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Sur cette photo de 2016, deux garçons vont chercher de l'eau pour leurs familles dans la ville syrienne d'Alep, qui a subi des destructions massives lors du conflit.

Syrie : le chef de l'ONU appelle à une solution politique « authentique et crédible »

© UNICEF/Khuder Al-Issa
Sur cette photo de 2016, deux garçons vont chercher de l'eau pour leurs familles dans la ville syrienne d'Alep, qui a subi des destructions massives lors du conflit.

Syrie : le chef de l'ONU appelle à une solution politique « authentique et crédible »

Paix et sécurité

À l'occasion du treizième anniversaire du conflitle Secrétaire général de l'ONU a souligné l'urgence d'une solution politique négociée en Syrie, en insistant sur la protection des civils et la situation humanitaire désastreuse.

Le mois de mars marque le treizième anniversaire du conflit en Syrie, avec des atrocités systématiques et des souffrances indicibles pour les civils.

Selon les estimations des Nations Unies, 16,7 millions de personnes, soit 70 % de la population totale, auront besoin d'une aide humanitaire en 2024. Environ la moitié de la population d'avant-guerre reste déplacée à l'intérieur ou à l'extérieur de la Syrie.

Pour aggraver la crise, une série de tremblements de terre a frappé le nord du pays en février de l'année dernière, faisant près de 5.900 victimes, endommageant gravement les infrastructures et exacerbant la vulnérabilité de millions de personnes qui luttent déjà pour satisfaire leurs besoins fondamentaux.

Des communautés entières se battent pour survivre, car le financement de l'aide humanitaire a atteint un niveau historiquement bas. En 2023, par exemple, seuls 2,02 milliards de dollars - soit 37,4 % - ont été reçus sur les 5,41 milliards de dollars requis pour les efforts humanitaires menés par les Nations Unies.

Faire tout ce qui est nécessaire

Dans une déclaration, le Secrétaire général António Guterres a exhorté toutes les parties prenantes à « faire tout ce qui est nécessaire pour parvenir à une solution politique authentique et crédible ».

Une solution qui réponde aux aspirations légitimes du peuple syrien, rétablisse la souveraineté, l'unité, l'indépendance et l'intégrité territoriale du pays, conformément à la résolution 2254 (2015) du Conseil de sécurité, et crée les conditions nécessaires au retour volontaire des réfugiés dans la sécurité et la dignité, a-t-il déclaré.

Protéger les civils

« Nous avons besoin que les civils et les infrastructures civiles soient protégés », a souligné le chef de l'ONU.

Parallèlement, il a également appelé à une approche stratégique de la lutte contre le terrorisme, conformément au droit international, à un accès humanitaire durable et sans entrave dans toute la Syrie et à un financement urgent et adéquat pour soutenir les opérations d'aide essentielles.

« Il est grand temps que les principales parties s'engagent à répondre à ces besoins. Toute une génération de Syriens a déjà payé un prix trop élevé », a-t-il ajouté.

Mettre fin à l'impunité

M. Guterres a également souligné que les détentions arbitraires, les disparitions forcées, les exécutions extrajudiciaires, les violences sexuelles et sexistes, la torture et d'autres violations se poursuivent et constituent un obstacle à une paix durable en Syrie.

« Nous avons tous la responsabilité de mettre fin à l'impunité », a-t-il déclaré.

« Des centaines de milliers, voire des millions, de victimes syriennes, de survivants et de membres de leurs familles comptent sur cette responsabilité », a martelé António Guterres.

Violences les plus importantes en quatre ans 

Les violences en Syrie depuis octobre sont les plus importantes en quatre ans, ont indiqué lundi des enquêteurs onusiens, notant que ce pays du Moyen-Orient a « désespérément besoin d’un cessez-le-feu ».

Dans un rapport publié aujourd’hui, la Commission d’enquête des Nations Unies sur la Syrie souligne que la Syrie connaît une vague de violence sans précédent depuis 2020. Sur de multiples lignes de front, les parties au conflit ont attaqué des civils et des infrastructures d’une manière qui s’apparente probablement à des crimes de guerre.

Dans ces conditions, une crise humanitaire sans précédent plonge les Syriens dans « un désespoir de plus en plus profond ». « Depuis le mois d’octobre, la Syrie a connu la plus grande escalade de combats depuis quatre ans », a déclaré dans un communiqué, Paulo Pinheiro, Président de la Commission d’enquête. 

Besoin d’un cessez-le-feu

Alors que la région est en plein « bouleversement », avec le conflit à Gaza, les enquêteurs onusiens estiment qu’il est impératif pour la communauté de contenir les combats sur le sol syrien. « La Syrie, elle aussi, a désespérément besoin d’un cessez-le-feu », a ajouté Paulo Pinheiro.

La recrudescence des combats en Syrie a commencé le 5 octobre lorsque des explosions consécutives lors d’une cérémonie de remise de diplômes dans une académie militaire de la ville de Homs, contrôlée par le gouvernement, ont tué plus de 60 personnes, dont 37 civils, et en ont blessé beaucoup d’autres.

Le gouvernement et son allié russe ont répondu en bombardant près de 2.300 sites en trois semaines dans les territoires contrôlés par les groupes armés d’opposition, tuant et blessant des centaines de civils. Ces raids se poursuivent et peuvent constituer des crimes de guerre, insistent les membres de la Commission.

L’impact du conflit de Gaza

Ces violences ont également provoqué le déplacement de quelque 120.000 personnes dont beaucoup avaient déjà été déplacées à plusieurs reprises, notamment à la suite des tremblements de terre dévastateurs de février dernier.

Sur un autre plan, le conflit dans la bande de Gaza a également eu un impact sur la Syrie. Selon les enquêteurs onusiens, « les tensions se sont accrues entre certaines des six armées étrangères actives en Syrie, notamment Israël, l’Iran et les États-Unis, ce qui fait craindre un conflit plus large ». 

Israël aurait frappé au moins 35 fois des sites et des forces présumés liés à l’Iran en Syrie et attaqué les aéroports d’Alep et de Damas, interrompant temporairement les services aériens humanitaires vitaux de l’ONU. Les milices pro-iraniennes auraient attaqué plus de 100 fois les bases américaines dans le nord-est de la Syrie, et les États-Unis ont répondu par des frappes aériennes contre les milices pro-iraniennes dans l’est de la Syrie.

« Le peuple syrien ne peut supporter une nouvelle intensification de cette guerre dévastatrice et prolongée », a averti M. Pinheiro.

Exactions des groupes islamistes

Pendant ce temps,  l’armée turque a augmenté ses efforts contre les Kurdes des Forces démocratiques syriennes (FDS) dans le nord-est de la Syrie. Des attaques aériennes ciblées pourraient équivaloir à des crimes de guerre, selon les trois enquêteurs. 

L’Etat islamique a également mené davantage d’assauts dans le centre du pays. Autre groupe djihadiste, Hayat Tahrir el Sham (HTS) a poursuivi à Idlib de la torture et des détentions illégales. Des indications d’exécutions après des procès inéquitables ont été relayées. 

Plus largement, toutes les parties ont continué de cibler des civils et des infrastructures, actes qui peuvent équivaloir à des crimes de guerre. Mais Damas est toujours responsable de détentions arbitraires, de disparitions forcées ou encore de torture. 

A noter que la Commission d’enquête de l’ONU présentera, le 18 mars prochain à Genève, son dernier rapport de mandat au Conseil des droits de l’homme des Nations Unies.