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Afghanistan : la corruption préoccupe la population (sondage)

Afghanistan : la corruption préoccupe la population (sondage)

Le Président afghan Hamid Karzaï.
La corruption est la principale préoccupation de la population afghane, devançant même l'insécurité, selon un sondage contenu dans un rapport de l'Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (ONUDC) publié mardi.

« Les Afghans disent qu'il est impossible d'obtenir un service public sans verser un pot-de-vin », a déclaré le Directeur exécutif de l'ONUDC, Antonio Maria Costa, qualifiant la corruption de « cancer métastasé ».

« Afin d'empêcher que ce cancer n'entre dans sa phase terminale, le Président (afghan Hamid) Karzaï doit immédiatement administrer des médicaments puissants, sur la base de la Convention des Nations Unies contre la corruption qu'il doit fortement pousser vers la ratification », a-t-il estimé.

Le sondage a été réalisé entre l'automne 2008 et l'automne 2009 auprès de 7.600 personne dans douze provinces du pays et dans plus de 1.600 villages d'Afghanistan, recensant des expériences vécues plutôt que des ressentis de la population. Derrière la malhonnêteté publique (59%) et l'insécurité (à 54%), c'est le chômage qui est cité par 52% des personnes sondées comme étant leur principale préoccupation.

La corruption est un élément quotidien de la vie des Afghans, révèle le rapport. Sur la période couverte, une personne sur deux a dû payer au moins un pot-de-vin à un fonctionnaire, la demande émanant directement et explicitement de ce dernier dans 56% des cas. La moyenne des pots-de-vin versés est de 160 dollars, dans un pays dont le PIB par habitant ne dépasse pas les 425 dollars par an.

« La corruption représente un impôt écrasant sur une population qui figure déjà parmi les plus pauvres du monde », a souligné M. Costa. « La drogue et les pots-de-vin sont les deux principales sources de revenu en Afghanistan : à eux deux, ils correspondent à la moitié du PIB licite du pays ».

Selon l'étude, ceux qui ont pour tâche de faire respecter la loi sont perçus comme ceux qui sont les plus coupables de la violer. Environ 25% des Afghans ont eu à payer au moins un pot-de-vin à des représentants de la police ou des autorités locales, et entre 10 et 20% à des juges, procureurs ou membres du gouvernement. La proportion monte à 40% lorsqu'ils ont eu à faire appel à des hauts représentants politiques.

Le plus souvent, cela permet d'accélérer une procédure administrative et plus d'un tiers de la population considère qu'il s'agit là d'une norme. Seuls 9% de la population urbaine a rapporté un acte de corruption aux autorités.

La communauté internationale n'échappe pas non plus aux critiques puisque 54% des Afghans considèrent que les organisations internationales et non gouvernementales « sont corrompues et ne sont dans le pays que dans le but de s'enrichir ». Ce sentiment risque de saper l'efficacité de l'aide et de discréditer ceux qui tentent de venir en aide à un pays qui a désespérément besoin d'assistance, souligne le rapport.

« Il est temps d'assécher les marais de la corruption, et de mettre un terme à la disparition de l'argent et de la confiance dans un gigantesque trou noir », a déclaré Antonio Maria Costa. « Dans sa lutte contre la corruption, c'est l'Afghanistan lui-même qui doit être aux avant-postes ».