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Des personnes déplacées retournent à pied au site de Plain Savo tôt le matin après avoir passé la nuit dans des familles d'accueil dans la ville voisine de Bulé, en République démocratique du Congo.

Avec plus de 110 millions de déplacés recensés dans le monde, l’ONU appelle à une mobilisation collective

© UNHCR/Hélène Caux
Des personnes déplacées retournent à pied au site de Plain Savo tôt le matin après avoir passé la nuit dans des familles d'accueil dans la ville voisine de Bulé, en République démocratique du Congo.

Avec plus de 110 millions de déplacés recensés dans le monde, l’ONU appelle à une mobilisation collective

Migrants et réfugiés

Environ 110 millions de personnes sont déplacées dans le monde, un nouveau record, les conflits en Ukraine, au Soudan et ailleurs ainsi que le dérèglement climatique ayant entraîné le déracinement d’un nombre sans précédent de personnes dans le monde en fin d’année dernière, a indiqué mercredi à Genève l’Agence des Nations Unies pour les réfugiés (HCR).

Jamais le nombre de personnes dans ce cas n’a été aussi élevé, souligne le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) dans son rapport annuel, appelant à « une mobilisation collective face au déplacement forcé qui a atteint un niveau record en 2022 ». 

Fin 2022, le nombre de déplacés s’approchait de 108,5 millions, près de 20 millions supplémentaires par rapport à fin 2021, la plus importante hausse sur un an. Les récents combats au Soudan ont encore aggravé une situation déjà rendue extraordinaire en 2022 par l’invasion de l’Ukraine par la Russie ou la crise humanitaire en Afghanistan.

« Ces chiffres illustrent le fait que certaines personnes sont bien trop enclines à faire la guerre, et bien moins empressées à trouver des solutions. Il en résulte des destructions, des déplacements forcés et de la détresse pour chacune des millions de personnes contraintes de fuir leur foyer », a déclaré Filippo Grandi, le Haut-Commissaire des Nations Unies pour les réfugiés.

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Près de 2 millions de déplacés forcés au Soudan dont 450.000 réfugiés

Cette tendance à la hausse ne montre aucun signe de ralentissement en 2023. Depuis le début de la crise au Soudan par exemple, près de deux millions de personnes ont fui leur habitation dans ce pays du nord-est de l’Afrique, dont 450.000 vers les pays voisins.

Un chiffre qui devrait atteindre « 500.000 dans les prochains jours », a alerté devant la presse le Filippo Grandi. « C’est une urgence très importante » qui n’est pas suffisamment relayée. Et de regretter le manque d’assistance internationale par rapport à la situation en Ukraine.

Sur le total de 2022, 35,3 millions de personnes étaient des réfugiés et 62,5 millions des déplacés. Il y avait aussi 5,4 millions de demandeurs d’asile et 5,2 millions d’autres personnes ayant besoin d’une protection internationale.

La guerre en Ukraine est la première responsable, avec un nombre de réfugiés passant de 27.300 fin 2021 à près de 5,8 millions.  Le nombre de réfugiés en provenance d’Afghanistan était nettement plus élevé à la fin de l’année 2022 que l’année précédente en raison de la révision des estimations sur le nombre d’Afghans hébergés en Iran, dont beaucoup sont arrivés au cours de ces dernières années. 

En nombre absolu, les pays qui accueillent le plus de réfugiés sont la Turquie (3,6 millions), l’Iran (3,4 millions), la Colombie (2,5 millions), l’Allemagne (2,1 millions) et le Pakistan (1,7 million).

Les pays en développement accueillent le plus grand nombre de déplacés

Plus largement, ce sont les pays en développement, et non les Etats riches, qui continuent d’accueillir le plus grand nombre de déplacés. 

De plus, un réfugié sur cinq se trouve dans l’un des pays les plus pauvres et sept sur dix ne vont pas plus loin qu’un pays voisin. 

« Les 46 pays les plus pauvres du monde représentent moins de 1,3 % du produit intérieur brut mondial, mais ils accueillent plus de 20 % de l’ensemble des réfugiés », a insisté Filippo Grandi, ciblant ainsi certains responsables politiques qui affirment le contraire. 

« Les populations du monde entier continuent de faire preuve d’une hospitalité extraordinaire à l’égard des réfugiés », a ajouté Filippo Grandi, « mais un soutien international beaucoup plus important et un partage plus équitable des responsabilités sont nécessaires, en particulier avec les pays qui accueillent la majorité des personnes déracinées dans le monde. »

Par ailleurs, plus de 339.000 réfugiés sont retournés chez eux l’an dernier dans 38 pays. Même si le nombre a diminué en un an, des retours significatifs ont été observés au Soudan du Sud, en Syrie, au Cameroun et en Côte d’Ivoire. 

Parallèlement, 5,7 millions de personnes déplacées à l’intérieur de leur propre pays sont rentrées chez elles en 2022, notamment en Éthiopie, au Myanmar, en Syrie, au Mozambique et en République démocratique du Congo.

À la fin de 2022, on estimait à 4,4 millions le nombre de personnes apatrides ou de nationalité indéterminée dans le monde, soit 2% de plus qu’à la fin de 2021.

Des enfants déplacés se tiennent devant la tente de leur famille dans un camp informel du sud de la Syrie.
© UNICEF/Hasan Belal
Des enfants déplacés se tiennent devant la tente de leur famille dans un camp informel du sud de la Syrie.

Plus de 43 millions d'enfants déplacés 

Parmi les plus de 110 millions de personnes vivant en déplacement forcé, 43,3 millions seraient des enfants et beaucoup d'entre eux pendant toute leur enfance, selon les estimations publiées parallèlement par le Fonds des Nations Unies pour l’enfance 

« Depuis plus d'une décennie, le nombre d'enfants contraints de fuir leur foyer a augmenté à un rythme alarmant et notre capacité globale de réponse reste mise à rude épreuve », a déclaré la Directrice générale de l'UNICEF, Catherine Russell. 

Conflit et événements climatiques extrêmes

La guerre en Ukraine a forcé plus de 2 millions d'enfants ukrainiens à fuir le pays et a déplacé plus d'un million d'enfants à l'intérieur de l'Ukraine.

Sur les 43,3 millions d'enfants déplacés de force à la fin de 2022, près de 60 % (25,8 millions) étaient déplacés à l'intérieur de leur pays en raison de conflits et de violences. Le nombre d'enfants réfugiés et demandeurs d'asile a également atteint un nouveau record de 17,5 millions, un chiffre qui n'inclut même pas les enfants nouvellement déplacés en 2023, notamment en raison du conflit au Soudan. 

L'UNICEF estime que plus de 940.000 enfants ont été déplacés à cause du conflit à ce jour. En outre, des événements climatiques extrêmes, tels que les inondations au Pakistan et la sécheresse dans la Corne de l'Afrique, ont entraîné le déplacement de 12 millions d'enfants supplémentaires au cours de l'année 2022.

 « Cette augmentation est en phase avec l'assaut constant des conflits, des crises et des catastrophes climatiques dans le monde. Mais elle met également en évidence la réponse insuffisante de nombreux gouvernements pour garantir que chaque enfant réfugié ou déplacé à l'intérieur de son pays puisse continuer à apprendre, rester en bonne santé et développer tout son potentiel », a fait valoir Mme Russell.

Parmi les plus vulnérables

La plupart des enfants déplacés aujourd'hui passeront toute leur enfance en déplacement.

Les enfants déplacés et réfugiés sont souvent parmi les plus vulnérables. Nombre d'entre eux se voient refuser l'accès à l'éducation et aux soins de santé, ne bénéficient pas des vaccinations de routine et n'ont pas accès à la protection sociale.

Pour de nombreux enfants, les déplacements se prolongent de plus en plus. La plupart des enfants déplacés aujourd'hui passeront toute leur enfance en déplacement. Les déplacements induits par le climat devraient augmenter rapidement si aucune mesure n'est prise d'urgence pour atténuer le réchauffement de la planète et préparer les communautés vivant en première ligne de la crise climatique.

Des changements durables avérés

La Directrice de l’UNICEF appelle à « une plus grande volonté politique » pour s'attaquer aux facteurs de déplacement et fournir des solutions à long terme pour les enfants en mouvement. 

« Un nombre record d'enfants réfugiés, migrants et déplacés - une population mondiale qui rivalise avec celle de l'Algérie, de l'Argentine ou même de l'Espagne - exige une réponse proportionnelle », a dit Mme Russell.

« Nous avons constaté des changements durables lorsque les gouvernements investissent correctement dans l'inclusion des enfants et des familles déplacés. En travaillant ensemble, nous pouvons assurer leur sécurité, leur santé, leur apprentissage et leur protection », a fait valoir la cheffe de l’UNICEF.