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Haïti : impasse politique alors que les besoins humanitaires augmentent, à l'approche d'élections cruciales

Une grand-mère et un enfant déplacés à Tabarre Issa, à Port-au-Pince, en Haïti.
© UNICEF/Manuel Moreno Gonzalez
Une grand-mère et un enfant déplacés à Tabarre Issa, à Port-au-Pince, en Haïti.

Haïti : impasse politique alors que les besoins humanitaires augmentent, à l'approche d'élections cruciales

Paix et sécurité

Face à la détérioration des conditions socio-économiques, à l'augmentation de la violence des gangs criminels et à la résurgence de la Covid-19, les dirigeants haïtiens doivent s'engager dans un dialogue de bonne foi visant à mettre fin à une impasse politique prolongée et préjudiciable, a déclaré jeudi devant le Conseil de sécurité la principale responsable de l'ONU dans le pays.

Helen La Lime, la Représentante spéciale du Secrétaire général pour Haïti et cheffe du Bureau intégré de l'ONU dans le pays (BINUH), a également exprimé sa profonde inquiétude face à la « polarisation croissante de la politique haïtienne » et à la tendance croissante de certains acteurs à recourir à la violence.

Des conditions qui se détériorent

Notant les efforts d'Haïti pour se préparer à une série d'élections plus tard en 2021, y compris au niveau présidentiel, Mme La Lime a déclaré que les conditions dans le pays se sont détériorées au cours des dernières semaines.

Une recrudescence des cas de Covid-19 a incité les autorités à déclarer un nouvel état d'urgence sanitaire et a par conséquent conduit le Conseil électoral provisoire à reporter le référendum constitutionnel proposé, qui devait avoir lieu à la fin du mois de juin.

Ces derniers mois ont également été marqués par plusieurs incidents sécuritaires inquiétants et de graves violations des droits de l'homme perpétrées par des gangs contre des civils.

Entre-temps, une recrudescence de la violence entre gangs a provoqué le déplacement de centaines de familles dans plusieurs quartiers pauvres de Port-au-Prince et a renforcé le sentiment d'insécurité qui imprègne la société haïtienne, a expliqué l'envoyée de l'ONU.

Malgré plusieurs efforts de médiation menés par les Haïtiens, « la crise politique profonde qui a secoué le pays pendant la majeure partie des quatre dernières années ne montre aucun signe d'apaisement » et la rhétorique utilisée par certains dirigeants politiques est de plus en plus acrimonieuse.

Débat sur les changements constitutionnels

Parmi les autres défis politiques majeurs, Mme La Lime a cité le débat en cours sur un projet de référendum qui introduirait des changements importants dans la Constitution actuelle d'Haïti, adoptée en 1987. Ceux-ci incluraient une clause permettant à un président de se présenter pour deux mandats consécutifs de cinq ans, sans la pause de cinq ans actuellement requise.

Soulignant que ces débats ne doivent pas nuire à l'organisation et à la tenue en temps voulu des scrutins parlementaires et locaux, ainsi que de l'élection présidentielle, Mme La Lime a plaidé en faveur d'un consensus politique, qui constitue la meilleure voie possible.

« Alors qu'Haïti se prépare à entrer dans un nouveau cycle électoral, un processus inclusif et participatif sera essentiel pour consolider la voie vers la bonne gouvernance et la stabilité politique dans le pays », a-t-elle souligné.

Manque de financement

Malgré la complexité de la situation, l'équipe des Nations Unies en Haïti - dirigée par le BINUH - continue de travailler main dans la main pour aider les autorités à relever les défis immédiats ainsi que les moteurs structurels de l'instabilité.

Mme La Lime a indiqué aux membres du Conseil que les priorités de son équipe comprennent plusieurs initiatives conjointes visant à mettre en œuvre la politique nationale de protection sociale, à catalyser la lutte contre l'impunité et la corruption et à rendre opérationnel le lien entre l'humanitaire, le développement et la paix.

Soulignant que le Plan de réponse humanitaire d'Haïti pour 2021-2022 est toujours confronté à un manque à gagner de 198 millions de dollars, elle a déclaré que 1,5 million de personnes dans le pays ont actuellement besoin d'un soutien humanitaire - dont 1,3 million sont en situation d'insécurité alimentaire grave.

Dans ce contexte, elle a lancé un appel au Conseil de sécurité et à tous les donateurs pour qu'ils renforcent leur soutien.