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Soudan : 30 000 réfugiés soudanais de plus pourraient fuir vers le Tchad, prévient le HCR

Soudan : 30 000 réfugiés soudanais de plus pourraient fuir vers le Tchad, prévient le HCR

Soudanais à la frontière tchadienne
Alors qu'est signé, demain, un accord entre l'agence de l'ONU pour les migrations (OIM) et le gouvernement soudanais pour la coordination du retour des personnes déplacées, le Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) alerte sur le possible départ pour le Tchad de 30 000 Soudanais supplémentaires toujours soumis aux persécutions des milices Janjaouites, malgré les assurances et les pressions exercées par les autorités au Soudan.

L'agence de l'ONU pour les réfugiés rapporte qu'en raison de l'insécurité persistante au Darfour, dans l'Ouest du Soudan, près de 30 000 personnes supplémentaires seraient prêtes à se rendre au Tchad, ce qui ferait peser un lourd poids sur les capacités du HCR à prêter assistance aux réfugiés dans ses camps, indique un communiqué du Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) paru aujourd'hui.

La pression des nouveaux réfugiés potentiels intervient au moment où Brunson McKinley, le Directeur de l'Organisation internationale pour les migrations (OIM), qui a reçu de l'ONU un mandat pour la coordination de l'assistance aux personnes déplacées (voir notre dépêche du 17 août), a prévu de signer, demain samedi, avec le ministère des Affaires étrangères du Soudan, un accord sur la mise en place d'un mécanisme de gestion et de coordination de l'assistance humanitaire aux personnes déplacées à l'intérieur du territoire qui souhaitent rentrer dans leurs foyers.

M. McKinley doit se rendre aujourd'hui à Al Fashir, la capitale du Nord-Darfour (carte), où il doit visiter les camps d'Abu Shouk et de Zamzam, a déclaré aujourd'hui le porte-parole de l'OIM, Niurka Pineiro, lors d'un point avec la presse au siège de l'ONU à Genève.

Pour sa part, le HCR indique que Jean-Marie Fakhouri, son nouveau directeur pour le Soudan, actuellement en visite dans la région, a rencontré mercredi 300 personnes, représentant près de 30 000 personnes déplacées à l'intérieur du territoire (DIT) à Masteri, un bourg dans l'ouest du Darfour (carte des réfugiés au Darfour).

« Les chefs des DIT ont raconté à M. Fakhouri qu'ils avaient fui les attaques contre leurs propres villages au début de l'année. Mais même à Masteri, ils ont l'impression d'être des prisonniers virtuels, parce qu'ils sont régulièrement attaqués par des milices Janjaouites lorsqu'ils aventurent à l'extérieur », indique le communiqué.

Tueries, viols et pillages se poursuivent, explique-t-il encore. « Un homme a raconté comment sa mère avait été tuée la veille, par des Janjaouites qui ont volé son bétail. Une femme de 43 ans a dit qu'elle faisait partie des nombreuses femmes violées en allant chercher de la nourriture et du bois de chauffage, hors de Masteri ».

« Des femmes sont violées chaque jour, déclare-t-elle, mais elles continuent à sortir parce que les hommes seront tués s'ils s'aventurent à l'extérieur », rapporte le HCR

« Ce groupe de DIT a fait savoir qu'il attend la protection des gardiens de la paix de l'ONU, dont l'arrivée paraît peu probable » a déclaré Ron Redmond, le porte-parole du HCR, lors d'un point quotidien avec la presse qui avait lieu aujourd'hui au siège de l'ONU à Genève, ajoutant que « s'ils ne recevaient pas de garanties internationales en matière de sécurité, ils traverseraient la frontière vers le Tchad dès que la rivière qui marque la frontière avec le Soudan, gonflée par les pluies, se sera asséchée ».

« Nous sommes préoccupés par le fait qu'un afflux de 30 000 réfugiés massés en un seul endroit », s'il devait intervenir, « mettrait à rude épreuve notre capacité à porter assistance et à nourrir les réfugiés qui se trouvent là dans nos camps », a-t-il ajouté.

Cette semaine, le HCR avait déjà indiqué (cf. notre dépêche du 17 août) que le Premier Ministre, le Ministre des Affaires étrangères et le Ministre de l'Intérieur du Tchad avaient fait part au directeur des opérations du HCR pour le Soudan et le Tchad du poids énorme que représenterait pour leur pays l'arrivée de nouveaux réfugiés, et indiqué que toute nouvelle arrivée massive « pourrait déstabiliser l'économie déjà fragile du pays ».

Un autre phénomène parallèle est le nombre croissant de réfugiés, qui étaient auparavant hésitants à se rendre dans les camps et restaient à la frontière pour veiller à leurs troupeaux et rendre visite aux plus faibles et aux personnes âgées qui n'avaient pu fuir les villages. Ceux-là n'ont désormais plus d'autre solution que de solliciter l'aide internationale une fois que leurs récoltes ont été pillées et leur bétail abattu, indique le HCR.

L'agence précise que 7 345 nouveaux arrivés se sont présentés spontanément ce mois-ci dans ses quatre camps au Tchad, Breidjing, Oure Cassoni, Mile et Kounoungo, tandis qu'à Tine, au Nord-est du Tchad, près de 1500 réfugiés ont indiqué qu'ils n'avaient d'autre choix que de se rendre dans un camp.

L'agence de l'ONU estime que 18 000 réfugiés soudanais seraient encore établis le long de la frontière.

Selon le communiqué du HCR, les autorités soudanaises exerceraient des pressions militaires et mèneraient des campagnes de propagande à la radio et auprès des chefs de village pour empêcher les populations de partir.

« Les réfugiés ont indiqué qu'on leur avait dit qu'il n'y aurait pas d'aide pour eux au Tchad », a déclaré Ron Redmond. « Dans certains cas, on leur a promis de l'eau et de la nourriture pour leur permettre de survivre après que leurs villages ont été brûlés mais l'aide promise n'est jamais arrivée et les attaques contre leurs villages ont continué », a-t-il poursuivi.

Dans un communiqué du 18 août, le HCR rapportait que plusieurs groupes de réfugiés, rassurés par les autorités soudanaises sur le maintien de la sécurité s'ils rentraient dans leurs villages, avaient trouvé ces derniers occupés par les Janjaouites et avaient été tués après reçu la promesse qu'ils « pouvaient rester mais qu'ils seraient traités en citoyens de deuxième classe ».

Par ailleurs, le porte-parole du Fonds des Nations Unies pour l'enfance (UNICEF), Marc Vergara, a déclaré aujourd'hui lors de son point hebdomadaire avec la presse à Genève que l'agence allait envoyer à N'Djamena deux avions transportant 81 tonnes de nourriture et de matériel pédagogique destinées aux camps de réfugiés soudanais dans le pays,

Il y a un besoin urgent d'équipements scolaires pour répondre aux besoins de 60 000 écoliers soudanais, indique l'UNICEF, qui précise que pour l'instant des écoles sont en fonctionnement dans six camps, au profit de 13 500 enfants.

L'agence envoie également des compléments nutritifs : « Une tonne d'un mélange minéraux/vitamines qui donne un lait thérapeutique lors qu'il est mélangé à du lait normal va aussi être envoyé, ainsi que des vaccins contre la polio et la rougeole », a déclaré Marc Vergara.

Pour sa part, l'Organisation mondiale de la santé (OMS), par la voix de sa porte-parole, Fadela Chaib, a confirmé l'épidémie d'hépatite E (voir notre dépêche du 17 août), avec 1 006 cas déclarés pour l'instant.

En outre, « entre le 26 juin et le 13 août, un total de 672 cas de jaunisse aiguë ont été constatés à Goz Amer », un camps de réfugié à frontière du Soudan et du Tchad, alors que cette maladie a déjà fait 21 morts, a déclaré la porte-parole.

- Dossier Soudan du site de l'ONU

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