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Diplomatie préventive : « La prévention est absolument indispensable à une paix durable » – Guterres

Des Casques bleus de la MINUSMA s'entretiennent avec la population locale pour connaître leurs difficultés et apporter des solutions lors d'une patrouille dans le village de Bara situé à 85 km de la ville de Gao, au nord-est du Mali.
MINUSMA/Harandane Dicko
Des Casques bleus de la MINUSMA s'entretiennent avec la population locale pour connaître leurs difficultés et apporter des solutions lors d'une patrouille dans le village de Bara situé à 85 km de la ville de Gao, au nord-est du Mali.

Diplomatie préventive : « La prévention est absolument indispensable à une paix durable » – Guterres

Paix et sécurité

A l’occasion d’un débat au Conseil de sécurité sur le rôle de la diplomatie préventive pour maintenir la paix et la sécurité dans le monde, le Secrétaire général de l’ONU, António Guterres, a estimé mardi que la prévention n’était pas un outil politique mais « une voie réaliste vers la paix ».

Devant les membres du Conseil de sécurité, le chef de l’ONU a regretté que la prévention ne bénéficie pas toujours de l’attention qu’elle mérite. Selon lui, cela s’explique peut-être par le fait qu’il est difficile de mesurer les résultats d'un conflit évité.

« Mais la prévention est absolument indispensable à une paix durable. Et la prévention est la raison de l’existence des Nations Unies », a-t-il ajouté.

C’est parce que la prévention est essentielle et que le conflits ne sont pas inévitables que le Secrétaire général l’a mise au centre de son premier et de son second mandat.

« Nous savons que la diplomatie préventive fonctionne », a-t-il déclaré devant les membres du Conseil de sécurité.

Il a rappelé qu’il utilise ses bons offices - parfois publiquement, parfois en coulisses - pour chercher à désamorcer des conflits et à faire progresser la paix.

« Une partie centrale de notre stratégie de prévention consiste à travailler avec des organisations régionales et sous-régionales », a-t-il souligné, citant notamment l'Union africaine, l’Association des Nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN) et l’Union européenne.

Un élément essentiel de cette collaboration est d’aider à préparer et garantir des élections pacifiques, comme par exemple les élections passées à Madagascar, en République démocratique du Congo, et en République centrafricaine.

Le Secrétaire général de l'ONU, António Guterres, devant le Conseil de sécurité.
Photo : ONU/Manuel Elias
Le Secrétaire général de l'ONU, António Guterres, devant le Conseil de sécurité.

Accompagner la transition politique au Mali

Le Secrétaire général a également cité les efforts au Mali, où l’ONU, avec la Communauté économique des États de l'Afrique de l'Ouest (CEDEAO) et ses partenaires, accompagne la transition politique pour assurer un retour pacifique et rapide à l'ordre constitutionnel.

« Dans la région des Grands Lacs, mon Envoyé spécial s'attache à renforcer la confiance mutuelle entre les pays et les dirigeants », a également noté M. Guterres, qui a cité, en outre, les efforts de son Coordonnateur spécial pour le développement au Sahel, qui « travaille main dans la main avec toutes les entités pour construire la paix et soutenir les populations de cette sous-région ».

M. Guterres s’est dit fier du travail de l’Organisation mais a estimé qu’il fallait renforcer tous les outils de la diplomatie préventive à l'avenir, comme le propose l'Agenda pour la paix.

« Cela signifie des systèmes d'alerte précoce et des outils de prospective stratégique plus solides, notamment de meilleures données et analyses, afin que nous puissions développer une compréhension commune des menaces pour détecter et éviter les crises imminentes » a-t-il dit. « Cela signifie des capacités de médiation renforcées - les premières lignes de nos efforts diplomatiques pour construire la paix dans les communautés du monde entier ».

En conclusion, le Secrétaire général a rappelé que « la prévention n’est pas un outil politique – mais une voie réaliste vers la paix ».

« Pour que la diplomatie préventive et le développement contribuent à la paix à laquelle nous aspirons tous, nous avons besoin du soutien total de ce Conseil, et même de tous les États Membres », a-t-il ajouté.

Selon lui, il y a eu « trop d’occasions manquées en matière de prévention à cause de la méfiance entre États Membres sur leurs motivations respectives ».

« Une paix durable exige un travail constant avec les dirigeants, les communautés et tous les partenaires afin de construire la stabilité que seul le développement inclusif peut apporter », a-t-il déclaré.

Liens entre facteurs socio=économiques et conflits

De son côté, le Président de l'Assemblée générale, Abdulla Shahid, a estimé qu'au fil des décennies, l'ONU en a appris davantage sur le lien entre les facteurs socio-économiques et les conflits.

Il a noté que la pandémie de Covid-19 exacerbe les inégalités, que les crises climatiques entraînent des déplacements et que des institutions inefficaces privent les gens d'espoir.

Par ailleurs, l'absence de participation démocratique, de libertés politiques et d'égalité prive des populations entières de leurs droits humains.

Alors que la sécurité mondiale relève du Conseil de sécurité, il a estimé qu'elle peut être complétée par les efforts de l'Assemblée générale et du Conseil économique et social (ECOSOC) pour construire des communautés plus résilientes et plus prospères.

Le Président de l'ECOSOC, Collen V. Kelapile, a rappelé le mandat de cet organe de promouvoir le progrès économique et social de tous les peuples, de protéger les droits humains et de superviser le systèmes humanitaires et de développement, en établissant des liens avec la prévention des conflits.

La souffrance se poursuit dans la région du Sahel en Afrique « en raison de l'incapacité à apprécier l'interaction complexe de la survie humaine, dans un environnement très fragile et culturellement diversifié », a-t-il déclaré.

Et l'extrême pauvreté au Soudan du Sud est enracinée dans plus de 50 ans de conflit, tandis que les vastes défis d'Haïti découlent des inégalités historiques et structurelles, des déficits de gouvernance et de la vulnérabilité au changement climatique.

Cependant, malgré les mandats interdépendants de l'ONU pour faire face à de telles crises, les interactions entre elles sont restées sporadiques et ponctuelles. « Les défis complexes d'aujourd'hui nécessitent une collaboration plus institutionnalisée », a souligné M. Kelapile.

Règlement des différends à la « Cour mondiale »

S’exprimant également devant le Conseil de sécurité, la Présidente de la Cour internationale de justice (CIJ), Joan E. Donoghue, a exploré les moyens par lesquels la CIJ peut contribuer à la prévention des conflits.

Elle a déclaré que les États peuvent recourir à la Cour comme moyen de règlement des différends pour désamorcer les tensions sur les ressources, les frontières terrestres ou maritimes ou d'autres sources de conflit potentiel.

Bien que les circonstances et les exigences de chaque cas varient, Mme Donoghue a déclaré que tous les principaux organes des Nations Unies ont la possibilité, dans leurs compétences respectives, d'aider à mettre en œuvre les arrêts de la Cour et de contribuer à la promotion de la paix, de la sécurité et de la justice.

« La Cour elle-même est prête à recevoir toute demande d'avis consultatif que pourraient formuler les organes et agences spécialisées des Nations Unies », a-t-elle affirmé.