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L'ONU appelle la communauté humanitaire à s'adapter pour répondre à l'augmentation des besoins

Le Secrétaire général adjoint aux affaires humanitaires et Coordonnateur des secours d'urgence, Stephen O’Brien, parle à une famille dans le camp de déplacés de Baharka, lors d'une visite de deux jours en Iraq en Juin 2015. Photo : OCHA Iraq
Le Secrétaire général adjoint aux affaires humanitaires et Coordonnateur des secours d'urgence, Stephen O’Brien, parle à une famille dans le camp de déplacés de Baharka, lors d'une visite de deux jours en Iraq en Juin 2015. Photo : OCHA Iraq

L'ONU appelle la communauté humanitaire à s'adapter pour répondre à l'augmentation des besoins

Face à l'écart grandissant entre les besoins humanitaires et les ressources disponibles, le Secrétaire général adjoint aux affaires humanitaires et Coordonnateur des secours d'urgence, Stephen O'Brien, a appelé mercredi l'Organisation à resserrer ses liens avec l'ensemble des acteurs humanitaires et du développement et à promouvoir le respect de la protection des civils en cas de conflit.

« Alors que j'endosse cette nouvelle fonction, je suis bien conscient des horreurs auxquelles sont confrontées des millions de personnes à travers le monde », a déclaré M. O'Brien à Genève, lors de l'ouverture du débat consacré aux affaires humanitaires du Conseil économique et social de l'ONU (ECOSOC).

« Au cours de ma toute récente visite en Iraq, j'ai rencontré des familles dont les histoires déchirantes faisaient état de peur, de vol, de perte et de chagrin », a poursuivi le Secrétaire général adjoint, qui s'était rendu dans le pays les 8 et 9 juin derniers.

Outre son expérience en Iraq, M. O'Brien a fait le tour d'horizon des principales crises humanitaires dans le monde à l'heure actuelle : au Yémen, environ 20 millions de personnes, soit 80% de la population, ont désormais besoin d'aide humanitaire, un nombre qu'il a qualifié d'« inimaginable » ; en Syrie, ce nombre s'élève à 12,2 millions, alors que parallèlement 7,6 millions de personnes ont été forcées de quitter leurs maisons et 4 millions d'entre elles ont quitté leur pays ; au Soudan du Sud, 4,6 millions de personnes font face à une insécurité alimentaire grave ; et en Ukraine, 1,3 million de personnes ont été forcées de fuir la violence.

« Ces chiffres et ces récits nous sont familiers. Mais nous entendons moins parler des 20 millions de personnes menacées par la faim dans le Sahel, dont 1,4 million d'enfants de moins de 5 ans qui souffrent de malnutrition aiguë sévère. Nous n'entendons pas beaucoup parler des 850.000 réfugiés et rapatriés actuellement hébergés au Tchad et au Niger, deux des pays les plus pauvres dans le monde. Tout cela, j'ai pu le constater en personne au cours de mes nombreux voyages dans la région, et notamment au Tchad », a déclaré le Secrétaire général adjoint.

« Les besoins humanitaires ont atteint un niveau record », a-t-il constaté, en référence au nouveau rapport sur les besoins de financement humanitaire rendu public la veille par le Bureau de la coordination des affaires humanitaires des Nations Unies (OCHA).

Selon l'étude, 18,8 milliards de dollars sont désormais nécessaires en 2015 pour répondre aux besoins de 78,9 millions de personnes vulnérables dans 37 pays.

« Nous n'avons reçus que 26% de ce montant », a ajouté M. O'Brien, précisant que plus de 110 millions de personnes à travers le monde dépendent des organisations humanitaires pour leur subsistance et protection.

Au nombre des facteurs permettant d'expliquer cette situation, le Secrétaire général adjoint a cité les changements démographiques, la violence urbaine, l'accroissement des flux migratoires, l'impact du changement climatique et les nouvelles flambées de maladies comme le virus Ebola et le chikungunya.

« Il suffit d'une hausse soudaine des prix ou d'une mauvaise récolte pour faire sombrer des familles et des communautés entières dans la crise. Et il n'y a aucun signe de répit », a-t-il ajouté.

Dans le même temps, M. O'Brien s'est félicité de la résilience et des capacités d'adaptation dont fait preuve la communauté humanitaire, ainsi que du dynamisme du financement de l'aide.

« La générosité des donateurs n'a pas faibli », a-t-il assuré, saluant le montant record de 10,7 milliards de dollars perçu en 2014.

En revanche, a-t-il déploré, les besoins augmentent à un rythme supérieur à celui des ressources.

« Les crises prolongées sont devenues la nouvelle norme et contribuent également à ce problème », a-t-il ajouté, soulignant que dans certains endroits, les personnels humanitaires sont devenus les fournisseurs par défaut de services de base.

Dans ce contexte, le Secrétaire général adjoint a insisté sur deux voies d'amélioration possibles.

« Nous devons développer des relations plus étroites avec les acteurs du développement, en particulier dans le cadre des crises prolongées », a-t-il dit, insistant sur la planification conjointe avec les gouvernements et les partenaires humanitaires et du développement (ONG ou membres de la société civile).

« Nous devrions élaborer et agir selon des plans pluriannuels s'agissant des crises prolongées, et ces plans devraient inclure la fin de la phase d'urgence et notre propre sortie progressive », a développé M. O'Brien.

« Le deuxième point réside dans la crise de la protection des civils », a-t-il ajouté, précisant que de plus en plus, les gouvernements et parties ne respectent pas leur obligation de protéger les populations civiles.

Le Secrétaire général adjoint a notamment dénoncé les attaques directes et de plus en plus fréquentes contre les civils, les hôpitaux et les écoles en cas de conflit.

« Nous devons veiller à ce que les parties aux conflits agissent en conformité avec le droit international, et tiennent les coupables pour responsables. Nous devons dire la vérité aux autorités, rappeler aux parties leurs obligations et les engager sur la voie de solutions pour protéger les civils et aider les plus vulnérables », a-t-il dit.