L'actualité mondiale Un regard humain

Népal : le processus de paix menacé par le manque de progrès

Népal : le processus de paix menacé par le manque de progrès

Karin Landgren.
Le dernier rapport du Secrétaire général de l'ONU sur la situation au Népal présente « une image décourageante de l'état du processus de paix », montre « l'échec des partis politiques pour le relancer » et « les désaccords qui persistent entre le gouvernement et l'opposition sur le rôle de la Mission de l'ONU au Népal (MINUNEP) », a indiqué mardi la Représentante de l'ONU au Népal, Karin Landgren, lors d'une présentation du document devant le Conseil de sécurité.

Evoquant d'abord l'état du processus de paix, elle a rappelé qu'un accord était intervenu en mai pour proroger le mandat de l'Assemblée constituante, dans la mesure où celle-ci n'était pas parvenue à rédiger et adopter une nouvelle constitution dans le temps imparti. Estimant que cet accord avait permis d'éviter « l'effondrement potentiel du processus de paix », elle a souligné qu'il n'avait pas pour autant « régler les problèmes ».

Karin Landgren a notamment indiqué que, conformément à cet accord, le Premier ministre avait démissionné le 30 juin pour laisser sa place à un nouveau chef de gouvernement désigné par consensus, que les partis politiques n'étaient pas parvenus à s'entendre pour élire un nouveau chef de gouvernement, que par conséquent, le Premier ministre sortant continuait de diriger un gouvernement chargé d'expédier les affaires courantes.

Reprenant les conclusions du rapport du Secrétaire général, elle a indiqué que l'échec de la rédaction d'une constitution et celui de la formation d'un gouvernement de consensus, prévus par l'Accord de paix global de novembre 2006, avaient créé un climat de tension et de défiance à l'égard du processus de paix.

Elle a ensuite rappelé que l'Accord de paix global prévoyait également l'intégration aux forces de sécurité nationales du personnel de l'armée maoïste ou sa réintégration sociale, ainsi que la démocratisation de l'Armée nationale népalaise, sous la supervision d'un Comité spécial présidé par la MINUNEP.

Karin Landgren a souligné qu'à l'heure actuelle, si les arsenaux militaires restaient sous le contrôle de la MINUNEP, « deux armées existaient toujours », disposant encore « chacune de leur propre chaine de commandement » et s'étant « chacune livrée à de nouveaux recrutements d'effectifs ».

Citant ensuite deux évènements qui ont mis en évidence des carences de la MINUEP –le meurtre en mai 2008 par les maoïstes d'un homme d'affaires proche du gouvernement et l'intervention en 2009 de la MINUEP après l'arrestation de 19 maoïstes en possession d'armes de l'ONU, la Représentante de l'ONU a indiqué que la MINUEP était désormais considérée comme une force alliée des maoïstes.

Par conséquent, il existe selon elle un risque de retrait unilatéral de l'Armée nationale népalaise du système de surveillance des arsenaux dont la MINUNEP a la charge. Une telle décision « pourrait avoir comme effet d'abolir l'Accord de paix global », a-t-elle mis en garde, citant encore des documents internes à l'Armée nationale népalaise montrant le souhait de son état major de voir la MINUEP se retirer du Népal.

Selon la Représentante de l'ONU, cette position a été relayée par des responsables politiques du gouvernement, notamment le ministre de la Défense, en dépit des condamnations des évènements par la MINUEP et des appels à une plus grande coopération entre les armées maoïste et nationale pour mettre en œuvre l'Accord de paix globale.

« Ces récents défis directs au système de surveillance de la MINUEP orientent le processus de paix dans la mauvaise direction. Les risques pour le processus, et la démocratie au Népal, sont réels », selon Karin Landgren.

Parmi ces risques, elle a notamment cité celui de ne pas voir l'Assemblée constituante rédiger une nouvelle constitution en dépit de la propagation de son mandat d'un an, celui de voir se poursuivre la détérioration de la sécurité dans le pays, où des journalistes ont été assassinés et où des centaines de responsables locaux ont menacé de démissionner s'ils n'obtenaient pas une protection, celui de voir la mission de contrôle des arsenaux et des armées de la MINUEP interrompue, « avec des conséquences imprévisibles ».

« Le principal risque reste celui de voir le processus de paix et le processus politique discrédité », a-t-elle ajouté, avant de se ranger derrière la proposition faite par le Secrétaire général de l'ONU, estimant que « quelque chose doit changer pour que le processus de paix parvienne à sa fin ».

« Le processus de paix n'est pas un échec, même s'il a peu avancé. En un an, le niveau de méfiance entre les parties s'est considérablement accru. Mais il peut être remis sur les rails, à condition que les responsables politiques réitèrent leurs engagements et leurs priorités et place le processus de paix en tête de leurs activités, en reconnaissant que c'est uniquement par la négociation que des progrès peuvent être faits », a conclu Mme Landgren.