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Services de renseignements : un expert de l'ONU critique la justice américaine

Le Rapporteur spécial sur la lutte contre le terrorisme et les droits de l'homme, Ben Emmerson.
Le Rapporteur spécial sur la lutte contre le terrorisme et les droits de l'homme, Ben Emmerson.

Services de renseignements : un expert de l'ONU critique la justice américaine

Le Rapporteur spécial des Nations Unies sur la lutte contre le terrorisme et les droits de l'homme, Ben Emmerson, a exprimé jeudi son profond regret concernant une récente décision de la justice des Etats-Unis qui a refusé d'autoriser des demandes d'information concernant l'implication du Royaume-Uni dans les programmes américains de transferts spéciaux de détenus.

Lors d'une audience publique au Parlement européen sur l'implication d'Etats membres de l'Union européenne dans ces programmes de détentions secrètes et de transferts de détenus (extraordinary renditions), M. Emmerson a expliqué que la décision de la justice américaine était « un affront aux principes de bonnes pratiques en matière de surveillance des services de renseignements ».

M. Emmerson a fait référence à la décision de justice du 2 avril qui a rejeté une demande faite par le groupe parlementaire britannique sur les transferts spéciaux de détenus et qui comporte des membres de tous les partis politiques.

« Le groupe a fait pression, avec raison, pour une surveillance indépendante des services de renseignement et pour obtenir de vraies réponses du ministère de la défense américain, de la CIA et d'autres agences du gouvernement américain sur ce sujet important », a déclaré M. Emmerson devant les parlementaires européens.

En 2008, le groupe avait déposé 43 requêtes concernant la participation britannique dans le programme de transferts spéciaux de détenus des Etats-Unis. Le gouvernement américain avait refusé les requêtes au motif d'une exception statuaire qui permet aux services de renseignement de refuser des requêtes venants « d'entités gouvernementales étrangères ».

« La décision est décevante puisqu'elle va à l'encontre des principes de bonnes pratiques en matière de la surveillance des services de renseignements qui avaient été compilés par l'ancien Rapporteur spécial sur la lutte contre le terrorisme et les droits de l'homme à la demande du Conseil des droits de l'homme », a rappelé M. Emmerson.

« La décision est surprenante puisqu'elle semblerait être basée sur une compréhension erronée de la loi fondamentale britannique et du principe universel de la séparation des pouvoirs. Le groupe parlementaire britannique sur les transferts spéciaux de détenus est une institution parlementaire et non pas gouvernementale. Il est totalement indépendant du gouvernement et constitue un modèle de contrôle démocratique », a-t-il souligné.

Le Rapporteur spécial a également rappelé qu'il existe un besoin considérable de davantage de transparence et de responsabilité.

« Le fait de refuser de dévoiler les informations clés concernant la participation de fonctionnaires britanniques dans les transferts spéciaux de détenus ouvre la voie à l'impunité pour les fonctionnaires de l'Etat britannique qui pourraient avoir participé à ces violations graves des droits de l'homme », a indiqué M. Emmerson.

« La transparence est fondamentale non seulement pour traduire devant la justice les fonctionnaires qui ont pris part à ce genre de crimes mais cela fait peser sur tout le monde des soupçons injustifiés. La protection injustifiée de secrets, avec une couverture légale plus que douteuse, ne fait que retarder l'établissement des faits et de la vérité », a-t-il conclu.