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RCA : crise alimentaire en vue pour plus de 630.000 personnes à l’approche de la période de soudure (ONU)

Reporter et animatrice centrafricaine de Guira FM, Merveille Noella Mada-Yayoro tient un enfant dans le camp de déplacés de Birao.
MINUSCA
Reporter et animatrice centrafricaine de Guira FM, Merveille Noella Mada-Yayoro tient un enfant dans le camp de déplacés de Birao.

RCA : crise alimentaire en vue pour plus de 630.000 personnes à l’approche de la période de soudure (ONU)

Aide humanitaire

Au moins 80.000 enfants de moins de cinq ans sont actuellement menacés de malnutrition aiguë sévère en République centrafricaine (RCA), soit une augmentation de près d’un tiers par rapport aux projections pour 2021, ont alerté, jeudi, deux agences onusiennes.

Selon le Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF) et le Programme alimentaire mondial des Nations Unies (PAM), plus de 630.000 personnes - soit plus d’une personne sur huit - tomberont dans « une situation de faim catastrophique » entre la première semaine de juillet et la fin de la période de soudure si aucune action urgente n’est entreprise. Dans tout le pays, 40% des enfants de moins de cinq ans souffrent déjà de malnutrition chronique, un taux supérieur au seuil d’urgence de 30%.

D’après les données les plus récentes recueillies auprès des partenaires humanitaires, en moyenne plus de 2% des enfants de ces zones souffrent de malnutrition aiguë sévère. Ces chiffres atteignent plus de 3% dans les camps de déplacés autour de Bouar, près de la frontière avec le Cameroun.

Des niveaux alarmants de malnutrition aiguë sévère chez les enfants de moins de cinq ans dans 27 localités

« Nous sommes extrêmement préoccupés par l’impact de la crise actuelle sur la vie des enfants et des femmes, en particulier ceux qui étaient déjà dans un état d’extrême vulnérabilité après avoir été forcés de fuir leur maison, ou qui vivent dans des zones difficiles à atteindre ou isolées », a déclaré la représentante de l’UNICEF en RCA, Fran Equiza.

En raison de l’impact combiné de la violence, de l’insécurité, des déplacements de population, de l’accès limité aux services d’alimentation, de santé, d’eau et d’assainissement, de la hausse des prix des denrées alimentaires, ainsi que des répercussions socio-économiques de la pandémie de Covid-19, 27 localités réparties dans 14 districts sanitaires du pays présentent actuellement des niveaux alarmants de malnutrition aiguë sévère chez les enfants de moins de cinq ans.

« Si nous ne sommes pas en mesure d’accéder en toute sécurité et en temps voulu aux mères et aux enfants et de leur fournir les services de nutrition dont ils ont besoin, notamment l’accès à la nourriture et à la santé, beaucoup risquent de mourir de malnutrition ou de maladies évitables », a prévenu Mme Equiza.

Depuis la dernière vague de violence liée aux récentes élections, les taux de malnutrition en RCA ont continué à grimper en flèche. Et les plus impactées restent les populations déplacées et celles vivant dans les zones touchées par le conflit, où l’accès aux services essentiels de santé, d’eau et d’assainissement et de nutrition était déjà limité et s’est encore restreint.

Le défi de l’accès humanitaire et du financement

Dans ces zones, l’émergence potentielle de la rougeole, du paludisme, de la pneumonie et de la diarrhée peut avoir un effet dévastateur sur les enfants et les mères mal nourris. « La situation de la sécurité alimentaire est alarmante et indique clairement que de nombreuses personnes vulnérables pourraient rapidement tomber dans une situation catastrophique », a déclaré Peter Schaller, teprésentant du PAM en RCA.

Comme pour aggraver la situation sur le terrain, l’environnement opérationnel devient également « plus compliqué avec la perte d’espace humanitaire due au conflit en cours ». « Nous avons besoin d’un accès humanitaire et d’un financement pour fournir l’aide indispensable aux personnes touchées », a ajouté M. Schaller.

Face à cette « crise alimentaire alarmante », le PAM fournit actuellement une aide alimentaire et nutritionnelle à quelque 800.000 personnes. Une aide qui cible des déplacés internes, des réfugiés, des rapatriés, ainsi que des communautés hôtes. L’agence onusienne fournit également une aide d’urgence aux points chauds afin d’atténuer les souffrances des familles touchées.

Le risque d’une réduction des rations alimentaires ou d’une interruption des activités

Le PAM prévoit également d’atteindre au moins 50.000 enfants souffrant de malnutrition aiguë modérée dans les points chauds. Dans ces zones, l’aide est apportée à environ 90.000 enfants âgés de 6 à 23 mois, ainsi que 150 000 femmes enceintes et allaitantes avec des programmes d’alimentation complémentaire au niveau communautaire, dans les zones où les taux de retard de croissance sont supérieurs à 30%.

De son côté, l’UNICEF et ses partenaires ont traité depuis le début de l’année au moins 12.000 enfants souffrant de malnutrition aiguë sévère, notamment dans les zones les plus touchées et dans les camps de déplacés. Cependant, les services de nutrition continuent d’être perturbés par le conflit.

A la fin du mois de mai 2021, 77 unités de nutrition - soit une sur cinq - et 30 établissements de santé étaient fermés - dont 14 ont été attaqués - et une douzaine de cliniques mobiles restaient temporairement fermées dans tout le pays. L’autre défi reste le déficit de financement, qui pourrait conduire à une réduction des rations alimentaires. Ce qui mènerait à ne donner la priorité qu’aux personnes les plus vulnérables ou, dans le pire des cas, à une interruption des activités par manque de ressources.

Sur son budget de 15 millions de dollars consacré à la nutrition, l’UNICEF n’a reçu que 45% des fonds nécessaires. Idem pour le PAM qui a reçu moins de la moitié de son appel de fonds d’un montant évalué à plus de 200 millions de dollars.