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Soudan : le chef de l’ONU s’inquiète d’une situation « chaque jour plus préoccupante »

Des centaines de réfugiés soudanais reçoivent des kits de secours du HCR sur le site de Madjigilta dans la région du Ouaddaï au Tchad.
© UNHCR/Colin Delfosse
Des centaines de réfugiés soudanais reçoivent des kits de secours du HCR sur le site de Madjigilta dans la région du Ouaddaï au Tchad.

Soudan : le chef de l’ONU s’inquiète d’une situation « chaque jour plus préoccupante »

Aide humanitaire

Alors que de violents combats se poursuivaient vendredi au Soudan malgré une trêve acceptée par les deux parties au conflit, le Secrétaire général de l’ONU, António Guterres, a réclamé une nouvelle fois la cessation immédiate des hostilités dans ce pays, où la situation devient, selon lui, « chaque jour plus préoccupante ». 

« Les combats doivent cesser immédiatement, avant que ce conflit ne se transforme en une guerre civile qui pourrait detruire le pays et bouleverser la région pour les années à venir », a déclaré le chef de l’ONU, lors d’un point de presse suite à un entretien avec le Président du Burundi, Evariste Ndayishimiye, à Bujumbura.

M. Guterres est arrivé vendredi au Burundi pour prendre part, samedi, au 11ème sommet du Mécanisme régional de suivi de l’accord-cadre pour la paix, la sécurité et la coopération pour la République démocratique du Congo et la région.

Les combats doivent cesser immédiatement, avant que ce conflit ne se transforme en une guerre civile

Le Secrétaire général a appelé toutes les parties au Soudan à « désamorcer les tensions, venir à la table des négociations et convenir d'un cessez-le-feu stable et durable ». « Chacun doit faire passer les intérêts du peuple soudanais en premier », a-t-il ajouté.

Il a souligné que « le retour à la paix et à un régime civil sont indispensables, et ces objectifs sont au cœur de nos échanges avec les parties au conflit ». Et pour cela, l’ONU travaille « main dans la main » avec l'Union africaine et le groupe régional l'Autorité intergouvernementale pour le développement (IGAD).

Rappelant que le chef de l’humanitaire de l’ONU, Martin Griffiths, se trouvait jeudi encore au Soudan afin de s’assurer que l'aide puisse continuer d'affluer, même en l’absence d’un cessez-le-feu, le Secrétaire général a rappelé qu’un accès humanitaire « sûr et sans entrave doit être garanti, afin que l’aide puisse être immédiatement distribuée aux personnes dans le besoin ».

« Les populations et les infrastructures civiles doivent être protégées et le personnel humanitaire doit être respecté. J'appelle la communauté internationale à soutenir le peuple soudanais dans sa quête de paix et de retour à la transition démocratique », a-t-il ajouté. 

Des milliers de personnes sont arrivées à Metema, ville à la frontière entre le Soudan et l'Ethiopie, depuis le début des combats le 15 avril.
OIM
Des milliers de personnes sont arrivées à Metema, ville à la frontière entre le Soudan et l'Ethiopie, depuis le début des combats le 15 avril.

Le HCR demande aux Etats de ne pas renvoyer les Soudanais chez eux

De son côté, l’Agence des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) a appelé vendredi les gouvernements à garder les frontières ouvertes aux Soudanais et à ne pas les renvoyer dans ce pays.

Préoccupé par les hostilités en cours au Soudan, le Haut-Commissariat de l’ONU pour les réfugiés (HCR) a publié une nouvelle position sur les retours dans ce pays d’Afrique du Nord-Est. Celle-ci indique que les personnes fuyant le conflit au Soudan, ainsi que les ressortissants soudanais qui se trouvent à l’extérieur du pays et ne pouvant y retourner en raison du conflit, peuvent avoir besoin d’une protection internationale en tant que réfugiés.

Il se peut également que des ressortissants étrangers, ainsi que des apatrides et des personnes dont la nationalité est indéterminée, aient besoin d’une protection internationale et bénéficient d’autres formes de séjour légal au Soudan. Le HCR recommande qu’ils soient également orientés vers les procédures nationales d’asile lorsqu’ils recherchent une protection internationale.

Un éventail choquant de problèmes humanitaires et d’abus

« Nous conseillons aux gouvernements de ne pas renvoyer les gens au Soudan en raison du conflit qui s’y déroule et aussi parce qu’il s’agit d’un mouvement de réfugiés », a déclaré lors d’un point de presse à Genève, Elizabeth Tan, Directrice de la protection internationale au HCR.

« Il est probable que les besoins en matière de protection internationale soient élevés parmi les personnes qui fuient », a-t-elle ajouté relevant que les ressortissants soudanais dont les demandes de réfugiés ont été rejetées avant le conflit actuel peuvent maintenant avoir besoin d’une protection internationale.

Depuis le début des hostilités, le HCR a fait état d’un éventail choquant de problèmes humanitaires et de violations des droits de l’homme, y compris des attaques aveugles faisant des victimes et des blessés parmi les civils, des violences sexuelles, ainsi qu’une criminalité généralisée et le pillage des infrastructures civiles, y compris les marchés, les hôpitaux, les locaux et les biens humanitaires, ainsi que les propriétés privées.

Un grand nombre de civils ont été contraints de fuir les combats, y compris des personnes déjà déplacées à l’intérieur du pays en raison de conflits antérieurs au Soudan, et des réfugiés d’autres pays qui cherchaient à se mettre en sécurité au Soudan.

La situation au Soudan est en train de basculer vers la catastrophe

Outre les nouveaux déplacements internes, plus de 100.000 personnes, réfugiés soudanais et rapatriés, ont également fui le Soudan vers les pays voisins, notamment le Tchad, le Soudan du Sud, la République centrafricaine, l’Égypte et l’Éthiopie.

Le HCR indique être très préoccupé par le sort de quelque 1,1 million de réfugiés et de demandeurs d’asile d’autres nationalités qui ont été accueillis au Soudan. Les ressortissants du Soudan du Sud constituent le plus grand groupe de réfugiés au Soudan, qui accueille également d’importantes populations de réfugiés en provenance d’Érythrée, d’Éthiopie, de Syrie et du Yémen, entre autres.

Pour sa part, le Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF) s’inquiète de la situation au Soudan, qui est en train de basculer vers la catastrophe. « Les enfants sont de plus en plus pris entre deux feux », a déclaré dans un communiqué la Directrice exécutive de l’UNICEF, Catherine Russell.

L’agence onusienne indique avoir reçu « des informations selon lesquelles 190 enfants ont été tués et 1.700 autres blessés au Soudan depuis que le conflit a éclaté il y a près de trois semaines.

Selon l’UNICEF, les enfants vivent dans « un climat de violence terrifiant » depuis près de trois semaines, et d’innombrables familles se sont déplacées pour se mettre en sécurité au Soudan et au-delà de ses frontières.

Quelque 60% des centres de santé ne fonctionnent pas

Des travailleurs humanitaires ont également été attaqués, tandis que des installations, des véhicules et des fournitures humanitaires - y compris ceux de l’UNICEF - ont été pillés ou détruits. « Ces attaques compromettent notre capacité à fournir aux enfants de tout le pays des services de santé, de nutrition, d’eau qui leur sauveront la vie », a ajouté Mme Russell.

Face à ces violences, l’UNICEF appelle les parties au conflit à respecter leurs obligations légales en vertu du droit humanitaire international et à veiller à ce que les enfants ne soient pas pris dans la ligne de mire. Il s’agit notamment de mettre fin à toutes les attaques contre les centres de santé, les écoles, les systèmes d’approvisionnement en eau et d’assainissement et les autres infrastructures dont dépendent les enfants.

L’UNICEF demande également une solution politique à long terme à la crise, afin que les enfants du Soudan puissent grandir dans un environnement de paix et envisager un avenir plus prometteur.

Par ailleurs, près de 30 assauts contre des hôpitaux ont été lancés, selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS). Quelque 60% des centres de santé ne fonctionnent pas. Au total, des centaines de personnes sont décédées et des milliers d’autres ont été blessées.