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Un ancien détenu de Guantánamo pourrait faire l’objet d’une nouvelle victimisation en Algérie (experts)

L'intérieur du prison.
Unsplash/Ashley Ross
L'intérieur du prison.

Un ancien détenu de Guantánamo pourrait faire l’objet d’une nouvelle victimisation en Algérie (experts)

Droits de l'homme

Des experts indépendant de l’ONU ont averti, jeudi, que l’ancien détenu de Guantánamo, Saeed Bakhouche, désormais accusé de terrorisme en Algérie, risquait d’être à nouveau détenu arbitrairement. 

En avril 2022, les États-Unis ont autorisé la libération de M. Bakhouche de la base navale américaine de Guantánamo Bay et l’ont transféré en Algérie en avril 2023, avec l’assurance qu’il serait traité avec humanité. Il a été immédiatement arrêté à son arrivée en Algérie, détenu au secret et placé de facto hors de la protection de la loi, menacé lors des interrogatoires et privé de représentation légale.

Si Alger l’a libéré en mai 2023, M. Bakhouche a été inculpé d’infractions terroristes en vertu de l’article 87 bis du code pénal algérien et doit être jugé ce mois-ci.

Détenu arbitrairement et torturé pendant plus de 20 ans

« La détention et les poursuites engagées contre M. Bakhouche violent son droit à être traité avec dignité et à une réadaptation physique et mentale en tant que victime d’une détention arbitraire prolongée et d’actes de torture », ont déclaré les experts onusiens, relevant que « ce traitement a sérieusement aggravé son état mental et physique précaire, y compris le syndrome de stress post-traumatique ».

M. Bakhouche a été détenu arbitrairement à la station navale américaine de Guantánamo Bay pendant plus de 20 ans et a été « torturé sous la garde des États-Unis », ont déclaré les experts, rappelant que « les poursuites engagées par l’Algérie contre M. Bakhouche violeraient son droit fondamental à un procès équitable ». 

Face à « ces poursuites injustifiées », la probable détention imminente « contredit les garanties expresses des États-Unis et de l’Algérie selon lesquelles il serait traité avec humanité à son retour en Algérie ». A ce sujet,  Washington a demandé l’abrogation de l’article 87 bis « en raison de sa définition excessive du terrorisme ». 

Pour un réexamen immédiat des charges retenues

Les experts ont donc demandé le réexamen immédiat des charges retenues contre M. Bakhouche, la fin du cycle de victimisation et des menaces de nouvelle détention arbitraire à son encontre, et la protection immédiate de ses droits, y compris des soins de santé adéquats et adaptés, comme l’ont promis l’Algérie et les États-Unis lors de son rapatriement. 

Si les experts ont salué les efforts déployés par les États-Unis pour mettre fin à la détention de M. Bakhouche de Guantánamo Bay, ils notent que la réinstallation d’anciens détenus dans leur pays d’origine ou dans des pays tiers n’est que la première étape pour leur assurer un avenir sûr, humain et respectueux de leurs droits à long terme. 

« Le rapatriement ne doit pas conduire à traumatiser à nouveau les personnes concernées, tel M. Bakhouche, ni les priver de leurs droits fondamentaux », font valoir les experts, rappelant être en contact avec les gouvernements de l’Algérie et des Etats-Unis sur cette affaire.

Outre les membres du Groupe de Travail sur les Disparitions Forcées, ce communiqué a été endossé par Margaret Satterthwaite, Rapporteure  spéciale sur l’indépendance des juges et des avocats, et Ben Saul, Rapporteur spécial sur la protection des droits de l’homme dans la lutte antiterroriste.

NOTE : 

Les Rapporteurs spéciaux, les Experts Indépendants et les Groupes d’Experts relèvent de ce qu’on appelle les procédures spéciales du Conseil des droits de l’homme. Le terme « procédures spéciales », qui désigne le plus grand corps d’experts indépendants au sein du système onusien des droits de l’homme, est généralement attribué aux mécanismes indépendants d’enquête et de supervision mis en place par le Conseil des droits de l’homme afin de traiter de la situation spécifique d’un pays ou de questions thématiques dans toutes les régions du monde. Les experts des procédures spéciales travaillent bénévolement ; ils n’appartiennent pas au personnel de l’ONU et ne perçoivent pas de salaire pour leur travail. Ils sont indépendants de tout gouvernement ou de toute organisation et exercent leurs fonctions à titre individuel.