanismes nationaux pour enquêter sur ces abus, a « mobilisé » les chefs traditionnels et les dirigeants locaux sur la question du Darfour, pris des dispositions juridiques pour renforcer l'administration autochtone et s'est engagé, sans conditions préalables, dans des négociations avec les rebelles sur la crise au Darfour.

« L'application concrète de ces mesures n'a pas été sans connaître quelques délais et anicroches mais il a toujours été possible pour l'ONU et ses partenaires de discuter des questions avec le Gouvernement et de trouver une solution », a déclaré le Représentant spécial qui a indiqué avoir « félicité le Gouvernement pour les progrès réalisés dans cette courte période de 30 jours. »

Les aspects nettement moins positifs du bilan qu'il a effectué aujourd'hui portent sur la persistance des attaques des milices contre les civils et le désarmement de ces milices. « Le désarmement des Forces populaires de défense est une mesure louable mais ce n'est pas la même chose que désarmer les milices y compris les Janjaouites », a-t-il fait observer.

Le second point qui continue à poser problème est l'absence de mesures concrètes prises pour identifier et traduire en justice les chefs de milices et les auteurs des attaques « ce qui permet aux violations des droits de l'homme de se poursuivre en toute impunité », a ajouté M. Pronk.

Une préoccupation-clef réside dans l'effondrement de la confiance des personnes déplacées à l'égard des autorités. « Que ce manque de confiance soit fondé ou non », a fait observer Jan Pronk, « le rétablissement de cette confiance ne pourra être réalisé par le seul Gouvernement. »

« Le message sur lequel nous avons constamment mis l'accent est que tout gouvernement, y compris celui du Soudan, a l'obligation de faire le maximum pour protéger ses citoyens. [...] Ce message pourrait s'accompagner d'un autre message : nous exhortons le Gouvernement, s'il ne parvient pas à protéger totalement ses citoyens par lui-même de rechercher, de demander et d'accepter l'aide de la communauté internationale », a déclaré le Représentant spécial.

Pour Jan Pronk, un ensemble de mesures pourrait faire toute la différence. Il s'agirait d'élargir le mandat du mécanisme de contrôle de telle sorte qu'il couvre l'application de tous les accords, ceux existant entre le Gouvernement et les rebelles mais aussi ceux conclus entre le Gouvernement d'une part, l'ONU et ses partenaires de l'autre.

Il s'agirait également de changer la nature du contrôle, de l'envisager non plus sous l'angle de l'enquête sur des événements qui se sont produits mais de la prévention de tels événements, ce qui veut dire « être sur place dans tous les lieux où ces incidents peuvent se produire, y compris dans les camps et mener une action de médiation pour prévenir l'escalade des conflits et de l'insécurité. »

« Cela veut dire beaucoup plus d'observateurs : des yeux, des pieds, des roues, des avions et des cerveaux présents sur le terrain », a déclaré le Représentant spécial.

Il a souligné que le rapport du Secrétaire général [qui n'a pas encore été rendu public], en recommandant l'élargissement du mandat de la mission de l'Union africaine au Darfour fournissait une solution dans ce sens, une solution adaptée, « indépendante des parties, fortement présente, neutre, efficace et appuyée par les ressources logistiques de la communauté internationale. »

Faisant observer que « la crise du Darfour ne pouvait être analysée de façon séparée d'un règlement global au Soudan, lequel requiert que le Gouvernement et le Mouvement populaire du Soudan fassent la paix », Jan Pronk a plaidé en faveur d'une reprise rapide des pourparlers de Naivasha au Kenya avec pour objectif la conclusion rapide d'un accord.

Il a souligné que les effets d'un tel accord auraient d'autant plus d'impact que le Soudan avait une longue histoire de négociations sans issue et de promesses non tenues et que, par ailleurs, il pourrait servir de modèle pour les discussions sur le Darfour.

Enfin, tout en reconnaissant que la situation humanitaire au Darfour restait sombre, il a fait observer qu'en dehors de quelques goulets d'étranglement, « plus rien n'entravait la mise en ?uvre d'une opération humanitaire », plus rien si ce n'est les ressources.

« On a beaucoup parlé du Darfour en dehors du Soudan et à juste titre. [...] Beaucoup de missions ont visité le Soudan, également à juste titre. [...] Mais, comme l'a dit un des ministres en visite 'il est temps de joindre l'acte à la parole' et il est vrai que nous avons besoin de beaucoup d'attention, de beaucoup de discussions et de beaucoup de ressources », a conclu Jan Pronk.

- Dossier Soudan du site de l'ONU

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