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Changement climatique : l'ONU demande un Plan Marshall pour l'agriculture

Changement climatique : l'ONU demande un Plan Marshall pour l'agriculture

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« Sans un changement important dans les politiques mises en œuvre, les émissions de gaz à effet de serre provenant de l'agriculture pourrait augmenter de 40% d'ici 2030 », a mis en garde lundi le Rapporteur spécial sur le droit à l'alimentation, Olivier De Schutter, appelant les participants à la Conférence des parties à la Convention cadre de l'ONU sur les changements climatiques (CCNUCC) organisée jusqu'au 10 décembre à Cancun, au Mexique, à « agir pour lutter efficacement contre le changement climatique et son impact désastreux sur le droit à l'alimentation ».

« Les négociations qui s'ouvrent aujourd'hui à Cancun sont cruciales pour garantir le droit à l'alimentation de centaines de millions de personnes », a-t-il insisté, estimant que « Cancun devrait montrer la voie vers une Plan Marshall Vert pour l'agriculture ».

Dans un communiqué, le Rapporteur spécial estime que « des actions ambitieuses pour réduire les émissions de gaz à effet de serre et soutenir l'adaptation au changement climatique sont vitales ». « Des actions sont également nécessaires pour garantir la viabilité des systèmes de production alimentaire qui améliorent les moyens de subsistance des communautés pauvres, les premières victimes du changement climatique », a-t-il ajouté.

L'impact du changement climatique sur la production agricole dans les pays en développement et sur la volatilité des marchés est aujourd'hui connu avec plus de précisions qu'auparavant. Le Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (GIEC) a ainsi estimé que dans le sud de l'Afrique, les rendements de l'agriculture pourraient être réduits de 50 % entre 2000 et 2020, tandis que la superficie des zones arides et semi-arides pourrait augmenter de 60 à 90 millions d'hectares d'ici à 2080, date à laquelle 600 millions de personnes supplémentaires seront exposées à des crises alimentaires récurrentes directement liées aux changements climatiques.

« Ces projections sont terribles, mais les tentatives actuelles pour stimuler la production alimentaire avec des engrais chimiques et le développement des plantations fortement mécanisées à grande échelle mettent l'agriculture sur la mauvaise voie », a estimé l'expert de l'ONU.

Selon lui, « l'agriculture est déjà directement responsable de 14 % des émissions de gaz à effet de serre – 33% en incluant le dioxyde de carbone produit par la déforestation pour l'expansion de la culture ou des pâturages ». « Ce chiffre va augmenter dans les prochaines années », a-t-il poursuivi, avant d'expliquer que cette forme d'agriculture industrialisée était « clairement insoutenable à moyen terme » et « portait atteinte au droit à l'alimentation de millions de petits exploitants agricoles et d'autres communautés vulnérables ».

« Ce dont nous avons besoin, c'est d'un « Plan Marshall Vert » pour l'agriculture », a souligné Olivier De Schutter, « afin d'encourager la transition mondiale vers des moyens de production alimentaires à faibles émissions de carbone, fondés sur les besoins des communautés rurales vulnérables et les petits exploitants ».

Selon lui, « les méthodes de production agricoles qui privilégient de faibles émissions de carbone et la préservation des ressources offrent une voie alternative qui peut à la fois atténuer les changements climatiques en limitant les émissions de gaz à effet de serre, tout en améliorant les moyens de subsistance des communautés rurales pauvres, en réduisant leur dépendance coûteuse aux énergies fossiles de plus en plus couteuses ».

« Il faudra des efforts soutenus pendant plusieurs décennies, mais il n'y a pas de temps à perdre », a exhorté le Rapporteur pour conclure. « Nous devons commencer maintenant à orienter l'agriculture vers une voie écologiquement et socialement plus durable. C'est une obligation, si nous sommes sérieux dans nos engagements à lutter contre le changement climatique et la faim ».