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Dans une décharge de Tarhunah, en Libye, des corps identifiés dans plusieurs fosses communes (photo d'archives).

Les droits humains en Libye doivent rester sous les feux des projecteurs

CPI
Dans une décharge de Tarhunah, en Libye, des corps identifiés dans plusieurs fosses communes (photo d'archives).

Les droits humains en Libye doivent rester sous les feux des projecteurs

Droits de l'homme

En raison de la violence généralisée des acteurs armés, de l’impasse politique actuelle et des restrictions croissantes de l’espace civique, la situation des droits humains continue de se détériorer en Libye, a indiqué lundi le chef des droits de l’homme de l’ONU.

Le Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme, Volker Türk, s’est exprimé alors que la mission d’enquête indépendante sur la Libye, établie par le Conseil des droits de l’homme en juin 2020, a mis fin à ses opérations, remettant ses archives et les preuves qu’elle a recueillies au Bureau des droits de l’homme de l’ONU.

Selon M. Türk, il est essentiel que la communauté internationale redouble d’efforts pour faire en sorte que les responsables des violations passées rendent des comptes.

« Nous devons continuer à surveiller la réalité sur le terrain afin de prévenir de nouvelles violations. Les autorités libyennes, les groupes armés, les passeurs et les trafiquants d’êtres humains ne doivent pas supposer que les yeux de la communauté internationale ont désormais quitté la Libye », a affirmé M. Türk.

Créer un mécanisme distinct et autonome

Dans son rapport final, la mission d’enquête a recommandé que le Bureau des droits de l’homme des Nations Unies « établisse un mécanisme distinct et autonome doté d’un mandat permanent pour surveiller les violations flagrantes des droits de l’homme en Libye et en rendre compte, en vue de soutenir les efforts de réconciliation de la Libye et d’aider les autorités libyennes à mettre en place une justice transitionnelle et à rendre compte de leurs actes ». Le Haut-Commissaire a exprimé son soutien à cette recommandation.

M. Türk a également exprimé son soutien à la recommandation de la mission d’enquête aux autorités libyennes d’élaborer sans délai un plan d’action en matière de droits de l’homme et une feuille de route globale, axée sur les victimes, sur la justice transitionnelle et l’obligation de rendre des comptes. Le Bureau des droits de l’homme des Nations Unies s’est engagé à travailler en étroite collaboration avec les autorités sur ce point, a souligné M. Türk.

Soulignant l’importance d’organiser des élections nationales et d’œuvrer pour une paix durable en Libye, M. Türk a exprimé sa profonde inquiétude face à l’intensification des mesures de répression contre la société civile, dont la dernière en date est un décret gouvernemental déclarant illégales toutes les organisations nationales et internationales de la société civile enregistrées après 2011.

Les abus se poursuivent sans relâche

« Les réglementations concernant la société civile devraient respecter les droits fondamentaux de la liberté de réunion et d’association, et non pas étouffer et criminaliser le travail de ceux qui œuvrent pour un avenir fondé sur les droits pour la Libye », a fait valoir le chef des droits de l’homme de l’ONU.

De son côté, la Mission d’établissement des faits sur la Libye a souligné que la situation en Libye reste « très grave ». Les violations se poursuivent sans relâche, les libertés fondamentales et la situation des droits de l’homme se sont détériorées.

Comme déjà indiqué dans son récent rapport, la Mission d’enquête a trouvé des motifs raisonnables de croire que des crimes contre l’humanité ont été commis contre des Libyens et des migrants dans toute la Libye dans le contexte de la privation de liberté depuis 2016. « Nous regrettons que ces crimes continuent d’être commis jusqu’à aujourd’hui », a dit Mohamed Auajjar, Président de la Mission d’enquête indépendante sur la Libye.

« Salafistes » dans les structures de l’État

La Mission indique avoir documenté et fait des constatations sur de nombreux cas de détention arbitraire, de meurtre, de torture, de viol, de réduction en esclavage, d’esclavage sexuel et de disparition forcée, confirmant leur pratique généralisée en Libye. Dans son évaluation des preuves sur le traitement des migrants, la mission a conclu qu’il y avait des motifs raisonnables de croire que l’esclavage sexuel, en tant qu’acte sous-jacent supplémentaire de crime contre l’humanité, était commis à l’encontre des migrants.

L’absorption rapide, profonde et continue de groupes armés et de leurs dirigeants dans les structures et institutions affiliées à l’État, y compris les Forces armées arabes libyennes, et la propagation d’idéologies conservatrices de tendance salafiste sont des sujets de préoccupation importants pour la Mission.

Les enquêteurs indépendants de l’ONU ont d’ailleurs constaté que les autorités de l’État et les entités affiliées, telles que l’Appareil de dissuasion pour la lutte contre le crime organisé et le terrorisme, les Forces armées arabes libyennes, l’Agence de sécurité intérieure et l’Appareil de soutien à la stabilité, ainsi que leurs dirigeants, ont été impliqués à plusieurs reprises dans des violations et des abus survenus dans le contexte de la détention.