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Gaza : l’ONU s’inquiète du sort de centaines de personnes manquant à l’appel à l’hôpital Al-Aqsa

Des personnes blessées lors des bombardements sont soignées à l'hôpital Al-Shifa, dans la ville de Gaza (photo d'archives).
© WHO
Des personnes blessées lors des bombardements sont soignées à l'hôpital Al-Shifa, dans la ville de Gaza (photo d'archives).

Gaza : l’ONU s’inquiète du sort de centaines de personnes manquant à l’appel à l’hôpital Al-Aqsa

Paix et sécurité

Alors que la guerre entre Israël et le Hamas est entrée dans son quatrième mois à Gaza, des agences humanitaires onusiennes se sont inquiétés, lundi, du sort de centaines de patients et de membres du personnel, qui manqueraient à l’appel à l’hôpital d’Al-Aqsa, dans le centre de l'enclave palestinienne.

L’Organisation mondiale de la santé (OMS) et le Bureau de coordination des affaires humanitaires de l’ONU (OCHA) ont rapporté lundi que la majorité du personnel médical, ainsi qu’environ 600 patients, ont été contraints de quitter le complexe pour des lieux inconnus, sans que l’on sache où ils se trouvent.

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« L’OMS a reçu des informations inquiétantes faisant état d’une intensification des hostilités et d’ordres d’évacuation permanents à proximité de l’hôpital Al-Aqsa, dans la zone intermédiaire de la bande de Gaza », a déclaré sur le réseau social X, le Directeur général de l’Agence sanitaire mondiale de l’ONU, Tedros Adhanom Ghebreyesus. « Selon le directeur de l’établissement, plus de 600 patients et la plupart des professionnels de la santé ont été contraints de quitter les lieux. Leur localisation n’est pas connue à l’heure actuelle ».

Scènes chaotiques

Le personnel de l’OMS et de l’OCHA a visité dimanche le seul hôpital opérationnel dans le gouvernorat de Deir el-Balah, au centre de la bande de Gaza. Les deux agences humanitaires onusiennes ont décrit des scènes chaotiques alors que le personnel restant à l’hôpital continue d’essayer de faire face à un afflux de blessés au moment où « les lourds bombardements israéliens aériens, terrestres et maritimes se sont intensifiés sur une grande partie de la bande de Gaza ».

Le chef de l’OMS a déclaré que son personnel avait été témoin de « scènes écœurantes de personnes de tous âges soignées sur des sols couverts de sang et dans des couloirs chaotiques ».

« Al Aqsa est l’hôpital le plus important de la zone médiane de Gaza et doit rester fonctionnel et protégé pour assurer ses services vitaux », a affirmé le Dr Tedros, relevant qu’une nouvelle érosion de sa capacité à fonctionner ne peut être autorisée. « Face à de tels traumatismes, blessures et souffrances humanitaires, il s’agirait d’un scandale moral et médical ».

L’hôpital a fait état de besoins immenses, notamment en personnel de santé, en fournitures médicales, en lits et en services de protection contre les frappes et les hostilités.

Mission annulée pour des raisons sécuritaires

Par ailleurs, l’Agence sanitaire mondiale de l’ONU a indiqué avoir annulé dimanche une autre mission prévue à l’hôpital Al-Awda, au nord de la bande de Gaza. Il s’agit du quatrième report depuis le 26 décembre pour des raisons de garanties sécuritaires. Selon l’OMS, la mission prévoyait d’acheminer des fournitures médicales urgentes pour soutenir les opérations de cinq hôpitaux dans le nord, y compris Al-Awda.

Ce nouveau report intervient alors que cela fait près de deux semaines qu’elle rencontre des difficultés à atteindre le nord de la bande de Gaza. Or sur le terrain, l’OMS indique que les hôpitaux du nord de la bande de Gaza sont totalement hors service.

Le Dr. Tedros s’est dit choqué par l’ampleur des besoins sanitaires et de la dévastation dans le nord de la bande de Gaza. « Un accès urgent, sûr et sans entrave à la région est nécessaire pour acheminer l’aide humanitaire. Tout retard supplémentaire entraînera encore plus de morts et de souffrances pour un trop grand nombre de personnes », a-t-il fait valoir.

« Trois mois après le début de ce conflit, aucun hôpital ne fonctionne pleinement dans le nord de Gaza, où une autre mission de l’OMS a été annulée aujourd’hui en raison des dangers et de l’absence des autorisations nécessaires. Ailleurs dans la bande de Gaza, seule une poignée d’établissements de santé fonctionnent », a regretté le Dr Tedros.

Des fournitures médicales pour aider 5.000 patients

Selon l’OMS, « les bombardements intensifs, les restrictions de circulation et l’interruption des communications font qu’il est pratiquement impossible d’acheminer régulièrement et en toute sécurité des fournitures médicales dans la bande de Gaza, en particulier dans le nord ».

Dans ces conditions, la plupart des hôpitaux manquent cruellement de personnel, les agents de santé ayant quitté les lieux en raison des ordres d’évacuation ou de l’insécurité. « En l’absence de soins de santé adéquats, la souffrance à Gaza s’accroît d’heure en heure ».

« Les blessés ne sont souvent en mesure d’atteindre les médecins que plusieurs jours ou semaines après avoir été blessés, parfois avec de graves infections, ce qui réduit la possibilité de sauver leurs membres », a décrit aux équipes de l’OMS et d’OCHA, le Dr Mohamed Obied, consultant en orthopédie à l’hôpital Al-Awda. Selon ce responsable, les établissements de santé ne disposent pas du personnel spécialisé, des médicaments ou de l’équipement nécessaires pour soigner ces blessures.

Les médecins sont confrontés au choix difficile de pratiquer des amputations au-dessus du genou plutôt qu’en dessous. Ces amputations posent des problèmes de rééducation et peuvent nuire à la qualité de vie future des patients.

Sur le terrain, les équipes onusiennes tentent de venir en aide aux populations. L’OMS a ainsi livré des fournitures médicales pour aider 4.500 patients ayant besoin de dialyse pendant trois mois et 500 patients ayant besoin de soins de traumatologie.

Des enfants attendent une distribution de nourriture à Rafah, dans le sud de Gaza.
© UNICEF/Abed Zagout
Des enfants attendent une distribution de nourriture à Rafah, dans le sud de Gaza.

Plus de 300 attaques contre les infrastructures sanitaires

Selon un décompte effectué par l’OMS la semaine dernière, 13 des 36 hôpitaux de Gaza sont partiellement fonctionnels : neuf dans le sud et quatre dans le nord. Les hôpitaux du nord offrent des services de maternité, de traumatologie et de soins d’urgence.

Les hôpitaux et autres infrastructures médicales vitales de Gaza et de Cisjordanie ont été attaqués près de 600 fois depuis que la guerre a éclaté dans l’enclave en réponse à l’attaque terroriste menée par le Hamas dans le sud d’Israël, a déclaré vendredi l’agence des Nations Unies pour la santé.

La plateforme en ligne de l’OMS couvrant les attaques contre les soins de santé fait état de 304 attaques dans la bande de Gaza depuis le 7 octobre. Ces attaques ont touché 94 établissements de santé (dont 26 hôpitaux endommagés sur 36) et 79 ambulances. En Cisjordanie, quelque 24 établissements de santé et 212 ambulances ont été touchés.

Depuis le 7 octobre de l’année dernière, quelque 613 personnes sont mortes dans les établissements de santé du territoire palestinien occupé - 606 à Gaza et sept en Cisjordanie - et plus de 770 ont été blessées, selon les dernières données de l’OMS sur les attaques dans le secteur de la santé.

Le Secrétaire général António Guterres (à droite) rencontre Sigrid Kaag, Coordonnatrice principale des affaires humanitaires et de la reconstruction pour Gaza.
UN Photo/Evan Schneider
Le Secrétaire général António Guterres (à droite) rencontre Sigrid Kaag, Coordonnatrice principale des affaires humanitaires et de la reconstruction pour Gaza.

Prise de fonction de la Coordinatrice humanitaire

La Coordonnatrice principale de l'action humanitaire et de la reconstruction pour Gaza, Sigrid Kaag, qui a été nommée fin décembre par le Secrétaire général de l'ONU, a officiellement pris ses fonctions lundi.

Elle sera chargée de faciliter, coordonner, surveiller et vérifier les envois de secours humanitaires à Gaza. Elle a également reçu le mandat d'établir un mécanisme des Nations Unies pour accélérer les expéditions de secours humanitaires vers Gaza via des États qui ne sont pas parties au conflit.

Elle a rencontré lundi à New York le Secrétaire général et doit se rendre à Washington cette semaine pour des réunions avant d'aller dans la région.