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La malnutrition est « particulièrement extrême » dans le nord de Gaza, selon l'OMS

De nombreux enfants à Gaza présentent des signes de malnutrition aiguë sévère et une perte de poids drastique.
© UNICEF/Eyad El Baba
De nombreux enfants à Gaza présentent des signes de malnutrition aiguë sévère et une perte de poids drastique.

La malnutrition est « particulièrement extrême » dans le nord de Gaza, selon l'OMS

Aide humanitaire

La malnutrition dans le nord de la bande de Gaza est « particulièrement extrême », a averti mardi l’Organisation mondiale de la santé (OMS), qui note que quinze enfants en sont déjà morts à l’hôpital Kamal Adwan. L'agence onusienne craint que les chiffres soient plus élevés dans d’autres hôpitaux.

« À Kamal Adwan, le seul hôpital pédiatrique du nord de Gaza, les médecins nous ont confirmé qu’au moins 10 enfants étaient morts de faim. Nous avons vu au moins deux enfants mal nourris au cours de notre visite. Selon le ministère de la Santé, 15 enfants sont morts de malnutrition », a déclaré depuis Gaza, le Dr Ahmed Dahir, Chef du bureau auxiliaire de l’OMS à Gaza lors d’un point de presse de l’ONU à Genève.

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« La situation est particulièrement grave dans le nord de la bande de Gaza », a affirmé pour sa part, Richard Peeperkorn, Représentant de l’OMS dans les Territoires occupés de Palestine.

Et Gaza est au bord d’une « crise nutritionnelle » où un enfant de moins de deux ans sur six souffre de malnutrition aiguë. « C’était en janvier. Il est donc probable que la situation soit plus grave aujourd’hui », a ajouté M. Peeperkorn.

L’aide permet de sauver des vies

Dans certaines parties de l’enclave palestinienne, la situation est plus critique. Selon le Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF), les taux de malnutrition des enfants dans le nord de Gaza, où l’accès à l’aide est très limité, étaient trois fois plus élevés qu’à Rafah, dans le sud de l'enclave.

« Cela montre que lorsque l’aide arrive au compte-gouttes, elle permet de sauver des vies », a insisté James Elder, porte-parole de l’UNICEF. L’agence onusienne redoute surtout cette « spirale avec des maladies infectieuses, le manque de nourriture, le manque désespéré d’eau potable et les bombardements incessants ».

En attendant, les examens nutritionnels effectués dans les abris et les centres de santé du nord ont révélé que près de 3% des enfants de moins de 2 ans souffrent d’émaciation sévère.

« Des examens similaires effectués dans le sud de la bande de Gaza, à Rafah, où l’aide a été plus disponible, ont révélé que 5% des enfants de moins de deux ans souffraient de malnutrition aiguë », a expliqué le Dr Peeperkorn.

Avant les hostilités de ces derniers mois, l’émaciation était rare dans la bande de Gaza, avec seulement 0,8% des enfants de moins de 5 ans souffrant de malnutrition aiguë. Le taux de 15% d’émaciation chez les enfants de moins de 2 ans dans le nord de la bande de Gaza suggère un déclin sérieux et rapide.

Une population réduite au désespoir

« Une telle dégradation de l’état nutritionnel d’une population en trois mois est sans précédent dans le monde », a-t-il ajouté, relevant que 90% des enfants de moins de 2 ans et 95% des femmes enceintes et allaitantes sont confrontés à une grave pauvreté alimentaire.

En route vers les hôpitaux, les équipes de l’OMS ont d’ailleurs constaté que « des foules désespérées à la recherche de nourriture » s’étaient approchées de leur camion et l’ont encerclé. « Nous avons dû utiliser nos mégaphones pour les informer que nous ne transportions que du matériel médical afin de pouvoir continuer. Il est déchirant de voir la population hospitalière de Gaza réduite à un tel désespoir », a décrit le Dr Dahir.

Dans les hôpitaux, la situation est tout aussi désastreuse. Le personnel de santé et les patients survivaient à peine avec un repas de base par jour.

Plus largement, le Bureau de la coordination des affaires humanitaires des Nations Unies (OCHA) estime qu’un quart de la population – 576.000 personnes - est à deux doigts de la famine, près de cinq mois après le début de l’assaut israélien sur Gaza.

Le « massacre de la farine »

De leur côté, des experts indépendants de l’ONU ont condamné mardi la violence déclenchée par les forces israéliennes, qui ont tué au moins 112 personnes venues chercher de la farine à Gaza la semaine dernière, en la qualifiant de « massacre » dans un contexte de famine inévitable et de destruction du système local de production alimentaire dans l’enclave palestinienne assiégée.

Le 29 février, les troupes israéliennes ont tiré sur des foules de Palestiniens rassemblés pour collecter de la farine dans le sud-ouest de la ville de Gaza, tuant au moins 112 personnes et en blessant quelque 760.

« Après des mois de campagne menée par Israël, Gaza pourrait déjà être confrontée à la famine », ont dit les experts. « Les récents largages aériens ne serviront pas à grand-chose. Le seul moyen de prévenir ou de mettre fin à cette famine est un cessez-le-feu immédiat et permanent ».

Outre les deux membres du Groupe de travail de l’ONU sur les personnes d’ascendance africaine, ce communiqué a été endossé par Francesca Albanese, Rapporteure spéciale sur les territoires palestiniens occupés, mais aussi par Michael Fakhri, Rapporteur spécial sur le droit à l’alimentation ; Tlaleng Mofokeng, Rapporteure spéciale sur la santé ; Pedro Arrojo Agudo, Rapporteur spécial sur les droits à l’eau potable et à l’assainissement ; et Reem Alsalem, Rapporteure spéciale sur la violence contre les femmes.