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Yémen : 2018 fut une année « terrifiante » pour les civils, selon l’Envoyé spécial de l’ONU

Le port de Hudaydah, au Yémen, déchiré par la guerre, est l’une des rares voies vitales pour l’aide humanitaire
UN OCHA/Giles Clarke
Le port de Hudaydah, au Yémen, déchiré par la guerre, est l’une des rares voies vitales pour l’aide humanitaire

Yémen : 2018 fut une année « terrifiante » pour les civils, selon l’Envoyé spécial de l’ONU

Aide humanitaire

2018 fut une année « terrifiante » pour les Yéménites, mais elle a finalement été porteuse d'espoir, a déclaré l'envoyé de l’ONU pour le Yémen dans un entretien exclusif accordé à ONU Info.

Les négociations menées en décembre en Suède par l’Envoyé spécial des Nations Unies pour le Yémen, Martin Griffiths ont abouti à un cessez-le-feu autour de la ville portuaire clé d'Hodeïda et avec l’engagement de nouvelles consultations entre les parties belligérantes le mois prochain.

En dépit des « remarquables » progrès récents, le Yémen continue de souffrir d'une crise humanitaire décrite par l'ONU comme la pire au monde, ainsi que des combats opposant le gouvernement et les forces d'opposition du mouvement Houthi à travers le pays, a souligné Martin Griffiths, ajoutant que « ce sera difficile d’atteindre le but prévu ».

Le rôle unique des Nations Unies

L’Envoyé spécial a souligné que l’ONU était la seule organisation capable de négocier un accord tel que le cessez-le-feu d'Hodeïda et de mettre en place une équipe sur le terrain pour surveiller la trêve, une semaine après les pourparlers en Suède.

M. Griffiths a admis que beaucoup de doutes et de craintes ont surgi dans la période précédant les pourparlers, mais aussi un sentiment de réussite après avoir pu réunir, dans la même pièce, et pour la première fois en plus de deux ans, des représentants des deux parties pour des discussions après des années de guerre brutale.

L’Envoyé spécial a tenu à souligner qu’il importait d’utiliser les réunions pour faire progresser la question de la gestion d'Hodeïda à la suite du fragile accord de cessez-le-feu. Le port situé à l’ouest du Yémen, au bord de la Mer Rouge, est la principale porte d’entrée de toute l'aide humanitaire et des biens commerciaux entrant dans le pays déchiré par la guerre.

Sur le plan humanitaire, M. Griffiths a indiqué qu'une planification détaillée est déjà en cours, avec les équipes du bureau de Lise Grande, la Coordinatrice humanitaire au Yémen, mais aussi du Programme alimentaire mondial (PAM) qui fait partie de l'équipe de médiation de l’ONU en Suède. Le PAM devrait assumer le rôle principal dans la gestion du port d'Hodeïda

Une autre avancée décisive a été l'accord sur un échange de prisonniers, impliquant 4.000 personnes en détention (2.000 de chaque côté), qui vont maintenant rentrer chez eux. Un accord salué comme un moment d’émotions pour leurs familles et un « signe d'espoir remarquable pour le peuple du Yémen ». Le Comité international de la Croix-Rouge (CICR), qui était présent en Suède dans un rôle de soutien, a accepté de gérer le pont aérien des prisonniers d’une région à l’autre du pays.

Rôle clé du groupe des femmes yéménites

Les femmes yéménites ont joué un rôle crucial lors des pourparlers en Suède.

Le Groupe consultatif technique des femmes yéménites a tenu des réunions avec les deux parties ainsi que des membres de la communauté diplomatique, a constitué un élément important dans les coulisses des négociations en Suède.

Le groupe a examiné les moyens de faire entendre la voix des femmes yéménites dans le processus de rétablissement de la paix et a présenté des stratégies et des propositions visant à guider l'Envoyé spécial dans son rôle de médiateur afin de mettre fin à la guerre.

M. Griffiths a ajouté qu’en dépit du fait qu’elles n’étaient pas présentes lors négociations officielles, les femmes de ce groupe se sont mêlées facilement et efficacement à tous les représentants des deux parties, fournissant des conseils informels et des informations cruciales à la délégation de l’ONU, sur ce qui se passait réellement. Le groupe a été « une énorme ressource » a reconnu l’Envoyé spécial. Une ressource qui, il espère, « ne fera que s'améliorer et se développer avec le temps ».

Les questions non résolues

Deux questions n’ont pas été résolues lors des pourparlers en Suède : la réouverture de l’aéroport de Sanaa et la perception des recettes par la Banque centrale du Yémen.

Dans le premier cas, M. Griffiths a déclaré que l'ouverture de l'aéroport est toujours en négociation et qu'elle devrait être résolue avant la prochaine série de pourparlers. Il espère aussi que les experts techniques de la Banque centrale du Yémen, avec l'assistance du Fonds monétaire international (FMI), seront en mesure de mettre en place un processus transparent de perception des recettes, afin de payer les salaires des fonctionnaires qui ont souvent été laissés sans paie pendant des mois.

Cette fin d’année, l'attention internationale s'est clairement portée sur le Yémen, a déclaré M. Griffiths, laissant entrevoir la perspective de la fin du conflit en 2019. En ce qui concerne l'avenir, l'Envoyé spécial a exprimé l'espoir qu'une nouvelle série de pourparlers irait au-delà des considérations humanitaires pour commencer à traiter les questions essentielles d’une solution politique à la guerre.