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Haïti : il faut investir dans l'eau et l'assainissement pour éradiquer le choléra

En Haïti, une fillette reçoit des fluides par voie intraveineuse pour traiter une forte déshydratation liée au choléra.
En Haïti, une fillette reçoit des fluides par voie intraveineuse pour traiter une forte déshydratation liée au choléra.

Haïti : il faut investir dans l'eau et l'assainissement pour éradiquer le choléra

Alors qu'Haïti traverse une des plus graves épidémies de choléra de l'histoire contemporaine, l'Organisation panaméricaine pour la santé (PAHO), le Centre pour la prévention et le contrôle des maladies (CDC) et le Fonds des Nations Unies pour l'enfance (UNICEF) ont fait mardi des propositions pour combattre la maladie en Haïti et en République dominicaine.

« On note souvent que l'eau et l'assainissement nécessitent des investissements très onéreux, mais on oublie de souligner le coût dû à l'absence de ces infrastructures. Nous savons que la vie, la dignité et le développement sont très difficiles sans eau et sans assainissement, et tous les pays d'Amérique latine ont pâti de cela dans leur développement économique et social », a déclaré la Directrice de la PAHO, Dr. Mirta Roses lors d'une conférence de presse à Washington, aux Etats-Unis.

Elle a rappelé que les épidémies de choléra ont un grand impact sur le développement. Les pays qui connaissent de telles épidémies en souffrent économiquement, notamment pour ce qui concerne l'agriculture, qui a besoin d'eau, et le secteur du tourisme.

Depuis le début des années 2000, « la région a connu d'importants progrès et le continent sud-américain a été préservé du choléra. Il est important de se souvenir que le choléra est une des raisons pour laquelle l'eau et l'assainissement font partie des Objectifs du Millénaire pour le développement. A cause des expériences dans la région, les pays ont fait pression pour l'inclure », a expliqué Mirta Roses, en rappelant que l'eau et l'assainissement ont été reconnus récemment comme un droit humain par l'Assemblée générale des Nations Unies.

Selon elle, il faut que des installations d'eau et assainissement soient créées dans toutes les structures où se rassemblent les gens, comme les écoles, les prisons, les marchés etc. « Nous appelons ceux qui construisent des nouvelles structures à prendre en compte la nécessité d'installer ce genre d'installations », a-t-elle souligné. Le choléra est étroitement lié à la pauvreté et les communautés plus aisées sont moins vulnérables que les plus démunis.

En Haïti, les conditions sur le terrain ont été favorables à la propagation du choléra. L'accès à l'eau, à l'assainissement et à l'hygiène est très limité. Cela est en contraste avec le reste de l'Amérique latine.

« Nous devons nous rappeler qu'en Haïti les gens sont obligés de recourir à de l'eau qui n'est pas propre. Cela est non seulement un danger sanitaire, mais aussi un affront à la dignité humaine. Quand le choléra s'est déclaré en Haïti dix mois après le séisme, la maladie a trouvé un terrain fertile pour devenir une des plus grandes épidémies de l'histoire moderne », a souligné pour sa part le Directeur du CDC, Kevin De Cock.

En décembre 2011, 500.000 cas de choléra avaient été détectés en Haïti ayant entraîné plus de 7.000 morts. Il y a eu 20.000 cas déclarés en République dominicaine avec 359 morts. « Malgré de grands progrès dans le combat contre la maladie, entre 100 et 200 personnes sont toujours contaminées quotidiennement en Haïti, et avec l'arrivée de la saison des pluies, nous devons nous attendre à de nouveaux pics de contamination allant jusqu'à 1000 personnes par jour », a dit le Dr. De Cock.

Même si l'éradication du choléra est un objectif sur le long terme, qui demande des investissements dans les infrastructures dans le domaine de l'eau et de l'assainissement, il y a des choses à faire qui donnent des résultats immédiats, a expliqué le chef des questions d'eau et assainissement de l'UNICEF, Sanjay Wijesekera.

« Les investissements dans les infrastructures sont essentiels et nous devons relancer nos efforts dans ce domaine. Il existe aussi des interventions associées qui viendraient compléter et optimiser les investissements en matière d'infrastructures. De simples changements de comportements, tel que le fait de se laver les mains avec du savon peut avoir un impact considérable avec un coût modeste », a déclaré M. Wijesekera.

Le Président de la République dominicaine Leonel Fernandez, qui participait également à la conférence de presse par lien vidéo, a salué le lancement de l'appel à l'action pour l'élimination du choléra en Haïti et en République dominicaine.

« La communauté mondiale sait que le choléra a provoqué la mort de milliers de citoyens haïtiens et dans une moindre mesure, de citoyens dominicains au cours de l'année 2011. Le peuple frère d'Haïti a subi l'assaut de cette terrible maladie de manière plus dramatique, ce qui a motivé la solidarité des autorités de la République dominicaine et d'autres nations qui ont prêté leur concours pour pouvoir diminuer les ravages de la maladie », a déclaré M. Fernandez.

Le Président d'Haïti, Michel Joseph Martelly, également par lien vidéo, a de son côté rappelé que de nombreuses personnes souffrent encore de cette maladie transmise par le manque d'accès à l'eau potable et à cause de la faiblesse du système d'assainissement dans le pays.

« Des décennies de négligence et un manque d'investissement dans ces aspects spécifiés antérieurement ont causé beaucoup de maladies liées à l'utilisation d'une eau non potable, le manque d'éducation sur les bonnes pratiques d'hygiène, la mauvaise gestion des excrétions pour ne citer que cela. Aujourd'hui plus que jamais c'est le moment de colmater les brèches », a indiqué M. Martelly.

« Aujourd'hui je demande à notre Ministre de la Santé d'organiser une rencontre, avec nos voisins de la République Dominicaine et nos partenaires internationaux et locaux supportant cette lutte, afin de déterminer une stratégie conjointe pour éliminer le choléra de notre île », a-t-il ajouté.