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La crise croissante de l'eau a un impact sur les oiseaux migrateurs

Journée mondiale des oiseaux migrateurs
UNEP/AEWA
Journée mondiale des oiseaux migrateurs

La crise croissante de l'eau a un impact sur les oiseaux migrateurs

Climat et environnement

L'eau et son importance pour les oiseaux migrateurs - ainsi que les menaces croissantes qui pèsent sur la qualité et la quantité de l'eau - sont cette année au cœur de la Journée mondiale des oiseaux migrateurs, une campagne mondiale qui vise à sensibiliser le public aux oiseaux migrateurs et à la nécessité d'une coopération internationale pour les protéger.

« L'eau est essentielle au maintien de la vie sur notre planète », a rappelé Jacques Trouvilliez, Secrétaire exécutif de l'Accord sur la conservation des oiseaux d'eau migrateurs d'Afrique-Eurasie (AEWA) dans un entretien accordé à ONU info. « La crise actuelle que nous vivons concernant la disponibilité en eau affecte non seulement les humains, mais aussi la majorité des êtres vivants, dont les oiseaux ».

« Beaucoup d'oiseaux sont liés à l'eau comme habitats, comme lieux de vie. Les oiseaux d'eau notamment – comme les canards, les flamants roses, les bécasseaux - ont besoin de ces habitats, de ces zones humides, pour vivre, soit pour se reproduire, soit pour y passer la saison de reproduction et l'hivernage », a-t-il ajouté.

Malheureusement avec d'une part le changement climatique et une pression exacerbée sur les ressources en eau dans certaines zones de la planète, on voit les zones humides se réduire. « Les oiseaux ont moins d'habitats pour vivre et leur population diminue », a déploré M. Trouvilliez. « Dans le même temps lorsque ces habitats se réduisent on a aussi une plus forte concentration d'oiseaux et depuis deux ans, on voit apparaître dans beaucoup d'endroits des flambées de grippe aviaire qui ont un impact aussi sur l'économie ».

Un homme regarde l'Atlantique depuis les cotes de la Mauritanie, pays du Sahel, situé au sud du désert du Sahara
© PNUD Mauritania/Freya Morales
Un homme regarde l'Atlantique depuis les cotes de la Mauritanie, pays du Sahel, situé au sud du désert du Sahara

Les écosystèmes aquatiques menacés

35% des zones humides de la planète, essentielles aux oiseaux migrateurs, ont disparu au cours des 50 dernières années. Ainsi le Grand Lac Salé de l'Utah, le plus grand lac salé de l'hémisphère occidental, utilisé par plus d'un million d'oiseaux de rivage, risque de disparaître d'ici cinq ans.

Dans le bassin Amur-Heilong, en Asie, le changement climatique amplifie l'impact de la destruction des habitats en épuisant les systèmes hydrologiques naturels et en privant les oiseaux migrateurs d'escales et de sites de reproduction vitaux. 

De plus, des rapports récents révèlent que 48% des espèces d'oiseaux dans le monde subissent un déclin de leur population.

Un autre exemple est celui de la mer d'Aral, partagée par le Kazakhstan et l'Ouzbékistan. Autrefois quatrième plus grand lac du monde, elle est largement considérée comme l'une des pires catastrophes environnementales liées à l'eau de la planète. « Tout le monde a en tête probablement les photos de ces bateaux qui gisent sur le sable sans plus jamais voir d'eau », a rappelé Jacques Trouvilliez.

Les conséquences ont été graves pour les communautés vivant autour du lac, mais aussi pour les oiseaux migrateurs, qui ont perdu d'importantes sources de nourriture et un point d'arrêt d'une importance capitale durant leur voyage.

« On voit ces zones humides se rétrécir », a-t-il indiqué. Aussi au Sahel, une vaste région semi-aride d'Afrique, les périodes prolongées de sécheresse, la déforestation et le surpâturage ont entraîné la dégradation du sol et la perte de végétation, menaçant la survie de la population humaine locale et de la faune, y compris les oiseaux migrateurs. « Le lac Tchad était une des zones humides les plus importantes d’Afrique en 1960, et accueillait énormément d'oiseaux pendant la période d'hiver pour l'hémisphère nord et on avait donc des millions de canards, des bécasseaux qui vivaient autour du lac », a-t-il expliqué. Mais en 70 ans il a perdu 90% de sa surface réduisant les ressources en eau pour les communautés locales et pour de nombreux oiseaux migrateurs.

Une étude récente prévoit qu'une partie de l'Afrique, tout autour du bassin méditerranéen, risque de subir des crises de l'eau extrêmement importantes. « Sans parler bien sûr du Moyen-Orient ou des inquiétudes sur le Nil. Donc on voit que c'est un phénomène réellement planétaire ».

Un oiseau migrateur buvant de l'eau
ONU News PT
Un oiseau migrateur buvant de l'eau

Pollution de l’eau et pollution plastique

La qualité de l'eau a un impact direct sur l'abondance et la diversité de la nourriture dont les oiseaux migrateurs ont besoin pour survivre. La pollution de l’eau va rendre impropre l'eau à la consommation, que ce soit pour les oiseaux ou les humains. Par exemple, « les dégazages de produits pétroliers effectués de façon volontaire au large des côtes affectent les oiseaux, les oiseaux marins comme les oiseaux d'eau ».

Le plastique, les produits chimiques toxiques et d'autres polluants contaminent aussi les rivières, les lacs et les océans, affectant directement et indirectement les oiseaux migrateurs. « Tout plastique jeté dans la nature a toutes les chances, via les cours d'eau de rejoindre l'océan. Et on voit de plus en plus d’oiseaux qui ingèrent ces plastiques et qui en meurent. On a dans de nombreux cas des albatros ou d'autres espèces d'oiseaux qui deviennent extrêmement sensibles à cette pollution par le plastique », a expliqué M. Trouvilliez.

Pour lui, il faut réfléchir à un meilleur partage de l’eau tout en conservant les habitats naturels non seulement pour les citoyens mais aussi pour les oiseaux migrateurs. « Les actions sont nombreuses et elles doivent concerner à la fois les gouvernements, mais nous aussi, en tant que citoyens ».

Il a suggéré d’éviter tout gaspillage : « Eviter que les robinets fuient, préférer des douches à des bains. Il y a énormément de petites actions qui font que chaque goutte d'eau sauvegardé par chaque personne va constituer de belles rivières et contribuer à alimenter les zones humides ».

Les oiseaux migrateurs de la zone humide de Chilka au village de Mangalajodi dans le district de Khurdha à Odisha, en Inde.
© UNICEF/Dhiraj Singh
Les oiseaux migrateurs de la zone humide de Chilka au village de Mangalajodi dans le district de Khurdha à Odisha, en Inde.

Journée mondiale

La Journée mondiale des oiseaux migrateurs est un appel international à l'action pour la protection des oiseaux migrateurs, dont les aires de répartition s'étendent souvent sur plusieurs pays et qui sont confrontés à de nombreuses menaces différentes dans le monde entier.

La Journée mondiale des oiseaux migrateurs vise à sensibiliser le public aux oiseaux migrateurs et aux questions liées à leur conservation. La campagne souligne l'importance de la coopération internationale et encourage les actions nationales et locales visant à protéger les oiseaux migrateurs et leurs habitats. 

Cette campagne annuelle est organisée par la Convention sur la conservation des espèces migratrices appartenant à la faune sauvage (CMS), l'Accord sur la conservation des oiseaux d'eau migrateurs d'Afrique-Eurasie (AEWA), l'Environnement pour les Amériques (EFTA) et le Partenariat pour la voie de migration d’Asie de l'Est-Australasie (EAAFP).

Pour en savoir plus sur la campagne de la Journée mondiale des oiseaux migrateurs de cette année et sur les actions à entreprendre, consultez le site www.worldmigratorybirdday.org