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L'ONU exhorte la Thaïlande à enquêter sur au moins 82 cas de disparition forcée

Un magasin de produits électroniques à Bangkok, en Thaïlande. Photo ONU/Kibae Park
Un magasin de produits électroniques à Bangkok, en Thaïlande. Photo ONU/Kibae Park

L'ONU exhorte la Thaïlande à enquêter sur au moins 82 cas de disparition forcée

Le Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l'homme, Zeid Ra'ad Al Hussein, a exhorté mercredi le Gouvernement thaïlandais à prendre les mesures décisives nécessaires pour enquêter sur le sort d'au moins 82 personnes qui sont portées disparues, parmi lesquelles un avocat de renom, Somchai Neelapaijit, dont on est sans nouvelles depuis près de 12 ans.

Le Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l'homme, Zeid Ra'ad Al Hussein, a exhorté mercredi le gouvernement thaïlandais à prendre les mesures décisives nécessaires pour enquêter sur le sort d'au moins 82 personnes qui sont portées disparues, parmi lesquelles un avocat de renom, Somchai Neelapaijit, dont on est sans nouvelles depuis près de 12 ans.

M. Zeid a également appelé le gouvernement à mettre sa législation en conformité avec les normes internationales, en faisant des disparitions forcées un crime relevant des tribunaux pénaux, selon un communiqué de presse.

« Toutes les familles de personnes disparues ont le droit de savoir la vérité en ce qui concerne la disparition de leurs proches, et d'être informées de tout progrès ou des résultats des enquêtes », a-t-il déclaré.

Le 29 décembre 2015, la Cour suprême de Thaïlande a validé la décision d'une cour d'appel d'acquitter cinq policiers accusés d'être impliqués dans l'enlèvement et la disparition de Somchai, un avocat musulman disparu le 12 mars 2004 à une époque où il défendait des personnes arrêtées en vertu de la loi martiale en vigueur dans le sud du pays, région turbulente depuis plusieurs années. Les suspects avaient accusé les autorités de les avoir torturés lors de leur garde à vue.

Des témoins ont affirmé avoir vu Somchai être contraint par la force à monter dans une voiture, la nuit de sa disparition. Depuis lors, deux Premiers ministres en exercice ont appelé publiquement les responsables de l'application des lois à peser de tout leur poids pour faire aboutir l'enquête sur ce dossier.

Du fait que la loi thaïlandaise ne prévoit pas le crime consistant à faire disparaître de force une personne, les cinq policiers ont été jugés pour vol et coercition. L'un d'eux a été déclaré coupable mais les quatre autres ont été acquittés par le tribunal pénal de Bangkok en janvier 2006.

En 2011, la cour d'appel a annulé le verdict de culpabilité prononcé contre ce policier, estimé qu'il n'y avait pas assez d'éléments à charge pour condamner les quatre autres et affirmé que la famille de Somchai ne pouvait pas se porter partie civile. En dernier ressort, la Cour suprême a approuvé ces décisions. Or en droit international, les membres de la famille d'une personne victime d'une disparition forcée sont considérées comme victimes collatérales.

Le Haut-Commissaire s'est dit profondément déçu que la plus haute juridiction thaïlandaise n'ait pas tenu compte du fait que le tribunal de première instance avait déclaré Somchai comme étant une personne disparue, et que d'importants éléments de preuve n'avaient pas été pris en compte dans cette affaire.

« Le rôle du système judiciaire n'est pas seulement d'interpréter les lois et les procédures mais aussi de protéger et défendre les droits des citoyens. La Cour suprême de Thaïlande a raté une occasion de protéger les droits des victimes à la vérité, à la justice et à réparation dans les cas de disparition involontaire et forcée », a déclaré M. Zeid.

Il a également appelé le gouvernement thaïlandais à adopter une législation faisant des disparitions forcées un crime. « Il manque un cadre juridique et institutionnel adéquat pour permettre aux victimes et à leurs familles d'obtenir justice dans les cas de disparition forcée en Thaïlande », a-t-il dit.

Depuis 1980, le Groupe de travail des Nations Unies sur les disparitions forcées ou involontaires a enregistré 82 cas de disparition forcée en Thaïlande.

La Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées a été adoptée par l'Assemblée générale de l'ONU en 2006 et est entrée en vigueur en 2010. Jusqu'ici, elle a été ratifiée par 51 pays. La Thaïlande l'a signée en janvier 2012 mais ne l'a pas encore ratifiée.