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La Syrie reste dans un état profond de conflit, prévient l’envoyé de l’ONU

Des abris fournis par l'ONU et ses partenaires dans le nord-ouest de la Syrie.
OCHA/Syria
Des abris fournis par l'ONU et ses partenaires dans le nord-ouest de la Syrie.

La Syrie reste dans un état profond de conflit, prévient l’envoyé de l’ONU

Paix et sécurité

L’Envoyé spécial des Nations Unies pour la Syrie a prévenu lundi le Conseil de sécurité que ce pays reste dans un état profond de conflit et de division avec la menace d’un conflit régional qui ne s’est pas atténuée.

Dans un exposé sur la situation en Syrie, Geir O. Pedersen, a rappelé que le pays est rempli d’acteurs armés, de groupes terroristes, d’armées étrangères et de lignes de front. « Les civils sont toujours victimes de violences et soumis à de nombreuses violations des droits humains, à un état de déplacement prolongé et à des conditions humanitaires désastreuses », a-t-il ajouté.

Selon l’envoyé de l’ONU, « la menace d’un conflit régional en Syrie ne s’est pas atténuée, notamment avec la recrudescence des frappes israéliennes contre la Syrie ». La semaine dernière, Israël a procédé à des frappes qui, selon le gouvernement syrien, ont touché des sites militaires dans le sud de la Syrie et un immeuble résidentiel à Damas. Israël a déclaré que ses frappes étaient une réponse au lancement de deux drones depuis la Syrie vers Israël. D'autres frappes israéliennes ont été signalées à Tartous, Damas, dans la campagne de Damas et près de la frontière libanaise.

« Il existe un risque important que cette dynamique s’aggrave encore – en particulier si la situation au Liban s’aggrave », a prévenu M. Pedersen.

En outre, la menace d’une escalade de la violence à l’intérieur des frontières syriennes reste intacte, avec des hostilités sur les lignes de front dans tout le nord, entraînant des pertes civiles. Le sud a vu des affrontements éclater à Deraa, déplaçant des civils.

« La nécessité d’une désescalade menant à un cessez-le-feu à l’échelle nationale demeure plus aiguë que jamais », a dit Geir O. Pedersen, notant qu’après plus de 13 ans de conflit, les gens descendent toujours dans la rue pour exprimer leurs griefs et sont souvent confrontés à des mesures répressives.

Geir Pedersen (à l'écran), envoyé spécial du secrétaire général pour la Syrie, informe le Conseil de sécurité de l'ONU de la situation dans le pays.
UN Photo/Eskinder Debebe
Geir Pedersen (à l'écran), envoyé spécial du secrétaire général pour la Syrie, informe le Conseil de sécurité de l'ONU de la situation dans le pays.

Inquiétude concernant les réfugiés syriens

L’Envoyé spécial a en outre exprimé son inquiétude concernant le sort des réfugiés syriens, qui sont confrontés à des tensions croissantes dans les pays d’accueil.

Il a signalé des « informations alarmantes faisant état d’attaques contre des réfugiés syriens déclenchant d’importantes violences ». « Les réfugiés sont inquiets à l’idée d’être renvoyés de force ou poussés à rentrer par des mesures de plus en plus restrictives », a-t-il souligné.

Il s’est dit pleinement conscient de la situation difficile dans laquelle se trouvent les pays hôtes et a appelé à leur apporter un soutien encore plus soutenu. « Nous continuons également de souligner l’importance de soutenir les Syriens qui choisissent de rentrer volontairement », a-t-il déclaré.

Solution politique négociée

Compte tenu de l’ampleur et de la complexité du conflit, Geir O. Pedersen a souligné qu’il n’existe « pas de solution simple ou de miracle ».

Selon lui, un processus dirigé et pris en charge par les Syriens et facilité par les Nations Unies est essentiel. « Les Syriens restent profondément divisés, politiquement et territorialement, et des millions de personnes vivent toujours hors du contrôle du gouvernement. Les rassembler et réconcilier leurs visions n’est possible que grâce à une solution politique négociée », a-t-il dit.

Enfin, l’envoyé de l’ONU a estimé que toutes les principales parties prenantes internationales doivent être impliquées et leurs préoccupations pertinentes devraient être prises en compte dans le cadre d'une approche globale de mise en œuvre de la résolution 2254 du Conseil de sécurité.

« Une approche est nécessaire qui n’exclut aucun des acteurs militaires, politiques ou économiques – dont beaucoup détiennent des clés essentielles de la solution ou des moyens de la gâcher – et qui aborde l’ensemble des questions qui continuent d’alimenter le conflit ou sont directement liées à sa résolution », a-t-il expliqué.

Il a noté que ce mois-ci, les gouvernements syrien et turc ont fait de nouvelles déclarations sur la possibilité de reprendre des contacts diplomatiques entre eux. Il y a eu aussi des déclarations des gouvernements russe et iraquien sur leurs efforts pour soutenir cela. Les discussions se poursuivent également sur la prochaine étape des travaux du Groupe de contact arabe.

« Nous continuons de mobiliser tous les partenaires qui cherchent à participer aux efforts visant à faire avancer les dossiers », a souligné M. Pedersen. « Et nous continuons d’appeler tous les acteurs, qu’ils aient ou non des contacts avec les parties syriennes, à agir de manière à contribuer à débloquer les efforts de mise en œuvre de la résolution 2254, au point mort depuis longtemps ».

Selon lui, un effort dirigé et contrôlé par la Syrie ne peut réussir sans une diplomatie internationale coopérative entre les principales parties prenantes pour soutenir le processus politique facilité par l’ONU.

Ramesh Rajasingham, Directeur de la coordination du Bureau des Nations Unies pour la coordination des affaires humanitaires, informe le Conseil de sécurité de la situation en Syrie.
UN Photo/Eskinder Debebe
Ramesh Rajasingham, Directeur de la coordination du Bureau des Nations Unies pour la coordination des affaires humanitaires, informe le Conseil de sécurité de la situation en Syrie.

Plus de 16 millions de personnes ont besoin d'aide humanitaire

De son côté, le Directeur de la Division de la coordination du Bureau de la coordination des affaires humanitaires des Nations Unies (OCHA), Ramesh Rajasingham, a constaté que la Syrie continue de souffrir de sa pire crise humanitaire depuis le début du conflit il y a plus de 13 ans. 

Plus de 16 millions de personnes ont besoin d’aide humanitaire, dont une grande majorité de femmes et d’enfants, et quelque 7,2 millions de personnes déplacées ne peuvent accéder aux services essentiels à cause des hostilités. 

L’accès des populations à l’eau a été réduit en raison de la diminution des précipitations, aggravée par les effets du conflit et de la crise économique sur les infrastructures d’eau et d’électricité.

Pour aider ces populations à répondre à leurs besoins élémentaires en eau, l’ONU et ses partenaires s’activent. Dans la province de Hassaké, des organisations partenaires ont ainsi installé 16 stations de traitement d’eau, a indiqué le haut fonctionnaire. 

De plus, avec le soutien du Fonds humanitaire pour la Syrie, des travaux sont en cours pour réparer la station d’eau d’Aïn el-Beïda, qui alimente le quartier d’Al Bab à Alep, tandis qu’à Quneitra, le Programme alimentaire mondial (PAM) a réhabilité les systèmes d’irrigation pour soutenir l’agriculture locale.

Dans tout le pays, plus de 3,5 millions de personnes ont reçu une assistance en matière d’eau, d’assainissement et d’hygiène au premier trimestre de cette année, a précisé M. Rajasingham.

Opération transfrontalière

Il a ensuite souligné que pour les millions de personnes dans le nord-ouest de la Syrie qui subissent aujourd’hui une chaleur extrême en plus d’années de conflit et de déplacements, l’opération transfrontalière depuis la Türkiye reste une « planche de salut » essentielle.

Il a salué la décision du gouvernement syrien de prolonger de six mois supplémentaires, jusqu’au 13 janvier 2025, l’autorisation accordée à l’ONU d’utiliser le point de passage de Bab el-Haoua pour acheminer l’aide humanitaire, notant qu’il s’agit de la deuxième prolongation depuis février 2023. 

Au cours de l’année écoulée, près de 2 000 camions ont transporté l’aide de l’ONU depuis la Türkiye vers le nord-ouest de la Syrie en passant par les points de passage de Bab el-Haoua, Bab el-Salam et Raaï, a-t-il rappelé, avant d’appeler à accroître le recours à cette assistance transfrontalière.