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Soudan : risques d’ethnicisation du conflit et de débordements régionaux, met en garde l’ONU

Des femmes et des filles ayant fui le conflit au Soudan reçoivent une assistance de l'UNFPA dans le camp de Toumtouma, à l'est du Tchad.
© UNFPA Chad/Muriel Kobena
Des femmes et des filles ayant fui le conflit au Soudan reçoivent une assistance de l'UNFPA dans le camp de Toumtouma, à l'est du Tchad.

Soudan : risques d’ethnicisation du conflit et de débordements régionaux, met en garde l’ONU

Paix et sécurité

La Sous-Secrétaire générale des Nations Unies pour l’Afrique a mis en garde contre la possibilité d’une guerre ethnique prolongée au Soudan, avec d’éventuels débordements au niveau régional, lors d’une réunion du Conseil de sécurité mercredi. 

Alors que plus de 100 jours se sont écoulés depuis le début des combats entre les Forces armées soudanaises et les Forces d’appui rapide, « sans qu’aucune des parties n’ait réalisé de gains significatifs », Martha Ama Akyaa Pobee a indiqué aux membres du Conseil que les combats se poursuivent sans relâche dans diverses régions, notamment à Khartoum, Bahri, Omdurman et au Darfour, occasionnant de grandes souffrances pour les populations. 

Au Darfour, a souligné la haute fonctionnaire, les affrontements « rouvrent de vieilles blessures liées aux tensions ethniques des conflits passés », ce qui pourrait rapidement plonger le pays « dans un conflit ethnique prolongé, avec des débordements régionaux ».

Dans ce contexte, Mme Pobee s’est réjouie de la convocation par le Tchad d’un groupement d’acteurs darfouriens pour faire face à la situation dans la région, appelant à ce que ce type d’initiative soit privilégiée avec la participation d’un large éventail de parties prenantes, des groupes armés aux chefs tribaux, en passant par la société civile et les organisations de femmes. 

Martha Ama Akyaa Pobee, Sous-Secrétaire générale pour l'Afrique, informe les membres du Conseil de sécurité de l'ONU (photo d'archives).
UN Photo/Eskinder Debebe
Martha Ama Akyaa Pobee, Sous-Secrétaire générale pour l'Afrique, informe les membres du Conseil de sécurité de l'ONU (photo d'archives).

Attaques contre les civils

Faisant état d’attaques aveugles contre les civils, en particulier à Khartoum, au Darfour et au Kordofan méridional, mais aussi de violences sexuelles à grande échelle, d’enlèvements et de meurtres systématiques de défenseurs des droits humains au Darfour et à Khartoum, la Sous-Secrétaire générale a appelé les parties à mettre fin à ces violations et à diligenter des enquêtes. Elle a ajouté que la Mission intégrée des Nations Unies pour l’assistance à la transition au Soudan (MINUATS) a dénoncé les attaques « à motivation ethnique » menées dans l’ouest du Darfour, ainsi que les pillages et les viols systématiques commis dans la région. 

La MINUATS est déterminée à soutenir les efforts déployés par l’Union africaine (UA) et l’Autorité intergouvernementale pour le développement (IGAD) pour mettre fin au conflit, a assuré Mme Pobee, avant de se féliciter du rôle de facilitateurs joué par les États-Unis et l’Arabie saoudite dans les négociations entre les parties à Djedda. 

Applaudissant également l’initiative de paix des pays voisins du Soudan, elle a souligné que le fil conducteur de ces actions est l’appel à une cessation permanente des hostilités, à l’amélioration de l’accès humanitaire et au lancement d’un processus politique inclusif. 

Catastrophe humanitaire

La priorité du moment est toutefois de répondre à la « catastrophe humanitaire » en cours au Soudan, a averti la Directrice de la Division des opérations et du plaidoyer du Bureau de la coordination des affaires humanitaires (OCHA), de retour d’une visite dans le pays.

Depuis le début des hostilités, plus de 4 millions de personnes ont été contraintes de fuir la violence, dont 3,2 millions de déplacés et près de 900.000 réfugiés au Tchad, en Égypte, au Soudan du Sud et ailleurs, a précisé Edem Wosornu.

Au Soudan même, 20 millions de personnes, soit 40% de la population, sont confrontées à des niveaux élevés d’insécurité alimentaire aiguë, le conflit perturbant les moyens de subsistance et l’accès aux marchés, a-t-elle alerté. 

En quatre mois de conflit, quelque 2,9 millions de personnes ont reçu une forme d’aide humanitaire dans l’ensemble du pays, a poursuivi la responsable de l’OCHA, selon laquelle les livraisons limitées n’ont été possibles que grâce à des négociations intensives avec les parties, notamment dans le cadre du processus de Djedda. 

Au-delà de ces difficultés inhérentes au conflit, Mme Wosornu a exhorté la communauté internationale à soutenir les efforts de l’ONU, rappelant que le plan de réponse humanitaire de 2,6 milliards de dollars pour cette année n’est financé pour l’heure qu’à 24%.    

Le Représentant du Soudan auprès des Nations Unies a déclaré pour sa part que Khartoum est pleinement engagé à coopérer avec l’ONU pour garantir l’accès humanitaire à ceux qui en ont besoin.

Il a loué les efforts de son gouvernement pour accélérer les fournitures d’aide via Port-Soudan et la frontière avec le Tchad. Il a toutefois averti que les Forces armées soudanaises respecteront le processus de Djedda, à vocation humanitaire, « si les groupes rebelles ont font autant ».