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Syrie : Ban Ki-moon accuse la communauté internationale de baisser les bras

Un bâtiment endommagé à Alep en Syrie.
OCHA
Un bâtiment endommagé à Alep en Syrie.

Syrie : Ban Ki-moon accuse la communauté internationale de baisser les bras

Le Secrétaire général des Nations Unies, Ban Ki-moon, a accusé vendredi la communauté internationale de baisser les bras face au sanglant conflit en Syrie et de se faire à l'idée qu'on ne peut pas faire grand-chose pour y mettre fin.

« Je suis ici pour exprimer ma colère et ma déception concernant les froids calculs qui semblent s'imposer, le fait que bien peu peut être fait à part armer les parties en conflit et regarder la guerre faire rage », a dit M. Ban dans un discours à New York devant The Asia Society, une organisation non gouvernementale américaine qui éduque les Américains sur l'Asie.

« La communauté internationale ne doit pas abandonner le peuple de Syrie et ceux de la région », a-t-il ajouté. « Nous devons agir. Toutes les valeurs auxquelles nous croyons, et toutes les raisons pour lesquelles les Nations Unies existent, sont en jeu, ici et maintenant, à travers le paysage de destructions qu'est la Syrie aujourd'hui. »

Le conflit en Syrie a déjà fait plus de 150.000 morts. La moitié de la population de 22 millions d'habitants est déplacée, dont 2,8 millions sont enregistrés comme réfugiés.

Le Secrétaire général a rappelé que les Nations Unies ont lancé des opérations humanitaires de grande envergure, que son mécanisme des droits de l'homme surveille et documente scrupuleusement les atrocités commises et que ses équipes de désarmement travaillent avec l'Organisation pour l'interdiction des armes chimiques (OIAC) pour détruire l'arsenal chimique syrien.

Malgré tous ces efforts, le principal objectif qui est de mettre fin au conflit n'a toujours pas été atteint. « Cela fait longtemps que la communauté internationale, en particulier le Conseil de sécurité, aurait dû assumer ses responsabilités », a estimé Ban Ki-moon.

Selon lui, la priorité immédiate des Nations Unies en Syrie est de mettre fin à la violence. « J'exhorte le Conseil de sécurité à imposer un embargo sur les armes. Si les divisions au Conseil continuent d'empêcher une telle mesure, j'appelle les pays à le faire à titre individuel », a déclaré M. Ban.

La deuxième priorité, selon lui, est la nécessité pour la communauté internationale de faire tout son possible pour protéger la population. Environ 4,7 millions de personnes se trouvent dans des zones difficiles à atteindre. « J'appelle à mettre fin aux sièges et à accorder un accès humanitaire sans entraves à travers les lignes de front et à travers les frontières », a dit M. Ban.

La troisième priorité est le besoin de démarrer un processus politique sérieux pour une nouvelle Syrie. « Les parties en conflit ont systématiquement bloqué les efforts sans relâche de deux des diplomates mondiaux les plus brilliants et expérimentés, Kofi Annan et Lakhdar Brahimi. La diplomatie semble s'être arrêtée. L'élection présidentielle plus tôt ce mois-ci (en Syrie) a porté un nouveau coup au processus politique. L'élection n'a pas répondu aux standards minimaux d'un scrutin crédible et a créé un fait qui va à l'encontre de la Déclaration de Genève », a déclaré le Secrétaire général, qui a précisé qu'il allait bientôt nommer un nouveau Représentant spécial conjoint pour la Syrie, en remplacement de M. Brahimi.

La quatrième priorité est la lutte contre l'impunité. « Plus tôt cette année, la Commission d'enquête qui a été établie par le Conseil des droits de l'homme a conclu que la Cour pénale internationale est l'organe approprié pour lutter contre l'impunité en Syrie », a noté M. Ban. « Je demande aux Etats membres qui empêchent de saisir (la CPI) de réfléchir au message que cela envoie en matière d'impunité. Je demande à ceux qui disent 'non' à la CPI, mais qui disent soutenir la lutte contre l'impunité en Syrie, de proposer des alternatives crédibles. »

Concernant l'arsenal chimique syrien, le Secrétaire général s'est félicité que 92% des armes chimiques de la Syrie ont été détruites ou retirées du pays. Il a toutefois noté qu'il y a eu depuis de nouvelles allégations concernant l'usage de composants chimiques toxiques, tel que le chlore.

Enfin, le Secrétaire général a estimé qu'il fallait affronter les dimensions régionales du conflit en Syrie et notamment la menace extrémiste. « Le conflit syrien s'est maintenant propagé de manière visible et dévastatrice en Iraq », a-t-il dit. « Les développements de ces derniers jours permettent facilement d'imaginer une spirale d'attaques et de représailles comme on ne l'a pas vu en Iraq depuis 2006 et 2007 ».