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Pointant des manquements graves dans la décision d'acquitter Vojislav Seselj, le Procureur du TPIY décide de faire appel

Le Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie (TPIY). Photo TPIY
Le Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie (TPIY). Photo TPIY

Pointant des manquements graves dans la décision d'acquitter Vojislav Seselj, le Procureur du TPIY décide de faire appel

Suite à l'acquittement du nationaliste serbe Vojislav Seselj par la Chambre de première instance du Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie (TPIY), le 31 mars 2016, le Procureur du Tribunal, Serge Brammertz, a annoncé mercredi que son bureau fera appel de la décision du tribunal, teintée selon lui de manquements graves à l'exercice de la justice.

« Après avoir examiné à l'écrit les motifs donnés par la majorité de la Chambre de première instance concernant l'acquittement de Vojislav Šešelj, mon Bureau a décidé de faire appel du jugement », a déclaré M. Brammertz dans un communiqué de presse. « Étant donné l'ampleur des erreurs que nous avons identifiées dans le jugement majoritaire, nous tenons à souligner aux victimes des crimes que cet appel est une priorité absolue pour ce Bureau ».

Le Procureur du TPIY a pointé du doigt ce qu'il a qualifié de « manquement fondamental de la majorité » du jury dans l'exercice de sa fonction judiciaire.

« La majorité a omis de statuer correctement sur les éléments essentiels de la thèse de l'accusation, y compris en ne tenant pas compte d'une grande partie du dossier de preuve ; en ne fournissant pas de motifs appropriés pour étayer ses conclusions ; en n'appliquant pas correctement la norme juridique 'au-delà de tout doute raisonnable' ; en omettant d'examiner les accusations portées contre Vojislav Seselj à la lumière de la nature généralisée des crimes établis ; en ne faisant pas la distinction entre l'objectif politique ultime poursuivi par les membres de l'entreprise criminelle commune et les moyens criminels employés pour y parvenir ; en faisant des constatations de fait déraisonnables et contradictoires ; et en n'appliquant pas correctement les éléments de modes de responsabilité, tels que l'entreprise criminelle commune et la complicité, conformément à la jurisprudence établie », a déclaré M. Brammertz.

Le Procureur du TPIY a également regretté que la majorité ait ouvert la voie à la possibilité de considérer que la conduite criminelle a pu n'être qu'une simple contribution légitime à l'effort de guerre, en dépit de l'ensemble des preuves disponibles prouvant le contraire.

« À notre avis, cela a conduit la majorité à créditer de façon déraisonnable la thèse selon laquelle : l'expulsion des civils était un geste humanitaire ; les discours de haine incendiaires servaient tout simplement à remonter le moral des forces serbes ; et le déploiement des forces de nettoyage ethnique était une mesure pour protéger la population serbe », a-t-il ajouté.

M. Brammertz a estimé que la conclusion de la majorité selon laquelle il n'y a eu aucune attaque généralisée ou systématique contre la population civile dans certaines parties de la Croatie et de la Bosnie-Herzégovine, un prérequis pour les accusations de crime contre l'humanité, manifeste un profond mépris pour le grand nombre de crimes démontrés lors du procès.

Le Procureur du TPIY a insisté sur son intention de faire en sorte que cet appel soit plaidé de manière efficace et équitable, conformément à la procédure d'appel prescrite dans le Mécanisme pour les Tribunaux pénaux internationaux.