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N'oublions pas la République centrafricaine, exhorte un haut responsable de l'ONU

Des enfants déplacés par les violences en République centrafricaine participent à une classe en plein air dans un camp.
HCR/D. Mbaiorem
Des enfants déplacés par les violences en République centrafricaine participent à une classe en plein air dans un camp.

N'oublions pas la République centrafricaine, exhorte un haut responsable de l'ONU

Le Sous-Secrétaire général aux droits de l'homme, Ivan Šimonović, a lancé jeudi un avertissement sur l'état critique des institutions étatiques de la République centrafricaine, proches d'un « effondrement total », et exhorté la communauté internationale à ne pas abandonner cette nation marquée par le conflit.

« Le Gouvernement de transition récemment nommé, et de nature plutôt inclusive, reste très faible. Bien que la situation à Bangui se soit quelque peu améliorée, l'Etat n'existe tout simplement pas en dehors de la capitale et il n'y a pas d'état de droit », a déclaré Ivan Šimonović, au terme de sa visite de quatre jours dans le pays.

« Au-delà de Bangui, il n'y a ni police, ni système judiciaire, ni services sociaux. La sécurité est pratiquement inexistante et la population vit dans un état de peur permanent», a déclaré le Secrétaire général adjoint.

« L'ampleur des pillages et des destructions que j'ai pu observer est choquante. Lorsque j'ai visité la salle du tribunal de Bambari, je n'ai trouvé qu'une pièce vide, dont le sol était jonché d'archives et de registres. Les institutions étatiques, y compris judiciaires, ressemblent aujourd'hui à cette salle de tribunal », a déclaré Ivan Šimonović.

« Comment ce pays pourra-t-il organiser des élections régulières si toutes les archives et registres civils sont détruits ? », s'est-il interrogé, avant de rappeler que la République centrafricaine a été frappée par des décennies d'instabilité et de combats.

Sous le régime du Président Bozizé, chassé du pouvoir par les rebelles de la coalition Séléka en mars dernier, la partie du nord du pays, peuplée en majorité par des personnes de confession musulmane, a été négligée, et les populations, discriminées.

De nombreuses violations des droits de l'homme ont été commises, notamment des exécutions sommaires et des cas de disparition forcée, de détention arbitraire et de torture. Le pays a atteint un degré de violence et subi des destructions d'une ampleur sans précédent depuis que la coalition Séléka, originaire du nord du pays, a lancé son offensive en décembre dernier, explique Ivan Šimonović.

Le représentant onusien a aussi fait part de sa préoccupation face au taux élevé de cas de violences sexuelles dans le pays. « A l'hôpital de Bambari, j'ai rencontré une jeune femme de 18 ans qui a été violée alors qu'elle était enceinte de quatre mois et qui a perdu son bébé», a déclaré M. Šimonović.

La situation chaotique du pays a un impact sur la vie quotidienne des populations dans tous ses aspects, s'est alarmé le Secrétaire général adjoint de l'ONU, indiquant que les écoles publiques sont fermées depuis décembre dernier et que moins de 20% des services de santé sont opérationnels.

« La propagation rapide de la malaria et d'autres maladies, le taux élevé de mortalité maternelle et la malnutrition risquent de tuer plus de personnes que les violences liées au conflit lui-même », a averti Ivan Šimonović.

Le haut responsable s'est ensuite dit extrêmement préoccupé par le manque d'attention, de la part des médias et de la communauté internationale, vis-à-vis de la situation en République centrafricaine du point de vue humanitaire et du point de vue des droits de l'homme.

« Le conflit en République Centrafricaine ne doit pas tomber dans l'oubli, pour trois raisons principales : ce conflit va continuer de causer des souffrances à une grande partie de la population ; les divisions ethniques et religieuses vont s'en trouver accentuées ; et un conflit prolongé risque de déstabiliser la région au sens large », a averti Ivan Šimonović.

Il a jugé essentiel de restaurer la sécurité pour ramener une forme de normalité dans l'ensemble du pays, éviter l'approfondissement des divisions ethniques et religieuses et faciliter la réconciliation nationale.

« Le désarmement, l'intégration et la formation conjointe d'un nombre limité d'éléments des anciennes forces de sécurité et de la Séléka, qui ont été certifiés afin d'exclure les personnes coupables de violations de droits de l'homme, est la voie à suivre. Cependant, cela ne permettra pas de résoudre le problème du vide sécuritaire qui prévaut actuellement », a indiqué le Secrétaire général adjoint.

Il a ensuite plaidé pour le renforcement sans délai des troupes régionales de la Communauté Economique des Etats de l'Afrique Centrale par une force internationale plus large et plus diversifiée sous l'égide logistique des Nations Unies.

« Il s'agit d'une étape essentielle pour restaurer la sécurité et pour faciliter la réforme du secteur de la sécurité, ainsi que le départ des combattants étrangers. Pareil déploiement aidera également à préparer des élections libres et régulières dans les prochains 18 mois, comme prévu par les Accords de Libreville », a conclu M. Šimonović.