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Désespoir de plus en plus grand à Gaza sur fond d'incertitude quant aux « zones de sécurité »

Fatima, âgée de six ans, est assise à côté de sa petite soeur dans un abri à Khan Younis, dans le sud de Gaza.
©UNICEF/UNI472266/Zaqout
Fatima, âgée de six ans, est assise à côté de sa petite soeur dans un abri à Khan Younis, dans le sud de Gaza.

Désespoir de plus en plus grand à Gaza sur fond d'incertitude quant aux « zones de sécurité »

Paix et sécurité

La situation des Gazaouis « s'aggrave d'heure en heure », a déclaré mardi l'agence de santé de l'ONU (OMS), après les bombardements israéliens les plus violents dans l'enclave palestinienne depuis que les militants du Hamas ont massacré quelque 1.200 personnes dans le sud d'Israël et pris environ 240 personnes en otage le 7 octobre dernier.

S'exprimant depuis la ville de Rafah, le Dr Rick Peeperkorn, Représentant de l'Organisation mondiale de la Santé (OMS) dans le territoire palestinien occupé, a décrit de nouvelles effusions de sang après la reprise des bombardements israéliens vendredi dernier.

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« La situation s'aggrave d'heure en heure », a déclaré le Dr Peeperkorn aux journalistes à Genève par vidéoconférence. « Il y a une intensification des bombardements tout autour, y compris ici dans les régions du sud, à Khan Younis et même à Rafah ».

Le médecin de l'OMS a noté qu'au cours des deux derniers jours, il y avait également eu « un nombre considérablement croissant » de personnes déplacées à l'intérieur de l'enclave en provenance de la région centrale « et même maintenant des régions du sud », craignant pour leur vie.

Faisant écho à ces préoccupations, un porte-parole du Fonds des Nations Unies pour l'enfance (UNICEF), James Elder, a cité le droit international humanitaire qui oblige les militaires à « prendre toutes les mesures possibles » pour protéger les civils. Il n'est pas acceptable de déclarer unilatéralement qu'ils doivent se rendre dans des « zones dites sûres », a-t-il insisté, alors qu'il s'agit en fait de « trottoirs » ou de « bâtiments à moitié construits » sans eau, sans abri, ni assainissement.

« Il ne s'agit pas d'une zone sûre si elle est seulement à l'abri des bombardements, ce qui n'est pas le cas de certaines zones », a déclaré M. Elder.

Crise alimentaire catastrophique

De son côté le Programme alimentaire mondial (PAM) a prévenu mardi que la reprise des hostilités à Gaza ne ferait qu’intensifier « la crise alimentaire catastrophique qui menace déjà de submerger la population civile ».

La pause de sept jours dans les combats a permis au PAM et à ses partenaires d’intensifier les opérations de secours. Durant cette période, ils ont ainsi pu doubler le nombre de points de distribution en dehors des abris et livrer de la nourriture dans des endroits auparavant impossibles à atteindre, notamment dans certaines régions du nord de l’enclave.

Mais, désormais « la reprise des combats rend la distribution de l'aide quasiment impossible et met en danger la vie des travailleurs humanitaires ». « C’est surtout un désastre pour la population civile de Gaza, soit plus de 2 millions de personnes, dont la seule planche de salut est l’assistance alimentaire », a souligné l’agence. 

349 Palestiniens tués et 750 blessés

Le Bureau de coordination de l'aide humanitaire de l'ONU (OCHA) a signalé qu'entre l'après-midi du 3 décembre et l'après-midi du 4 décembre, au moins 349 Palestiniens ont été tués et 750 blessés, selon le ministère de la Santé à Gaza.

Trois soldats israéliens ont également été tués, selon des sources israéliennes.

Selon l'agence des Nations Unies pour les réfugiés palestiniens (UNWRA), près de 1,9 million de personnes, soit plus de 85% de la population de Gaza, ont été déplacées à travers la bande de Gaza depuis le 7 octobre.

Près de 1,2 million de personnes déplacées à l'intérieur de l'enclave ont trouvé refuge dans 156 installations de l'UNRWA dans les cinq gouvernorats de la bande de Gaza, y compris le nord et la ville de Gaza, a indiqué l'agence onusienne.

Elle a également confirmé qu'au moins 19 autres collègues avaient été tués lors de frappes aériennes, ce qui porte le total à 130 depuis le 7 octobre. « Nous sommes également en danger lorsque nous marchons », a déclaré l'UNRWA, citant l'un de ses conseillers, nommé seulement Jehan. « Nos vies sont à l'arrêt... Il y a l'odeur de la mort ici. Mais nous sommes déterminés à vivre ».

Des femmes préparent du pain entourées de bâtiments détruits à Khan Yunis, à Gaza, lors de la récente pause humanitaire.
© UNRWA/Ashraf Amra
Des femmes préparent du pain entourées de bâtiments détruits à Khan Yunis, à Gaza, lors de la récente pause humanitaire.

La planche de salut de l'aide

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Les autorités sanitaires de Gaza estiment qu'au moins 15.523 Palestiniens ont été tués à Gaza depuis le 7 octobre, dont 70 % seraient des femmes et des enfants. « Beaucoup d'autres sont portés disparus, vraisemblablement sous les décombres, dans l'attente d'être secourus ou récupérés », a indiqué l'UNRWA.

Dans un contexte de pénuries désespérées de toutes les fournitures humanitaires, l'OCHA a indiqué que dimanche, quelque 100 camions d'aide sont arrivés dans l'enclave, ainsi que 69.000 litres de carburant. Les mêmes quantités sont arrivées à Gaza samedi, a indiqué le bureau d'aide humanitaire de l'ONU, notant que ce chiffre était encore « bien inférieur » à la moyenne quotidienne de 170 camions et 110.000 litres de carburant livrés pendant la pause des combats entre le 24 et le 30 novembre.

« C'est trop peu, c'est beaucoup trop peu », a dit le Dr Peeperkorn de l'OMS, qui a indiqué qu'au milieu du « désastre croissant » de Gaza, davantage de médicaments, de nourriture, d'eau et de carburant étaient nécessaires.

Décrivant l'infrastructure de santé de Gaza comme « paralysée » avec « pratiquement aucun établissement de santé fonctionnel dans le nord », à l'exception de l'hôpital Al-Ahli qui a accueilli de nombreux cas de traumatisme et souffert d'un manque de fournitures, le responsable de l'OMS a exprimé sa profonde inquiétude quant au fait que les mêmes scènes désespérées pourraient se répéter dans le sud.

La détresse des patients

D'une capacité de 3.500 lits avant l'escalade du 7 octobre, l'enclave n'en compte plus que 1.500, a-t-il expliqué.

« Si vous regardez autour de vous, il n'y a presque plus d'hôpital là-bas (dans le nord). Donc, nous avons vu ce qui s'est passé dans le nord de Gaza et bien sûr, nous sommes profondément préoccupés par le fait que cela ne peut pas être – cela ne devrait pas être – la même situation dans le sud. »

Le responsable de l'OMS a également confirmé que des fournitures médicales avaient été acheminées de deux entrepôts de Khan Younis à Rafah dimanche. Cela faisait suite à des indications selon lesquelles les installations de stockage se trouvaient « dans une zone où la population avait reçu l'ordre d'évacuer et deviendrait très probablement une zone de combat actif dans les prochains jours », a-t-il expliqué.