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Une membre du personnel d'OCHA s'entretient avec des femmes déplacées dans la province orientale de Nangahar en Afghanistan.

Afghanistan : Guterres juge inacceptable l’interdiction de travailler pour les femmes

© UNOCHA/Charlotte Cans
Une membre du personnel d'OCHA s'entretient avec des femmes déplacées dans la province orientale de Nangahar en Afghanistan.

Afghanistan : Guterres juge inacceptable l’interdiction de travailler pour les femmes

Droits de l'homme

Le chef de l'ONU s'est engagé à ce que l'Organisation « ne reste jamais silencieuse » lorsque les droits des femmes et des filles sont attaqués, comme c'est le cas aujourd'hui en Afghanistan, et a déclaré que l'interdiction faite par les Talibans  aux femmes afghanes d'effectuer un travail humanitaire salvateur met en péril des millions de vies dans ce pays.

António Guterres s'est adressé aux journalistes à Doha, au Qatar, après avoir convoqué une réunion internationale des Envoyés spéciaux de divers pays et organisations pour l'Afghanistan.

Le Secrétaire général de l’ONU a indiqué qu'ils s'étaient mis d'accord sur la nécessité d'une « stratégie d’engagement qui permette de stabiliser l'Afghanistan », afin d'aider les personnes les plus vulnérables du pays.

Pas de reconnaissance des Talibans

M. Guterres a précisé que la réunion ne portait pas sur la reconnaissance des autorités de facto, mais plutôt sur l'élaboration d'une approche internationale commune des questions brûlantes et interdépendantes, telles que la présence persistante des terroristes dans le pays, la répression des droits humains et notamment les droits des femmes et des filles, ainsi que de l'expansion du trafic de drogue.

Les Nations Unies continueront à utiliser leur pouvoir de rassemblement pour promouvoir une approche tournée vers l'avenir, qui place le peuple afghan au premier plan

« Pour atteindre nos objectifs, nous ne pouvons pas nous désengager », a déclaré M Guterres ajoutant que « beaucoup ont demandé que l'engagement soit plus efficace et basé sur les leçons que nous avons tirées du passé ».

« Les Nations Unies continueront à utiliser leur pouvoir de rassemblement pour promouvoir une approche tournée vers l'avenir, qui place le peuple afghan au premier plan, et d'une manière complémentaire aux plateformes et initiatives régionales existantes », a précisé le chef de l’ONU.

Selon lui, l'interdiction faite le mois dernier par les chefs talibans aux femmes afghanes de travailler pour les Nations Unies - qui fait suite à une interdiction de travailler pour des ONG nationales et internationales – « est inacceptable et met des vies en danger ».

« Soyons clairs : nous ne resterons jamais silencieux face aux attaques systémiques et sans précédent contre les droits des femmes et des jeunes filles. Nous nous exprimerons toujours lorsque des millions de femmes et de filles sont réduites au silence et rendues invisibles », a martelé M. Guterres.

Intérêt collectif

Il s’est félicité du fait que les Envoyés, dont l'Envoyée spéciale des Nations Unies, Roza Otunbayeva, ont convenu qu'il était important de « comprendre les préoccupations et les limites de chacun, tout en convenant qu'il était dans l'intérêt de tous, et en premier lieu des Afghans, de travailler ensemble ».

Ils se sont mis d'accord sur « la nécessité d'une stratégie d'engagement permettant de stabiliser l'Afghanistan mais aussi de répondre à des préoccupations importantes ».

Bien que les pays accordent des priorités différentes aux droits humains, au terrorisme ou au trafic de drogue, « il est généralement admis que ces questions sont étroitement liées » et qu'elles doivent être considérées comme un tout.

​​​​​​​Le Secrétaire général António Guterres informe les journalistes à Doha, Qatar, sur la situation en Afghanistan.
© UNESCO/Khava Mukhieva
​​​​​​​Le Secrétaire général António Guterres informe les journalistes à Doha, Qatar, sur la situation en Afghanistan.

La plus grande crise humanitaire au monde

S'exprimant en sa qualité de Secrétaire général, M. Guterres a conclu en déclarant qu'il était « difficile de surestimer la gravité de la situation en Afghanistan. Il s'agit de la plus grande crise humanitaire au monde aujourd'hui ».

Un pourcentage stupéfiant de 97% de la population vit dans la pauvreté, avec 28 millions d'Afghans qui ont besoin d'une forme ou d'une autre d'aide humanitaire.

Le financement n'est pas au rendez-vous : le plan de réponse humanitaire qui demande 4,6 milliards de dollars n'est à ce jour financé qu’à hauteur de 6,4%.

La grande majorité du personnel de l'ONU qui apporte une aide vitale est composée de ressortissants afghans, a signalé le chef de l’ONU, soulignant que l'interdiction du travail des femmes « compromet délibérément le développement d'un pays qui a désespérément besoin de la contribution de tous pour parvenir à une paix durable et contribuer à la stabilité de la région ».

Rester et agir

M. Guterres a promis que les Nations Unies ne faibliraient jamais dans leur engagement à soutenir le peuple afghan, et que l'Organisation était déterminée à poursuivre son action afin de préserver cette fragile ligne de vie.

Au cours des dernières décennies, nous sommes restés sur place et nous avons tenu nos promesses. Et nous sommes déterminés à rechercher les conditions nécessaires pour continuer à tenir nos promesses.

Interrogé sur la possibilité de rencontrer les dirigeants talibans, le chef de l’ONU a répondu : « Lorsque le moment sera venu de le faire, je ne refuserai évidemment pas cette possibilité. Aujourd'hui, ce n'est pas le bon moment pour le faire ».

M. Guterres a ajouté qu'il s'investissait personnellement dans l'organisation d'une réunion de suivi des émissaires à une date ultérieure, qui permettrait d’« utiliser cette plateforme comme un lieu de convergence de tant d'initiatives différentes ».